samedi 17 février 2024

Plus ça change...

Le théâtre...

C'est pas facile (financièrement) d'en faire. Pas facile (financièrement) dans faire en région... voire même ailleurs. Ça ne l'a jamais été et ça ne le sera sans doute jamais. 

Le cliché est tenace.

Aujourd'hui, en 2024, où chaque compagnie qui initie un projet espère du financement ou, à tout le moins, un public conséquent pour faire ses frais... tout comme en 1899 (dans l'édition du Progrès du Saguenay du 8 juin de cette année-là:


Il faut noter l'empressement  que met le Progrès (dans ce cas précis mais dans de nombreux autres) pour soutenir Cercle dramatique de Chicoutimi (de 1897 à 1911) et inciter fortement la population à être de la partie! 

vendredi 16 février 2024

Quand les mains anonymes sont belges


La semaine dernière, j'étais à Bruxelles pour assister aux trois représentations de la lecture-spectacle (un peu comme une amorce d'un éventuel travail plus étoffé) de ma pièce Les Mains anonymes, présentées au Centre Wiels, sous la direction de Marie-Gaëlle Verspecht.

Ainsi donc, après l'avoir travaillé deux fois avec Erika Brisson (en novembre 2016 et en février 2018) et une fois avec Guylaine Rivard (en janvier 2023), c'est par une autre interprète - Raphaëlle Bruneau (dont vous pourrez voir ici quelques éléments biographiques) - que j'entendrais de nouveau mon texte! 

Étrange sensation que de s'asseoir, quidam anonyme, dans une salle, au milieu de parfaits inconnus (qui seront près de 200 au total), dans un autre milieu que le mien et de tout à coup voir s'incarner mes propres mots! Étrange distanciation entre quelque chose de plus que familier et de simultanément fort étranger! 

La comédienne accueille les spectateurs, dans un brouillard épais. Son texte en main. Derrière elle, sur le mur, se déploie une grande image numérique aux accents fantasy (qui laissera place, à un seul moment, à une citation tel que le montre la photo). Une petite musique en boucle résonne. 

Puis la lecture commence. 

Le jeu, bien maîtrisé, est rapide (en fait, c'était presque une version TGV... au point qu'à la fin de la première représentation ayant duré une trentaine de minutes, les spectateurs s'attendaient à une autre partie!), esquissant dès le départ une forte montée dramatique au cours des quatre premiers tableaux (sur huit). 

Et c'est là que le décalage se produit entre mon propre rythme d'écriture (et de mise en bouche) et celui de l'équipe de ce projet. Schématiquement parlant, la différence ressemble à ça (le graphique du haut étant mon arc narratif et celui du bas, le leur):

`
Le texte résonne alors différemment: ce qui pour moi est une partition d'introspections et de silences douloureux qui mène inéluctablement (en 60-75 minutes) vers le sommet, devient dès lors une matière énergique portée par une jalousie qui dévore le personnage pour être le moteur dramatique. Le personnage - Raphaëlle y plonge avec un solide engagement et une vivacité proche de l'hystérie - se répand en invectives puis en rage dévastatrice avant que d'assumer, d'une certaine façon, son geste et ses conséquences. 

Je regardais la prestation qui me renvoyait, de mon texte, un autre sens. Et c'était fort intéressant! Quelque peu déstabilisant! Avec une forte envie de voir cette ébauche surpasser l'obstacle concret du papier parce qu'une lecture, toute bonne soit-elle, reste une lecture qui retient le regard de l'acteur au lieu de le porter vers son destinataire! L'envie de voir se créer un véritable échange scénique avec la salle! 

Après, bien sûr, le metteur en scène n'est jamais bien loin avec ses questions et ses remarques! Mais ça, c'est entre moi et l'autre metteure en scène! :) 

mardi 6 février 2024

Syndrome de l'imposteur

L'un des plus grands défis, pour évoluer dans ce beau milieu culturel (et théâtral dans mon cas) est de surpasser ce syndrome de l'imposteur qui pointe régulièrement quand on s'y attend le moins. Ce sournois sentiment d'être à côté de la track. D'être là où d'autre pourrait l'être... et mieux. Ça peut même aller jusqu'à se voir comme un pis-aller. D'avoir des carences dans l'outillage et les connaissances au point de se reléguer soi-même quelques pas derrière pour regarder la parade. D'aller son chemin mais avec une appréhension constante. 

Ce syndrome je le vis, le subis plus souvent qu'à mon tour.

Que ce soit comme gestionnaire. (Oh, ça arrive!)

Que ce soit comme metteur en scène. (Oh, ça arrive!)

Que ce soit comme praticien presque autodidacte (enfin, non sorti d'une école de théâtre)... et en région, qui plus est. (Ça, c'est régulier!)

