dimanche 29 novembre 2020

Le théâtre comme un divertissement dangeureux

Je reviens régulièrement à ce sujet sans fin (qui s'est quand même fortement matérialisé dans notre petite histoire): la haine de l'Église pour le théâtre. Parce que ça explique, en bonne partie, l'évolution du théâtre au Québec. Parce que ça donne les raisons, les conséquences des choix qui ont été faits, des combats qui ont été menés, des différents obstacles qui ont été franchis.








C'est là le préambule d'un sermon publié en mars 1915 dans le feuillet La Bonne Parole (organe de la Fédération Nationale Saint-Jean-Baptiste), qui y va ensuite d'un long plaidoyer pour expliquer son point de vue (et dont je ne publierai ici que quelques extraits):




Et pendant ce temps, pendant ces péroraisons de toutes sortes, au début du vingtième siècle, que faisait le peuple? J'ai bien peur, pour les accusateurs du théâtre, qu'il se présentait en masse dans les salles!

samedi 28 novembre 2020

Le Grand Guignol : théâtre de la lessive!

 

Au Grand Guignol, l'acteur ne simule pas: il est entamé, décomposé, dans un autre état. S'il ne transpire pas forcément avec excès, il doit, par contre, se laver, laver ses vêtements toujours tachés de carmin et d'hémoglobine. Théâtre des humeurs, des liquides, le Grand-Guignol est aussi celui de la lessive... Tout se retrouve taché, dans l'histoire: le costume des comédiens comme le fauteuil du «bon» spectateur. En fait l'acteur du Grand Guignol prend des risques physiques: il peut développer des allergies à certains composants du sang, mélange de gouache vermillon, de glycérine, de sucre en poudre et d'eau, gelée de groseilles ou mixture secrète. Les instruments pointus qui peuvent être utilisés ne sont pas factices: ils risquent de blesser.

C'est là une autre belle description du Grand Guignol... par Agnès Pierron, spécialiste du genre. 

dimanche 22 novembre 2020

Comment réaliser l'implantation du théâtre au Saguenay... en 1962

Un des questionnements qui revient constamment, dans les articles sur le théâtre, au fil des ans, dans les décennies 50-60-70-80 et même 90, c'est la possibilité... ou non (et généralement, les gens penchent pour cette option)... d'établir et/ou de maintenir un théâtre professionnel dans la région.

Voici une lettre d'opinion publiée le 7 juin 1962 dans le Progrès du Saguenay. L'auteur y dresse le (pauvre) portrait théâtral du Saguenay et y va de quelques réflexions sur les éléments qui devraient soutenir une plus grande vitalité... amateure.


Il est toujours intéressant, de jeter un oeil sur ces considérations de l'époque... de les remettre en perspectives et de voir, finalement, tout le chemin parcouru depuis.

vendredi 20 novembre 2020

Quand Lactance s'emporte contre le théâtre...

Oh. 

Il y avait longtemps que je n'avais trouvé un aussi beau petit morceau de rhétorique anti-théâtre! C'est le fait, cette fois, de Lucius Caecilius Firmianu (sa page Wikipédia) dit Lactance, au IIIe siècle de notre ère, dans le septième livre de son Divinarum institutionum


Je ne sais pas aussi s’il y a corruption plus vicieuse que celle des Théâtres comiques, car les fables des Comédies parlent ou de la défloration des Vierges, ou des amours des garces; et plus ceux qui ont inventé ces forfaits sont éloquents; d’autant plus sont-ils persuasifs par l’élégance de leurs sentences: et les vers nombreux et ornés, se retiennent plus facilement en la mémoire des auditeurs. Davantage les Histoires tragiques mettent devant les yeux des parricides, et des incestes des méchants Rois, et démontrent leurs méchancetés relevées. Et les mouvements très impudiques des bateleurs, qu’enseignent-ils ou à quoi incitent-ils, sinon à des convoitises vilaines?

jeudi 19 novembre 2020

À l'intérieur du Grand-Guignol...

Petite virée Pinterest à l'intérieur du Grand Guignol... à l'intérieur du bâtiment (ancienne chapelle et ancien atelier de peintre), impasse Chaptal, à Paris et non pas à l'intérieur du répertoire!

C'est l'oeuf ou la poule: qui a donné naissance à l'autre...




Le Grand Guignol... théâtre des excès! Et voici, en ce sens, une description rapportée par Agniès Pierron dans la préface de l'ouvrage dont il est question depuis quelques billets, Le Grand Guignol - Théâtre des peurs de la Belle Époque (p. IX):

