lundi 28 février 2011

La Visite [Carnet de mise en scène]

Ce week-end, la salle Lionel-Villeneuve (où loge le Théâtre Mic Mac) a pris, selon toute vraisemblance (alors que j'étais plutôt en terre saguenéenne...), des allures de chantier alors qu'une équipe s'est attelée à la tâche de peindre le décor de La Visite selon la maquette proposée.

Voici donc une série de photographies (de Christian Roberge) qui montrent l'évolution du travail:

Sur la photo, on reconnaît quatre importantes collaboratrices (pour la plupart attitrées au costumes) de cette production: Lise Ouellet, Nicole Guillemette, Mélanie Tremblay et Lucie Guillemette

Évolution 1

Évolution 2

Évolution 3

Résultat final... enfin, en attendant les cadres de portes

Décor versus maquette

J'avoue avoir une hâte incommensurable d'y aller (dans une petite semaine) pour voir ce que ça donne en vrai, avec des acteurs en costumes sur cette scène qui ne représente aucune pièce en particulier, qui n'a aucune fonction mimétique mais plutôt une fonction dynamique incontournable (donnée notamment par la pente, la perspective, les portes, l'aire de jeu réduite).


La choralité, fondement plastique


S'il est un principe qui me plaît particulièrement au théâtre, c'est bien celui de choeur, de choralité, d'effet choral. Il est, à mon sens, l'un des plus théâtraux, des plus forts, scéniquement parlant.

La choralité, selon Christophe Triau (dans l'importante édition de la revue Alternatives théâtrales #76-77 sur la choralité) se veut fondement, socle. Il s'agit de partir de l'ensemble pour construire du jeu sur le plateau, et non de réinstaurer après coup de l'unité sur un plateau hiérarchisé et scindé. L'ensemble est premier, et est promis à diffraction - et il se nourrit d'elle.

J'aime bien l'idée de faire de ce principe une base et non pas un accident ou un simple effet. Ce n'est pas un déni de l'individu, loin s'en faut. La volonté d'ensemble se fait au contraire sur la reconnaissance de l'inaliénable des singularités [...]: tout l'enjeu de la choralité devient alors - et elle ne cesse de le raconter sur le plateau, de représenter cette tension - la construction du «commun» de cet «être ensemble» s'ancrant sur (et non pas contre) le singulier et les solitudes.


dimanche 27 février 2011

Un «Chantier naval» au Saguenay


Salle du Facteur Culturel, Jonquière. Il fait assez froid... La pièce qu'on y présente est Chantier Naval, un texte de Jean-Paul Quéinnec (dont l'écriture aqueuse mériterait une analyse en soi...), une production du théâtre Toujours à l'Horizon de Larochelle.

Un texte donc. Un texte et des comédiens... le décor n'ayant pas trouvé place dans les valises, économies de voyage obligent.

D'emblée le sujet ne résonne pas dans mon imaginaire. Depuis toujours ancré dans la région, Jeannois avant d'être Saguenéen, le chantier naval reste pour moi une abstraction, tout aussi gros soit-il. Et pourtant, on y trouve là un souffle, des constats sans fard qui pourraient se rapporter tout aussi bien au monde agricole qu'au monde forestier qu'au monde industriel tout d'aluminium et de papier: la fin d'un mode de vie, le naufrage des repères, la quête d'un nouveau monde...

Sur le chantier, la main-d'œuvre diminue au fur et à mesure des années. Une nuit, François, ses deux fils Claude et André, l'oncle Lili, décident de couler le navire qu'ils viennent de construire. Et de disparaître avec lui. Nine, la femme d'André qui sert les marins dans un des bars du port, les rejoint pour un dernier échange. Sous les regards des habitants de La Pallice, réunis par Guiguite la soeur de François, le bateau s'enfonce dans l'eau glacée. Les hommes coulent et les trois femmes: Nine, ma cousine, Guiguite, réveillent Jacques, le jeune frère; tous les quatre partent à 6000 kilomètres vers un pays tout blanc où ils réinventent leur vie*.

Une écriture dense, frénétique... française... telle une vague de mots qui submergent les interprètes qui s'y mesurent. Une écriture rapide et sans compromis qui construit une fable familiale légendaire par une suite de narrations le plus souvent monologiques. L'oreille doit s'y abandonner pour en goûter la richesse, l'absorber pour la saisir, surpasser les difficultés dues aux accents et aux expressions typiquement européennes pour en faire émerger le plaisir d'écouter ces voix lointaines. Une écriture exigeante.

