Si le metteur en scène a entre les mains l'une des extrémités du fil par lequel il tire l'acteur, l'acteur tient l'autre extrémité de ce même fil par lequel il tire le metteur en scène...
Et c'est précisément la raison pour laquelle j'affirme que le metteur en scène n'a pas le droit d'élaborer d'avance son plan dans les détails. C'est seulement lorsque j'arrive devant le collectif des acteurs [...] que peut naître la mise en scène. Bien entendu, je ne m'écarte jamais de ma conception générale. Mais je dois toujours être disponible pour l'initiative des acteurs, prêt à répondre à une contre-proposition comme aux échecs où l'on doit trouver la meilleure solution. Pour moi, l'initiative de l'acteur ne se manifeste pas quand il a dit sur scène «M. le metteur en scène, selon moi, il fut faire un pas à droite et non pas à gauche», mais dans la façon dont il perçoit ma proposition. Si je vois qu'il y réagit d'une façon hésitante, impuissante, cela signifie qu'il y a une erreur, soit dans ma suggestion qui n'est pas assez évidente pour cet acteur, ne le convainc pas et ne pénètre pas librement sa conscience, soit chez l'acteur lui-même qui ne fait pas assez d'efforts pour comprendre. Dans ce cas, mieux vaut abandonner le travail sur cette scène, y réfléchir et n'y revenir que quelques jours plus tard.
C'est là une conception toute meyerholdienne (toujours y revenir en production!) de la mise en scène et du lien entre le metteur en scène et ses interprètes... une conception qui me plaît bien et qui me semble être en phase avec ma propre façon de travailler...