dimanche 31 janvier 2021

Le cinéma menace-t-il le théâtre?

   

Cette question a été posée le 22 novembre 1931, dans le journal L'Autorité... Il faut dire que depuis toujours, on a l'habitude d'élever rapidement la stèle funéraire du théâtre sur le riche terreau des nouvelles technologies... que ce soit le phonographe, la radio, le cinéma, la télévision, le numérique. 



samedi 30 janvier 2021

Marie Dorval - Grandeur et Misère d'une actrice romantique


Marie Dorval (1798-1849) fait partie de ces grandes figures féminines qui régnèrent, à un temps ou un autre, sur le théâtre.

Elle est connue comme étant une des grandes actrices des théâtres du boulevard du Crime (et du coup, du mélodrame), partenaire idéale de Frédéric Lemaître. Puis elle se retrouve sur la scène de la Comédie-Française pour devenir l'égérie du drame romantique, étant de la création de grandes oeuvres d'Alfred de Vigny (dont elle est la maîtresse) et de Victor Hugo. 

Mais comme toute bonne histoire, sa passion pour le théâtre la fragilise... sa passion pour ses amours la blesse... sa passion pour ses enfant et son petit-fils malade la détruit. À la mort de ce dernier, elle sombre dans la folie. Elle finit complètement ruinée, quasi oubliée de la population, dans l'ombre de ses triomphes. Seule. 


Tous les auteurs qu'elle a joué, ses partenaires de scène, ont contribué financièrement à ses obsèques, sa sépulture, sa succession (pour ses enfants)... mais les tribulations continuèrent alors que la concession temporaire ne put être renouvelée et que cinq ans plus tard, sa dépouille dût être déplacée. 

Vraiment, un personnage tout aussi pathétique que fascinant. 


Si j'en parle un peu ce matin, c'est qu'étant compulsif sur l'achat de bouquins sur le théâtre, je viens tout récemment de recevoir cette biographie, parue en 1989. Ce sera donc une prochaine lecture qui s'annonce fort passionnante.

dimanche 24 janvier 2021

Le plaisir du mélodrame!

L'effet du mélodrame, Louis-Léopold Boilly, 1830

Ce weekend, je me suis (re)lancé dans la lecture compulsive de textes extraits d'un genre particulièrement aimé en cette première moitié du XIXe siècle: le mélodrame, règne de la douleur et de la misère, d'un pathos assumé et cliché. Orphelin-e-s, faillites, amours contrariées, trahisons, reniements, malédictions... dans ces pages, le destin n'a qu'un but: s'acharner sur le ou la pauvre protagoniste principal. Les situations, manichéennes sous un vernis plus souvent qu'autrement aristocratiques, sont rocambolesques.On y reçoit des révélations affreuses. On y meurt d'un évanouissement. On y découvre par hasard famille et fortune. On y accède enfin à une fin heureuse (même si parfois, c'est la Mort qui attend au détour) après avoir passé une heure de malheurs en malheurs! De quoi attaquer durement la santé mentale de quiconque... sauf au théâtre!

Les spectateurs y accourent pour s'émouvoir et s'épancher dans la pitié pour ces êtres et ces histoires finalement construits sur des canevas éprouvés et repris en de multiples variantes!

Ce sont là, en quelques sortes, les ancêtres des soaps et des téléfilms (notamment ceux de la collection Hallmark). Prévisibles. Truffés de bons sentiments. 

Mais ô combien amusants avec le recul!