Si le Grand Guignol est un théâtre populaire, au plein sens du terme - les gens du quartier comme les habitués de la Comédie-Française le fréquentent -, il n'est pas grand public. Aller au Grand Guignol, c'est moins un acte social qu'un acte privé, même si la salle est divisée: orchestre, loges, baignoires; c'est une jouissance dont il s'agit; le spectateur préfère venir accompagné. Non pas pour se montrer «avec sa légitime», mais pour s'encanailler. Aussi certains spectateurs préfèrent-ils ne pas être vus. L'espace comble les uns et les autres, ceux qui se cachent et ceux qui se montrent: «Un escalier de bois d'un joli dessin conduit à la galerie - bizarrerie à la mode: il n'est pas chic d'y monter. Le public, fort sélect - monde et demi-monde -, préfère se presser aux fauteuils du rez-de-chaussée dont les bras sont de chêne...» Des témoins disent que les loges grillées au fond autorisaient un jusqu'au-boutisme dans la jouissance, surtout pendant les séances du lundi après-midi. Les femmes de ménage retrouvaient, témoignent-elles, des sièges maculés... Mais ne nous égarons pas (bien que le Grand Guignol, ce soit ça aussi) et disons que la salle avait une géographie codée; mystérieuse, elle est propice aux sensations fortes: «... elle est étrange, cette salle toute en longueur, avec ses murs tendus d'étoffes sombres, ses boiseries sévères, avec des deux portes mystérieuses et toujours fermées, qui sont de chaque côté de la scène, et ces deux anges inattendus qui, du haut du plafond, nous adressent leur énigmatique sourire.» Plus rien ne subsiste de tout cela; la rage de M. Lupovici [l'un des derniers propriétaires du théâtre, en 1963] contre les sièges maculés a eu raison de l'insolite du décor.

Ça donne le ton! 

mercredi 18 novembre 2020

Incident grandguignolesque

 


Pourquoi j'aime le Grand Guignol? Parce que c'est un théâtre de l'extrême, adepte des effets spéciaux... un théâtre qui cherche à effrayer mais qui, en même temps, flirte toujours - consciemment ou pas! - avec la caricature, le parodique. 

À preuve cette anecdote, rapportée par Agniès Pierron dans Le Grand Guignol - Théâtre des peurs de la Belle Époque (p.101): 

L'interprétation et la mise en scène ont joué un rôle déterminant dans le succès [de la pièce La dernière torture], faisant passer le texte du tragique le plus «empoignant» à l'hilarité la plus hystérique. Un exemple: au moment où les Boxers coupent les poignets de leurs prisonniers, l'un d'eux exhibe ses moignons en sang et hurle: «Ils m'ont coupé les mains! Ne vous laissez pas prendre vivants, je vous en supplie.» Cette scène qu'André de Lorde [surnommé le Prince de la terreur] avait voulue bouleversante ne le fut pas toujours. «L'homme aux poignets coupés utilisaient des morceaux bien rouge de mou de veau achetés à la triperie voisine, qu'il laissait dépasser des manches de sa capote militaire. Mais, un soir, le chat du théâtre, flairant la bonne odeur, entra en scène en miaulant de convoitise. Il se tailla aux dépens d'Harry Baur un joli succès personnel. Dès lors, le mou de veau disparut: des moignons de bois enveloppés d'un linge rougi à l'eau carminée firent tant bien que mal l'affaire.»

Petite note en terminant: du mou de veau (ou de porc ou d'agneau) c'est le petit nom poétique qu'on semble donner aux poumons. On me corrigera si je me trompe! 

mardi 17 novembre 2020

La bible du Grand Guignol

 

Je viens tout juste de recevoir ce bouquin... 

Il ne s'agit rien de moins que du plus gros recueil de pièces du Grand Guignol, publié en 1995 chez Laffont: 42 pièces d'épouvante, des photos et divers autres documents d'archives! Théâtre de l'horreur. Théâtre de l'angoisse. Théâtre du sang. Et tout ça, sous couvert d'une forte sensualité! Du théâtre spectaculaire (beaucoup plus que littéraire)! Un genre un peu méprisé. Un genre délaissé. Un genre oublié. 

Ce sera là un immense plaisir de lecture! 1435 pages de sensations! 

Et aussi, éventuellement, une belle matière à travailler! À venir... 

dimanche 8 novembre 2020

Au théâtre, cette semaine! [Du 8 au 14 novembre 2020]

 


Il n'y a rien de prévu, rien de prévisible à court terme dans ce monde théâtral (et culturel) qui se voit confiné à nouveau. 

Alors au lieu de poser ici les affiches des représentations à venir, voici une autre ghost light - la lumière laissée sur une scène entre deux représentations tant pour éclairer la scène dans un souci de sécurité que pour éloigner les esprits qui hanteraient les théâtre. En fait, il s'agit d'une chanson... qui m'intéresse moins que les fort belles images qu'elle présente.

Est-ce que je pratique cette tradition? Non. Mais je devrais car c'est la superstition théâtrale que je trouve le plus poétique.

dimanche 1 novembre 2020

Au théâtre, cette semaine! [Du 1er au 7 novembre 2020]

 


Un calendrier hebdomadaire plutôt simple à dresser: le milieu théâtral passe de nouveau en zone rouge et, du coup, j'imagine que la plupart des représentations sont annulées. 

À moins de faire erreur, la tournée du spectacle Bang! de Denis Bouchard qui devait se produire à Alma, à Dolbeau et au Saguenay passera à la trappe pandémique... tout comme l'accueil du Macbeth muet au Théâtre La Rubrique... 

Le monde de la scène va rallumer la ghost light dans l'attente de jours meilleurs...