mercredi 3 octobre 2012

De la liberté de la profusion


Thomas Ostermeier représente, pour moi, le metteur en scène contemporain par excellence... pour qui le répertoire ne cède en rien devant la création, pour qui le théâtral peut co-exister avec la performance, pour qui le théâtre se fait, oui... mais aussi, il se pense. Il y a, chez cet homme, toute une rigueur, une exigence de la scène. Paradoxalement, quand on le lit (ou que le lit par le biais d'entrevues et d'articles), demeure toute la dimension ludique de cet art.

J'aime bien aussi sa philosophie (par ailleurs, il faut dire que c'est un metteur en scène post-meyerholdien qui a tout pour m'attirer) comme cette réponse donnée à Sylvie Chalaye (tout l'entretien a été publié en 2006 chez Acte Sud-Papiers, dans la collection Mettre en scène) qui voulait avoir son avis sur le fait que certains metteurs en scène français oublient cette dimension ludique du théâtre...

Cela a un rapport avec le fait qu'un metteur en scène en France crée une seule production par an, et parfois beaucoup moins. Attendre un an et demi, deux ans, pour monter un spectacle n'autorise pas à l'erreur. Moi aussi j'ai beaucoup de doutes à propos des chemins dans lesquels je m'engage, je me pose la question de savoir si mes choix sont les bons, mais j'ai le grand avantage de faire par an trois mises en scène et parfois plus. Je peux expérimenter et quand, dans une mise en scène, j'ai choisi une direction radicale qui, en définitive, ne me satisfait pas complètement, je peux changer cette direction dans la mise en scène suivante. Quand on crée une fois par an, on est obligé de tout mettre, tous les soucis, toutes les peurs et tous les chemins, impossible de se tromper, il n'y a pas de place pour l'essai, l'exploration, et la pression est trop forte. Mais quand on a la possibilité de faire plusieurs créations par an, l'enjeu n'est plus le même et la liberté est plus grande.

Voilà une pensée que je trouve intéressante quand je m'y arrête et qui me semble contenir un fond de vérité qui devrait pouvoir se vérifier.