Les différentes parties se succèdent sur un mode elliptique, au risque de surprendre et déboussoler le spectateur: sur les quais, dans la cale d'un navire, sur une mont pour assister au naufrage, sur un bateau... L'ensemble garde pourtant -malgré quelques longueurs- une certaine unité et une cohérence assez forte pour faire le lien entre la salle et la scène.

Le jeu est remarquable: un déploiement de rigueur et de précision accentuées, il va sans dire, par l'absence de décors et d'accessoires; des corps qui se tiennent et qui offrent une frontalité particulière où les regards sont fuyants; une mise en bouche efficace et dynamique. Soutenu par une bande sonore permanente, il prend parfois des allures de chorégraphies (comme le sommeil agité au sol, proche de la danse expression ou la nage synchronisée) et de numéros physiques (tel l'actrice renversée déclamant son texte) qui fragilisent peut-être l'équilibre du plateau en appelant d'autres types de niveaux de jeu que celui principalement utilisé, plus proche du statisme.

En somme, cette proposition esthétique (et scénique!) de Chantier naval fonctionne, malgré les contraintes matérielles, et possède le double mérite de faire découvrir une écriture et de faire réfléchir sur elle-même...
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* De nombreux liens peuvent être faits entre ce texte et Dragage: présence forte de l'eau, naufrage, émigration, nouveau monde.

Au théâtre, cette semaine! (Du 27 fév. au 5 mars 2011)


Assez calme pour cette semaine...

Aujourd'hui - 27 février 2011
Salle du Facteur Culturel (Jonq.), 14h

Dans le cadre de sa visite au Saguenay-Lac-Saint-Jean, la compagnie française de La Rochelle, le Théâtre toujours à l'Horizon présente, en collaboration avec Les Têtes Heureuses et la Chaire de théâtre sonore de l'UQAC, Chantier naval, une pièce de Jean-Paul Quéinnec. À La Pallice, un quartier de La Rochelle, vit une famille des chantiers navals. D’année en année, la main d’oeuvre diminue. Une nuit, François, ses deux fils Claude et André, et l’oncle Lili décident de couler le navire qu’ils viennent de construire et de disparaître avec lui. Le navire sombre sous les regards des habitants de La Pallice. Les hommes coulent. Trois femmes réveillent Jacques, le jeune frère, et partent avec lui à 6000 km, vers un pays tout blanc où ils réinventent leur vie.

Aujourd'hui - 27 février 2011
Salle Murdock (Chic.), 14h

Vicky Côté et Patrick Simard présentent le résultat de leur recherche et de leur exploration de la manipulation de marionnettes avec Recto-Verso. Un projet qui promet (voir mon article paru dans le Voir et celui du Quotidien)! Des marionnettes, des manipulateurs... Quand l'un est l'envers de l'autre...

Lundi - 28 février 2011
Bar à Pitons (Chic.), 20h
les Têtes Heureuses proposent, dans le cadre du passage de la troupe de Larochelle Toujours à L'Horizon, Le théâtre en train de s'écrire, une lecture publique de dramaturges actuels, européens et québécois, par des acteurs français et québécois... Dernière occasion de rencontrer les Français!

Jeudi à samedi - 3 au 5 mars 2011
Salle Murdock (Chic.), 20h
(et dimanche, 6 mars 2011, 14h)
DERNIÈRE CHANCE!

Seconde et dernière semaine de représentation de Recto-Verso, de Vicky Côté et Patrick Simard. (Voir plus haut pour un peu plus de détails).

C'est tout, je crois.

samedi 26 février 2011

Un petit bébé...


Cette semaine, le couple formé des comédiens Marie-Noëlle Lapointe et Pierre Tremblay (le Grossomodo des Clowns Noirs) s'est vu augmenté d'une nouvelle petite fille, Romane. Félicitations à eux!!!

Entre son silence et son chemin...


Ai assisté à l'une des représentations du projet de fin de bacc. de William Gagnon, Silence Majuscule, d'après L'Innommable de Samuel Beckett. Malgré un début un peu confondant (où les spectateurs sont entrés trop vite dans la salle), ce fut la rencontre d'une proposition forte et esthétiquement intéressante.