Voici les quelques textes que j'ai lus:
  • Le Mont Sauvage ou Le solitaire de René-Charles Guilbert de Pixérécourt (l'un des dramaturges les plus populaires de son époque, considéré comme le père du genre, avec ses pièces jouées des milliers de fois - on avance même le chiffre difficile à croire de 30 000 - entre 1800 et 1830)
  • Edmond ou Imprudence et perfidie de Laurent
  • Saphira ou L'Épouse d'un jour de Philippe-Jacques de Laroche de Letoile
  • La morte vivante de Louis-Charles Caigniez
  • La fille coupable et repentante de E. Varez
En voici d'autres que je me promets de lire sous peu:
  • Nelly ou La fille bannie de Laqueyrie
  • La fille adoptive ou Les deux mères de Caigniez
  • L'honneur ou l'échafaud de Hubert Haddot
  • Jules ou Le toit paternel de Hubert Haddot... 
Il y a là une riche matière... avec des dizaines et des dizaines de dizaines d'oeuvres oubliées (parce que  oui, la valeur littéraire est quelque peu discutable et parce que le genre devient vite redondant), d'auteurs obscurs aujourd'hui qui ont pourtant ardemment brillé en leur temps. 

Il ne m'en faut guère plus pour que la machine à projets s'emballe! 

samedi 23 janvier 2021

Les avantages du radio-théâtre!

Les méthodes alternatives pour diffuser du théâtre n'ont pas que des inconvénients... comme en fait foi ce petit encadré paru dans la revue Le Samedi en ce 19 août 1922!


 

mercredi 20 janvier 2021

En route pour une nouvelle production.

Cet hiver, je suis le titulaire de la charge de cours 7THE505 à l'UQAC... soit le cours Création théâtrale (six crédits) où un metteur en scène fait une production avec les étudiants. Pour ma part, ils seront six. 

Et voici la proposition que j'ai faite et à partir de laquelle nous travaillerons:

Drôle d’époque que la nôtre. Les changements climatiques, la pandémie et sa radicalisation qui rejette la science, les problèmes mentaux, les soubresauts politiques, la violence partout… tout concourt à générer de l’angoisse, voire même, parfois, de la terreur. 

Dans le cadre de la création théâtrale, je compte mettre ces sentiments en parallèle avec un genre spécialisé du théâtre : le Grand-Guignol. Spécialisé parce qu’il cristallise l’angoisse de son époque (la fin du XIXe et le début du XXe siècle) et porte, en lui-même, les mêmes craintes que nous pouvons reconnaître : la peur des éléments de la nature, des savants, de la folie, des dirigeants, de la cruauté humaine. Il exploite délibérément toutes ces ficelles pour établir ses propres codes qui feront la part belle aux extrêmes et à la sensualité. 

Ce sera donc une plongée dans un répertoire quasi oublié, parfois méprisé dont l’unique objectif était de susciter des émotions fortes, de faire ressentir les effets de la peur! Un peu un ancêtre des films de séries B, rempli d’hémoglobine, d’effets spéciaux… 


Plus précisément, nous travaillerons sur un texte d'André de Lorde (une adaptation d'une nouvelle d'Edgar Allan Poe), Le système du docteur Goudron et du Professeur Plume, et sur un ou deux autres petits textes.

Et le contexte actuel? 

Le cours se donnera en personne - presque un luxe! -, dans ce laboratoire qu'est le Petit Théâtre. La distanciation est de mise. Et assumée comme outil de tension. La diffusion devra se faire en fonction du web. Et là se posera le véritable défi de ce projet. Comment surpasser la simple captation? Augmenter le potentiel de cette diffusion?

L'exploration sera de mise! Pourtant, quelques pistes sont déjà établies...

L’une des caractéristiques essentielles de ce type particulier de théâtre est de placer le spectateur sur le qui-vive, dans une position de voyeur, dans un jeu constant de dissimulation et de monstration... dans de fréquentes bascules de points de vue.

La création de cette année  jouera à fond sur ce point et intégrera, à la mise en scène, tout un jeu de caméras subjectives portées par les interprètes qui permettra à des spectateurs-webs, sur une plateforme à définir, d’avoir accès à tous ces points de vues, et de passer de l'un à l'autre au gré de leur intérêt. Si le contexte le permet, des spectateurs pourront être intégrés dans le lieu même.

Du coup, cette production se fera sur un mode éminemment immersif. 

