Monique Miller (Ciboulette) et Guy Godin (Tarzan), dans Zone, 1953.
Au début des années '50, alors que le Québec est sous le joug de Duplessis et qu'éclatent de violentes grèves, Gratien Gélinas est en plein possession de ses moyens. Son Tit-Coq le mène un peu partout au Canada... et même (avec plus ou moins de succès) aux États-Unis.
Un autre auteur imprimera bientôt sa marque sur cette époque: Marcel Dubé. Le triomphe de sa première pièce, Zone, en fera un auteur de premier plan (de veine réaliste, il va sans dire), jeune et avec une langue dynamique qui place ses personnages dans l'univers de l'adolescence qui rêvent d'un avenir meilleur que celui de leurs parents.
La famille, thème par excellence de la dramaturgie québécoise, en prend pour son rhume. Elle perd son unité et donnera des archétypes qui seront tenaces: le père complètement absorbé par son travail, la mère esclave de son quotidien, le fils marginal, la fille révoltée ou menacée.
À côté de ce théâtre réaliste, une autre veine plus avant-gardiste tente de se développer. Jacques Languirand amène sur les scènes, avec Les Grands départs et Les Insolites un théâtre où règne l'étrangeté alors que Claude Gauvreau fait éclater l'automatisme et la poésie langagière dans des pièces comme La Charge de l'orignal épormyable et Les Oranges sont vertes.
Les structures évoluent. Dès 1951, Les Compagnons de Saint-Laurent mettent un terme à leurs activités qui auront données, au théâtre québécois, de solides assises.
Quelques comédiens (Jean Gascon, Jean-Louis Roux, Eloi de Grandmont, Georges Groulx et Guy Hoffman), de retour de France, se réunissent en 1952 et fondent le Théâtre du Nouveau-Monde. En 1955, Paul Buissonneault crée le Théâtre de Quat'sous.
Et même l'État s'y met... si on peut dire... après avoir été complètement absent de cette histoire. Au cours de cette décennie, deux initiatives marqueront le début d'un soutien étatique.
En 1955, le gouvernement du Québec ouvre, à Montréal, la première section Art dramatique du Conservatoire de musique (fondé en 1948 par Wilfrid Pelletier). C'est la première reconnaissance d'un lieu de formation. En 1958 s'ouvrira une telle section au Conservatoire de Québec.
Enfin, en 1956, la fondation du Conseil des arts de la région métropolitaine amènera les premières subventions données aux compagnies.