Après un moment passé dans l'entre-deux salle tapis de feuilles mortes, d'échelles et de ventilateurs, avec un texte en sourdine, le spectateur est invité (enfin...) à entrer dans la salle (le Studio-théâtre) au milieu de laquelle git un amoncellement de chaise. Le noir y règne... si ce n'est de ces éclats bleuâtres des lampes au plafond. Un spectacle sur le silence? Au loin, un écho, une voix. Une voix fluide, sans pause, un monolithe de mots énergiques et hypnotisant. Qui parle? À qui? Pourquoi? Quand? Et les mots continuent, questionnant les réponses qui elles-même questionnent les questions. Une tautologie qui trouve sa source dans le comédien, juché dans un coin, immobile et quasi invisible. Inamovible. Un texte qui frappe pas tant par son discours qui est ressenti par l'auditeur plus qu'il n'est compris que par son flux continuel. Un exercice exigeant de mémorisation et de rendu qui trouve là un bel aboutissement. Gagnon était secondé par Anick Martel à la mise en scène et Luis Ortegal Gil au son.
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Puis, la soirée ne s'arrêtant pas là, j'ai aussi profité de l'occasion pour voir le projet (toujours de fin de bacc.) de Gabrielle Noumeir-Gagnon, Je fais mon chemin. Une autobiographie scénique d'une quarantaine de minutes.

Du coup, le projet est un peu délicat... Devant celui-ci (et tous les autres du même genre), une question se pose: où s'en va-t-on exactement? Confidences, thérapies?

Sur un trame sonore qui ne cessera pas tout au long du spectacle - trame sonore qui relie ensemble, avec un réel intérêt, le conte du vilain petit canard, des articles du code civil, des définitions, des énumérations, des poèmes, des textes personnels et des «entrevues» - Noumeir-Gagnon s'isole dans un espace clos par un grand tulle noire au centre duquel elle agit. Elle illustre, entreprend un dialogue muet avec sa propre voix qui résonne dans les hauts-parleurs, se balance sur une longue corde qui traverse l'espace à la verticale. Scéniquement, la proposition (qui passe du théâtral au documentaire à l'interpellation du public) n'arrive cependant pas à soutenir représentation. Un manque se fait sentir. Dans ce cadre choisi par la créatrice, l'absence de metteur en scène permanent devient le principal problème... L'intime est un sujet si vaste qu'on peut facilement s'y perdre. N'empêche qu'il y a eu tout de même de belles images, de beaux moments qu'on aurait toutefois aimé voir durer.


vendredi 25 février 2011

De la difficulté de l'abnégation


Je viens de trouver, dans le numéro 52/54 d'Alternatives théâtrales (décembre 96) une bonne phrase pour illustrer l'importance de l'esprit d'équipe, du travail en étroite collaboration entre les comédiens sur scène:

Ce n'est pas à toi à jouer le roi,
c'est à ton partenaire à te faire roi!

Ces quelques mots - qui dénotent une véritable philosophie du jeu - sont de Thierry Debroux, un comédien, dramaturge et metteur en scène belge.

En effet, c'est parfois très difficile de faire sortir les interprètes de leur ego pour s'ouvrir à l'autre, de leur faire comprendre l'importance de jouer d'abord pour son partenaire, de lui fournir, en quelques sortes, un miroir... voire un piédestal (soit le mettre en valeur sans adulation...). Mais trop souvent, il reste centré sur lui-même en quête d'un personnage qui le mettra en avant-plan au détriment de l'ensemble...

jeudi 24 février 2011

Et d'une autre première!


Pour Vicky Côté et Patrick Simard
de même que pour tous leurs collaborateurs
Émilie Gilbert-Gagnon, Laurence Lemieux, Janine Fortin et Isabeau Côté
qui feront se lever, ce soir, le rideau sur Recto-Verso,

MERDE!!!

Constat


Si on croit encore à l'utopie d'un État démocratique, d'un État bourgeois, d'une société égalitaire, il faut l'utopie d'un groupe de personnes, de magiciens, qui sont payés par la bourgeoisie pour qu'ils lui présentent un miroir d'elle-même et pour que les magiciens puissent poser la question du mensonge, des difficultés, des catastrophes, des structures de la société dans laquelle on vit. Si on partage un certain cynisme, très matérialiste, que l'on voit un peu partout aujourd'hui, on peut dire que le théâtre comme expérience des «lumières», ça n'existe plus.

Ces mots sont de Thomas Ostermeir, un jeune (il a 42 ans) metteur en scène qui fait sensation (et qui fait partie des grands artistes de l'avant-garde contemporaine) depuis une quizaine d'année, en Allemagne principalement et dans le monde en général. À trente ans, il a été invité à rejoindre le groupe de direction artistique de la Schaubühne de Berlin. Ces mots, dis-je, sont donc d'Ostermeier et sont tirés d'un article, Pertinence et possibilités socio-politiques du théâtre, paru en 2004 dans le quatre-vingt-deuxième numéro d'Alternatives théâtrales.

mercredi 23 février 2011

La Visite [Carnet de mise en scène]


En farfouillant dans mes bouquins à la recherche d'un sujet potentiellement intéressant, je suis tombé sur une définition (dans le Dictionnaire encyclopédique du théâtre de Michel Corvin) qui pourrait fort bien s'appliquer à la pièce La Visite ou surtout sentez-vous pas obligés de venir! de Michel-Marc Bouchard.