Tel est le projet à venir! Rendez-vous à la fin d'avril! 

mardi 19 janvier 2021

L'essence du théâtre

Adrienne Lecouvreur de Scribe, Alexandre Taïrov, 1919

Dois-je dire qu'au théâtre l'essentiel c'est l'Acteur, que le théâtre a connu, dans son histoire, de longues périodes où il existait sans pièces, où il se passait de tout décor, mais qu'il n'y eut aucune époque où il fût sans acteur?

[...] S'il en est ainsi, si l'essence du théâtre réside dans l'acteur, il ne fait aucun doute que l'évolution du théâtre et sa situation se trouvent dépendre directement de celles de l'art de l'acteur à un moment donné et que les périodes d'essor et d'épanouissement de la maîtrise de l'acteur, les époques de déclin et de crise du premier, avec les époques de décadence de la seconde.

Tiré du bouquin Le théâtre libéré d'Alexandre Taïrov (p. 29), publié en 1974 aux Éditions L'Âge d'Homme - La Cité.

Taïrov n'est pas particulièrement cher à mon coeur... je n'adhère pas beaucoup à ses vues théâtrales... mais il reste qu'il dit quand même parfois des choses intéressantes!

lundi 18 janvier 2021

Quand une technologie en supplante une autre...

Ah, la technologie... Et à chaque fois, la technologie du jour (notamment la radio et le cinéma) est décriée comme une menace au théâtre. Et parfois, comme une ouverture à prendre... comme le fait ce petit article suivant, tiré de L'Avenir du Nord du 14 février 1936, qui voit, dans l'arrivée promise de la télévision, un potentiel de développement à ne pas rater! 



dimanche 17 janvier 2021

Les problèmes du théâtre à la radio

En cherchant dans les achives de BaNQ, hier, pour trouver des informations sur l'arrivée de la radio et de son apport au théâtre, je suis tombé sur cet article intéressant, paru le 27 juillet 1947 dans Le Droit, sous la plume de la grande Judith Jasmin. 

Il est intéressant parce qu'il dresse certains écueils que rencontre le théâtre en passant vers un autre médium (la radio, dans ce cas-ci) et les solutions envisagées. À chaque fois qu'une nouvelle technologie s'impose, le théâtre se questionne... 



samedi 16 janvier 2021

Du théâtre et de la distance...

Depuis quelques jours, sur les réseaux sociaux de gens de théâtre, circule cette citation de Romeo Castellucci, grand metteur en scène contemporain (déjà cité ici et ici), qui y va d'une charge contre le théâtre à distance:


Il est vrai que le théâtre est essentiellement un art de présence (acteurs et spectateurs) et d'échanges. Et il est vrai que ces éléments fondamentaux sont difficilement exportables vers un autre médium. 

Mais s'ils l'étaient?

Internet... le web... les médias sociaux et les différentes plateformes... ne sont-ils pas quand même à explorer? Les pistes actuelles, les essais (qui prennent malheureusement plus souvent qu'autrement la forme d'une simple captation diffusée) ne sont peut-être pas convaincants... mais il y a là, il me semble,  une voie à chercher, à construire. 

Pas pour la réinvention dont on nous rabat les oreilles depuis mars dernier. Pas pour plaire à des fonctionnaires qui n'ont que le numérique en tête et dans le discours. Pas pour succomber à un effet de mode. 

Mais parce que la technologie est là. Incontournable. Imparfaite, certes. Mais aussi immensément riche de possibilités. Alors pourquoi pas? Comment alors peut-elle être mise au service du théâtre? Comment le théâtre peut-il l'investir? Comment une nouvelle forme théâtrale peut-elle y germer, y croître, s'y développer?

Après tout, le théâtre n'est pas un dogme. Il n'est pas chose immuable.  Il est vivant. Il est polymorphe. Et il est surtout permis de le questionner, de le déployer autrement, de l'aborder sous différents aspects. Ne serait-ce que pour en tester les limites, les failles, les opportunités!

C'est ce qui le rend fascinant. Fort. C'est aussi ce qui en fait l'art interdisciplinaire par excellence!

