Je me plais, sur ce blogue, à illustrer les difficultés rencontrées par le théâtre (qu'elles soient d'ordre financières, logistiques ou - surtout! - morales) dans ses multiples tentatives d'implantation sur le territoire québécois. Une histoire bien compliquée... surtout quand les puissants dirigeants religieux s'élèvent contre cet art.
Dans un temps pas si lointain (la fin du XIXième siècle), un petit journal catholique, L'Écho du cabinet de lecture paroissial de Montréal (publié entre 1859 et 1874... et dont il a été question là), s'est évertué, par la plume de ses divers auteurs, à ramener les brebis égarées dans le droit chemin...
La prémisse de l'extrait est suivant (paru dans le numéro du 21 juin 1860) est le fait que beaucoup de gens, à l'époque, appellent à la création d'un grand théâtre dans la métropole:
Mais pourtant, direz-vous encore, il y a des théâtres, des comédies dans toutes les grandes villes du monde! Oui, il y en a; mais sachons-le bien, il y en a pour le malheur de la jeunesse qui s’y pervertit; il y en a pour le malheur des âmes innocentes qui s’y souillent, pour le malheur des faibles qui s’y laissent corrompre, pour le malheur de ces millions de libertins qui s’y enfoncent de plus en plu s dans l’infamie et l’ordure. Oui, il y a des théâtres, comme il y a des courtisanes pour le malheur des familles; comme il y a partout des voleurs et des fornicateurs. Il y a des théâtres dans les grandes villes; mais aussi qu’y voyez-vous dans ces villes? une impiété déplorable, une dépravation presque universelle: tels sont les fruits empoisonnés de cet arbre de mort.
Il y a des théâtres; mais il y a aussi des temples qui retentissent d’anathèmes contre eux; il y a des âmes justes et craignant Dieu qui gémissent en secret sur leur existence; il y a des orateurs chrétiens qui fulminent de justes anathèmes de la part de l’Eglise contre ces théâtres. [...] Ne soyons donc plus surpris d'entendre dans toutes les parties du monde catholique le même cri d'anathème et d'exécration contre les spectacles.
Un petit morceau de littérature bien intense avec une virulente rhétorique qui n'hésite pas à utiliser des images comme je les aime!