COMÉDIE À TIROIRS: Dans ce type de pièce, le personnage principal se trouve généralement entraîné dans une série de courtes scènes qui sont juxtaposées sans autre souci que de donner à voir une galerie de portraits ou de broder des variations autour d'un thème. [Il me semble que c'est exactement ce qui se passe dans cette pièce...] On rencontre cette construction dans Les Fâcheux (1661) de Molière, Le Mercure galant (1683) de Boursault, Les Originaux (1737) de Fagan. Au XIXième siècle, la comédie à tiroirs tourne souvent au numéro d'acteur: Samson faisant admirer son jeu et celui de Provost dans La Famille Poisson (1845) qu'il écrit lui-même; dans Le Misanthrope et l'Auvergnat (1852) de Labiche. (J.-M. Thomasseau)

mardi 22 février 2011

Les Français débarquent!


Décidément, l'époque s'y prête!

Alors que les Têtes Heureuses et la Chaire en dramaturgie sonore de l'UQAC reçoivent le Théâtre Toujours à l'horizon de Larochelle pour quelques jours (toute la semaine, il y aura des activités rattachées à cette visite), une autre compagnie française est arrivée hier soir par le Parc et sillonnera nos routes au même moment pour donner, si j'ai bien compris, des représentations scolaires. Il s'agit du Théâtre du Versant (Biarritz). Leur site est ici.

Dans quelques semaines (en juillet disons), ce sera, comme je l'ai indiqué ici la semaine dernière, au tour du Théâtre Mic Mac de recevoir la troupe D'un théâtre à l'autre d'Orsay.

La Visite [Carnet de mise en scène]

En lieu et place de théories ou d'opinions, voici quelques photographies (en plein chantier!) de la première partie prises par Christian Roberge au cours de la dernière fin de semaine de répétition, dans un décor encore en construction. (Bon. Les images ne sont que pour donner une idée de ce qu'il advient de ce spectacle... même si elles ne donnent pas une juste valeur de l'articulation de ces scènes rocambolesques!)

Le décor brut... avant la transformation théâtrale!

Le repas avec la belle-mère...

Les amies...

La famille...

Le party de famille...

C'était là la dernière fin de semaine avec l'équipe complète... avant celle du 26 et 27 mars... soit quelques jours avant la première!!! Qu'importe. Nous avons placé la dernière partie (l'acte III, en quelques sortes) de cette pièce... pour une représentation qui approchera (les deux heures. Encore six jours à venir!!!

Il y a de très belles scènes et d'autres qui le sont un peu moins. Le rythme s'impose de plus en plus et le fait d'avoir une vue d'ensemble - et de l'articulation du spectacle, et des enjeux, et de l'évolution des personnages - donne soudainement un recul bénéfique pour reprendre des parties complètes avec un nouveau point de vue.

Les enchaînements du week end - il y en a eu deux - ont rempli aussi un rôle essentiel: rassurer l'équipe sur le temps dont les comédiens disposent pour les changements de costumes, pour l'effort qu'ils doivent fournir. Le projet s'éclaircit tout à coup et montre les points à prendre en compte pour la suite des choses:

- comme par exemple, le bruit des pas en coulisse et sur scène qui résonnent sur le plancher de bois;

- comme par exemple, la rigueur et la précision qui doivent être appliquées tout au cours du spectacle;

- comme par exemple, l'équilibre du plateau qui a parfois de la difficulté à se faire;

- comme par exemple, l'ouverture à l'autre qui fait parfois défaut alors que les comédiens sont trop concentrées sur leur personnage et beaucoup moins sur l'ensemble;

- enfin, et c'est peut-être là le plus important de ce que peut nous apprendre l'exercice, il devient évident pour tous que la comédie ne réside pas dans la facilité et la farce individuelle (ce n'est pas un show d'humour) mais dans la rigueur, la précision et la virtuosité de tout un ensemble qui s'écoute et qui pousse dans le même sens.






lundi 21 février 2011

«La complainte du critique solitaire» (D. Côté)


