L'un des sujets fréquemment abordé sur ce blogue - depuis juillet 2007! - est la place, l'état et la fonction de l'espace critique dans le milieu théâtral (et culturel, bien entendu). De ce rôle majeur du retour sur une oeuvre qui se réduit de plus en plus en simple chronique culturelle... voire en simple évocation dans les diverses tribunes médiatiques. (À preuve, cette suite de billets.)
En relisant l'essai plus qu'intéressant de Catherine Voyer-Léger (Métier critique - pour une vitalité de la critique culturelle publié en 2014 chez Septentrion), je suis retombé sur cette description (pp.97-98) de ce que devrait être l'objectif de toute bonne critique:
[...] L'objectif de la critique - qu'elle soit journalistique ou universitaire, d'ailleurs - devrait être de dévoiler quelque chose, de mettre en lumière, d'ouvrir l'oeuvre pour la faire voir autrement, à défaut de pouvoir la faire comprendre. Mais mettre en lumière, c'est toujours laisser autre chose dans l'ombre. [...] Dans le même sens, l'écrivaine française Christine Montalbetti explique [dans son article Dans le jardins de son voisin publié dans le 672ième numéro de la revue Les temps modernes, janvier-mars 2013] que si l'oeuvre est comprise comme un iceberg, le critique peut très bien se contenter de ce qui est visible, «varapper ses parois» et mettre en lumière ce «qui est concerté». Mais elle ajoute: «Il est également capable, mystérieusement, d'endosser sa tenue de plongée et d'aller voir en dessous. Alors il attrape au bout de son harpon des thèmes qu'on a brassés sans les reconnaître, des hantises que dans le faisceau de sa lampe frontale il repère, des fantômes dont il devine la présence et qu'on a cru pouvoir ignorer.» Un tel travail de dévoilement peut être perçu comme une violence, surtout par l'artiste qui a oeuvré pour offrir quelque chose qui soit au moins un peu fini, fermé, complet. Mais ça peut aussi être constructif.
Pour espérer atteindre ces profondeurs, la critique culturelle exige du temps et de l'espace, histoire de remplir sa mission avec toutes les nuances qui s'imposent, temps et espace qu'on ne lui accorde plus vraiment. [...]
À l'époque de la lecture - et encore aujourd'hui - j'avais bien aimé cette image de l'oeuvre comme iceberg...