Que ce soit - comme ça l'était - comme chargé de cours. 

Plusieurs choses nourrissent ce syndrome: une estime personnelle plutôt fluctuante; des résultats mitigés de projets et/ou d'efforts (les pires étant ceux des demandes de subventions!); des situations extérieures qui pour banales n'en demeurent pas moins une source de remises en question; du jugement, des commentaires, des perceptions et des remarques propres à nourrir le doute parce que l'oeil de l'autre est une horrible machine (et c'est d'ailleurs à cause d'elle - et de ma nature sans sparkling dirait l'autre - que je suis incapable d'être comédien). 

Mais le pire, là où cette impression est la plus puissante, la plus glaçante, c'est comme auteur. Quand on me présente d'abord comme un auteur, je tique. Parce que je n'y crois pas. Je ne m'y crois pas. Oui je sais écrire. Oui je sais bien écrire. Mais je n'ai pas cette flamme créatrice. Je n'ai pas cette discipline et ce besoin essentiel d'écriture. Ça vient quand ça vient. 

L'an dernier était publié un recueil avec Les Mains anonymes et Empire... deux de mes plus récents textes, aux Éditions Somme toute. Malgré la fierté de voir mon nom accolé à une couverture de livre, l'insidieuse petite voix intérieure sait se faire experte dans la mise de bémols sur le pourquoi de cette publication au point d'en saper la conviction d'être méritoire. 

Et c'est encore pire quand, ayant quand même cru à la force de ce texte (Les Mains), j'ai osé ma chance au Centre d'Essai des Auteurs Dramatiques. Que si j'avais une clé pour y accéder, c'était peut-être celle-là étant donné sa construction, sa forte forme, son écriture... qualités, me semblait-il, trois fois expérimentées sur scène.

La première étape étant l'analyse par un comité de lecture composé de deux auteurs professionnels et d'un praticien. 

Pour faire bref, ma candidature n'a pas été retenue, tant pis. Je peux m'en remettre. Mais - parce qu'il y a ce mais qui appelle le chambardement - , cette réponse est arrivée avec les commentaires des trois jurés. La lecture de ceux-ci - plutôt convergents! - a été plutôt dévastatrice (entendre ici que ce fut plus un déferlement de considérations négatives qu'un chapelet de bons éléments): texte sans audace, forme lassante, riche vocabulaire mais vide et creux, sans audace, avec un personnage dont on ne sait rien, dont on ne saura rien, qui n'évolue pas, sans audace (parce que oui, c'est revenu bien souvent dans ces pages), qui ne permet pas un déploiement d'émotions, que c'est froid, etc.

Inutile de dire que l'auteur en moi s'est désagrégé! 

Le combat intérieur est reparti pour un tour pour pouvoir malgré tout profiter, à quelques heures d'un départ vers Bruxelles,  d'une lecture-spectacle (trois soirs) de ces mêmes Mains et alors que je m'apprête, dans quelques semaines, à présenter une création. 

Mes réserves de prétention s'amenuisent.

samedi 3 février 2024

Quand le théâtre, au Saguenay, se faisait en anglais

Au Saguenay-Lac-Saint-Jean, nous avons parfois cette idée d'une communauté fortement francophone. Du coup, le théâtre sur notre territoire s'est donc toujours fait en français, non? Eh bien non! Plus que non!

Il y a eu - Alcan et les machines à papier de Price obligent! - une population anglophone assez conséquente pour qu'il y ait quelques troupes de théâtre dans la langue de Shakespeare! 

Pendant presque 40 ans (de 1943 à 1981... quatre décennies! ce n'est pas rien!), Arvida fut le centre de cette activité dramatique. Avec le Arvida Amateur Dramatic Society... qui deviendrait le St-George's Player en 1949... puis le Arvida Players dans le courant des années '60. 

C'est là, pour les plus jeunes (et je m'inclus dans ce groupe encore malgré mes presque 50 ans!) un pan de notre petite histoire un peu oubliée et/ou ignorée... alors que nous nous rappelons volontiers des actions de Ghislain Bouchard à cette même époque avec le Théâtre du Coteau et, un peu plus tard, avec la Marmite!

En voici un historique publié le 17 juillet 1952 dans Le Lingot (le journal des employés de l'Alcan):


Autre article conséquent (et en français) du jeudi 4 novembre 1954:



Jusqu'au mercredi 2 septembre 1981 comme le rapporte le même journal:


Kénogami n'était pas en reste avec le Hobby Shop Players qui a sévi au moins entre 1954 et 1961 si je me fie aux archives trouvées...

Que sont ces comédiens et ces théâtres devenus?