C'est drôle parce que ces débats sur le théâtre et la distance n'est pas nouveau. Il a émergé avec l'arrivée de la radio. Du téléphone. Puis du cinéma. Puis de la télévision. Avec des réponses concluantes? Pas toujours. Loins s'en faut! Mais avec des nouvelles formes, de nouvelles propositions (radio-théâtre, télé-théâtre) qui ont fait date dans la petite histoire théâtrale. 

L'une des clés - et c'est le sujet de cet article paru dans La semaine de Radio-Canada du 6 juillet 1952 sur l'apport de la radio au théâtre... - reste l'ouverture...



mercredi 13 janvier 2021

Acquisitions de groupie!

Parmi les grandes artistes qui ont fait le théâtre, il y a bien sûr Sarah Bernhardt... puis La Duse,  Mademoiselle Mars, la Clairon, Adrienne Lecouvreur, Mademoiselle Georges, Mademoiselle Raucourt, Véra Kommiserjkaïa, Alissa Koonen... et tant et tant d'autres! 

Mais j'avoue avoir un faible particulier pour Rachel. De nombreux billets (ici) sur elle ont été rédigés sur ce blogue. Et je suis même allé sur sa tombe, au Père-Lachaise, il y a quelques années:


Au temps du drame romantique (et du mélodrame), elle a ramené avec force la grande tragédie qu'on avait un peu enterré à l'époque. Avec un ton nouveau, naturel. Une prestance monumentale mais simple. Le tout, avec un engagement artistique que rien ne surpassait... si ce n'est son avidité pour l'argent. Un être complexe, grugé par sa passion de la scène, sa famille, ses origines. Un être enflammé sur scène qui transcendait tout et s'imposait. Un être aussi excessif qui termine sa vie à 37 ans... Étoile filante du théâtre...

Je me suis commandé, récemment, ces deux bouquins:


Le premier, Rachel de Louis Barthou (1929) est une biographie en bonne et due forme. Assez intéressante à lire, mais quand même brève et sans grande documentation...

L'autre, La grande Rachel de L.-R. Dauven (numéro 39 de la collection La Vie amoureuse, 1957) l'est beaucoup moins. Il s'agit là d'une biographie sous forme de roman (et plus encore, de roman à l'eau de rose...) avec de nombreux détours par des personnages fictifs pour donner des détails (comme un enquêteur) sur l'actrice.

Mais ça n'enlève pas le plaisir de lire sur cette vie fabuleuse... 


dimanche 10 janvier 2021

Broue au Musée de la civilisation... en tour virtuel

Voici une autre exposition virtuelle (en fait, c'est plutôt un tour virtuel disponible ici), cette fois le fait du Musée de la civilisation qui présente, jusqu'au 15 août 2021 Broue. L'homme des tavernes. Il s'agit ni plus ni moins que d'un parcours dans les dédales de ce spectacle mythique au Québec, détenteur du record Guinness de la création la plus jouée sur un plus long temps avec la même distribution. 



samedi 9 janvier 2021

Entendre le théâtre

 


Voici une intéressante exposition virtuelle de BnF (Bibliothèque Nationale de France): Entendre le théâtre (qu'on peut suivre ici) qui présente de nombreux extraits sonores:


J'aime bien, ces expositions virtuelles! J'en ai déjà ciblé quelques autres, qui ont fait l'objet de billets sur ce blogue, ici et ici.


mercredi 6 janvier 2021

Théâtre contre cinéma

Théâtre contre cinéma. La bataille est dure... et ce, depuis l'apparition de ce dernier. (Il en fut de même , quelques années auparavant, avec l'arrivée de la radio...) Enterrera-t-il le théâtre? Le renforcera-t-il? Le transformera-t-il? 

Il n'a jamais été facile d'en tracer profitablement les effets. 

Le Progrès du Saguenay, en ce 30 décembre 1929, y va, sous la plume d'Émilien Beauchamp, de quelques considérations qui dépassent alors le contexte de grande crise qui secoue toute la société: