Après avoir assisté à l'une des représentations de la toute dernière production de la Rubrique, Le Déluge après, je dois avouer que j'abonde généralement dans le même sens que le texte paru sous la plume de Christiane Laforge, dans les pages du Quotidien du 19 janvier 2008.
Les comédiens sont bons. Le texte est bien... un peu long... avec parfois un excès de jurons... mais bien. Toutefois, à la première écoute, il est, je trouve, difficile de cerner quel est le véritable sens de cette fable (ou conte de fée?), de l'enjeu, le lien entre les personnages... et paradoxalement, l'histoire n'en demeure pas moins simple et facile à suivre.
Sans m'être ennuyé, je me suis posé tant de questions et réflexions (les premières étant reliées au comédien mystérieux!) au cours de cette heure et demie que dure ce spectacle que je n'ai pas réussi à plonger dans ce qui m'était proposé.
Peut-être est-ce dû finalement à un problème de mise en scène/direction d'acteur. Comme par exemple, charger le jeu de Monique Gauvin (par ailleurs fort intéressante... et magnifique chanteuse) d'un lourd accent anglophone finit par détourner l'écoute pour assommer l'attention du spectateur à ce qu'il est dit. Ou bien diriger le jeu de Richard Fréchette lors de sa première (et longue!) apparition à la «olivier-guimond-qui-joue-l'homme-saoûl» finit aussi par nous (me) saoûler. Les présences d'Émilie Bouchard-Jean, de Patrice Leblanc et de tous les autres, quoique parfois touchantes, ne permettent pas d'esquisser un projet d'ensemble clair, une ligne directrice à ce spectacle... et ne nous mènent guère vers cette exquise sensualité annoncée. La seule qui y parvient, en fait, est probablement Dalida-Johanne qui pleure-de-joie la présence soudaine de son Omer-Richard.
La facture esthétique de cette production peut aussi (peut-être) remettre en cause sa bonne compréhension.
Il semble manquer d'unité entre les différents espaces dramatiques (toile, route, lieux) où l'on passe de la réalité au symbolisme ou du moins, à l'évocation, dans un déambulatoire un peu forcé (et restreint!)... Il devient parfois un peu ardu de définir quel est le niveau d'énonciation. L'utilisation (et la superposition) de ces espace souffre peut-être aussi un peu de leur trop grande caractérisation: le snack-bar, la cuisine-salon de Dalida, le bar, la route, le fleuve, le camion (hors-champ). Tout est largement défini (par le mobilier) et s'ouvre, par conséquent, difficilement sur d'autres possibilités.
Quant aux costumes, quelques questions se poseraient (questions qui relèvent aussi -et surtout, à- de la mise en scène et de sa conception): quel est la véritable fonction du personnage de Dalida et pourquoi l'attriquer de la sorte? pourquoi la beauté improbable de June revêt-elle un tel style néo-friperie-haute-couture? les cheveux ayant une si grande importance (du moins ce que j'en ai compris), les perruques ne mériteraient-elles pas d'être un peu plus soignées, moins fausses?
Voilà, en gros, les réflexions qui m'ont tenu compagnie, de retour dans la froidure et la noirceur de ma voiture, après la représentation.
Le Déluge après
Théâtre la Rubrique
Jusqu'au 2 février 2008
Centre Culturel du Mont-Jacob (Jonquière)
Théâtre la Rubrique
Jusqu'au 2 février 2008
Centre Culturel du Mont-Jacob (Jonquière)
P.S.: Les scènes de nudité (que je trouve par ailleurs un peu amoindries, tassées sur le côté de la scène alors qu'elles devraient être le coeur même de ce village paumé) font, par ailleurs, écho au dernier numéro des Cahiers théâtre JEU paru il y a quelques jours et qui traite du corps (dont un article sur la nudité au théâtre: il n' y a de véritable nudité au théâtre que celle masquée, de dire Michel Vaïs... sinon, la nudité du comédien prime sur celle du personnage... et à ce moment, c'est par exemple Émilie que je vois nue et non June... Pat Leblanc et non Denis... etc.). À lire si le sujet intéresse...
17 commentaires ont été publiés sur l'autre blogue:
Étrange, aucun commentaires.
Il n'y a pas un dicton qui dit : "Qui ne dit mot, consent."???
Étant moi-même un membre de l'équipe de création de cette production, je ne crois pas en mon objectivité. Ceci étant dis je crois que toute création théâtrale est un amalgame de plusieurs éléments parfois, pour diverses raisons, réussis ou non. Je penses ici avoir satisfait les désirs du metteur en scène et mis en valeur les différents éléments visuels... Pour le reste, cela ne m'appartient pas. Ce qui me surprend ici, un peu comme bébéjajouelatoune, c'est l'absence de réaction. J'étais le premier à penser que ce billet provoquerait un débas d'idée qui, à mon avis, est une bonne chose pour notre petit milieux "co-sanguin".
Peut-être les lecteurs n'ont pas encore vu!
lol... en effet...
Je termine en réaffirmant mon appréciation du spectacle, la fable, les personnages, la musique... Bref une création montée par des professionnels que j’ai regardée avec mes yeux de passionnée et que j’ai applaudi avec beaucoup de sincérité.
* je trouvais pas d'autres mots, je fais référence au caractère, au costume ...
-Un Omer tellement captivant, juste et auquel je croyais tellement, j'aurais bien voulu qu'il soit mon oncle ou avec un lien de ce genre!!!
Voila
P.S. Tu n'es pas le seul abonné à la revue Jeu, sache que si tu veux consulter, on a les exemplaires à partir du num. 1 publié en 1976.
Bonjour Dario!
J'ai un parti pris, évidemment. Mais aussi un recul particulier, par la position que j'occupe en tant que gestionnaire de cette compagnie. J'ai le devoir de m'assurer d'une qualité de rendu et de laisser une latitude de création optimale aux créateurs dans un contexte de restrictions budgétaires et un soucis de professionnalisme. J'aime bien ce débat. Au plaisir de lire d'autres commentaires.
Moi je te félicite Dario d'avoir eu l'audace d'afficher tes couleurs. Je pense qu'ici au Saguenay on a peur de se critiquer entre nous de peur de ne plus travailler. En fait, je crois qu'il faut être capable de prendre la critique ; selon moi c'est ça qui nous fait le plus avancer en tant qu'artiste.
Bon, par où commencer.
Tu as raison Dario, le discours autour de la création et de la conception des spectacles peut être très enrichissant. Toutefois, lors de la sortie d'une production, je pense qu'il faut un minimum de délicatesse et annoncer notre but s'il est d'ouvrir la discussion. Je pense bien naïvement qu'il faut s'aider entre nous. Ne montrer que le négatif des choses, peut influencer sur la décision d'une personne d'assister ou non à une représentation. Tu offres une fenêtre sur le théâtre et comme sûrement bien d'autres, je t'accorde une bonne crédibilité. :)
@ Lyne: J'en prends bonne note.
Voici un exemple de ce dont j'aimerais (aurais aimé!) parler... Quand Serge écrit que «l'élément central de la pièce est l'histoire que Dalida nous raconte, la sienne, sa résilience liée au destin tragique de June par le fait même l'histoire de June», il s'agit bel et bien de choix conscient de point de vue qui explique beaucoup de choses... dont la raison qui explique sa présence physique (et scénique) au centre de ce monde. Si je comprends bien, dans ce cas, June devient le prétexte?
Moi c'est comme ça que je l'avais vu.
L'histoire est celle de Dalida, mais aussi du village et surtout comment tout ce qui persiste là depuis 20 ans changera par la venu du personnage de Patrice (dont le nom m'échappe.
Mais June est l'élément central des maux de Dalida.
Placer Dalida au centre change mon point de vue... Intéressant.
Ce matin paraît le Griffonier (journal de l'UQAC) dans lequel, sous la plume de Yves Whissel, se glisse un bon papier sur le spectacle (p.11).
Les choix dans la pièce sont justifiables par moi et mes concepteurs, nous pourrions vous faire un rapport écrit avec notes explicatives si vous voulez, si vous êtes du genre à lire la note sur le petit carton à côté du tableau dans les galeries d'arts. Mais je vous encouragerais plutôt à vous en faire votre propre idée. L'exercice est meilleur pour l'esprit.