Voici des extraits de l'éditorial de Daniel Côté, journaliste culturel de son état, paru dans la dernière édition du Progrès-Dimanche (soit celui d'hier). Je le place ici, bien qu'il s'éloigne un peu du cadre strictement théâtre, parce qu'il s'agit là d'une réponse notamment à Joël Martel du Voir (suite à cette chronique) - que j'ai, moi aussi, pourfendu (enfin...) dans un billet du 10 février dernier - et d'une réponse à diverses critiques venues du milieu même (que j'ai partagé abondamment sur ce blogue, depuis 2007). Point de vue, donc, de l'autre côté de la médaille:

La complainte du critique solitaire

[...] Après avoir constaté à quel point certains artistes se montrent susceptibles, même lorsque les reproches adressés par la critique sont noyés dans un océan de compliments, Joël Martel a déploré la timidité de la presse locale. Lorsqu'elle aborde les œuvres conçues par des gens d'ici, «l'empathie l'emporte sur la franchise», énonce-t-il.

Ce n'est pas la première fois que de tels commentaires sont émis. Il y a quelques années, des propos de même nature avaient été tenus à la radio de Radio-Canada. C'est comme le monstre du Loch Ness. Ce thème réapparaît de loin en loin, mais à chaque fois, on reste dans le flou. On laisse entendre que des journalistes manquent de courage, mais sans élaborer. [...]

[...] Je veux bien qu'on critique les critiques, y compris celles qui émanent de nos publications, mais je préférerais voir d'autres journaux, d'autres stations, sortir de leur zone de confort. Le cas échéant, je serai le premier à me réjouir si les points de vue divergent. Ce sera plus intéressant que des communiqués de presse déguisés en nouvelles.

À propos du contenu, par ailleurs, j'ai pour principe que mon patron est le lecteur. Pas l'artiste, ni les collègues. Quand j'assiste à un spectacle, je veux rendre compte de ce qui s'est passé, tout en livrant quelques considérations dont l'unique mérite est de refléter mon opinion.

Je le fais en misant sur mon expérience en tant que journaliste, ce qui ne m'apparaît pas comme une tare. Je ne suis ni musicien, ni comédien, et je m'en contrefiche. Si quelqu'un veut savoir si la soprano a raté une note au milieu de son récital, j'ai envie de répondre: «Get a life».
[...]

[...] Une autre précision que je crois utile d'apporter concerne mon approche des spectacles. À cet égard, mes goûts n'ont aucune importance. Je cherche à déterminer si les gens qui apprécient l'artiste ont été payés de retour. [...]

[...] Quant aux créateurs de la région, je leur trouve bien du mérite à persister comme ils le font, mais ce n'est pas une raison suffisante pour inciter les lecteurs à assister à leurs productions. Il faut que ça justifie le déplacement, ce qui, je dois le dire, est généralement le cas. Ils n'ont pas besoin qu'un journaliste leur fasse l'aumône d'une critique complaisante.

Je trouvais important, dans ce perpétuel débat sur la critique (critique en général), de donner cette vision... Vision que je respecte bien que je ne la partage pas entièrement...


dimanche 20 février 2011

Au théâtre, cette semaine! (du 20 au 26 février 2011)


Dernière semaine complète de février... déjà... et encore une fois, les activités théâtrales sont nombreuses:

Lundi et mardi - 21 et 22 février 2011
Salle Pierrette-Gaudreault (Jonq.),
lundi pm, mardi am et pm


La Rubrique reçoit le Théâtre Bluff et sa production S'embrasent, en représentations scolaires seulement. Dans la cour d'école, Jonathan embrasse Latifa. C'est un coup de foudre qui bouleverse les témoins de la scène – les filles, les garçons, les profs et même le directeur – une passion qui, telle une éclipse observée à l'œil nu, les éblouit et brûle leurs regards. Au croisement du clip et de l'oratorio, cette partition lumineuse mêle audacieusement poésie, danse et musique, pour venir raviver en chacun de nous la flamme et l'émoi du premier amour.

Mardi - 22 février 2011
Café Cambio (Chicoutimi), 17h

Les Têtes Heureuses et la Chaire en dramaturgie sonore de l'UQAC vous invitent tout particulièrement à un apéritif (5 à 7) qui aura lieu au Café Cambio, le mardi 22 février . Ce sera l'occasion pour tout le milieu théâtral de rencontrer, dans un cadre amical, le Théâtre Toujours à l'Horizon, compagnie de Larochelle de passage au Saguenay, et d'échanger avec eux de nos diverses pratiques.

Merc. à vend. - 23 au 25 février 2011
Studio-théâtre (UQAC), 19h

C'est au tour de William Gagnon de présenter son projet de fin de bacc. (dans le cadre du Festival des finissants en arts de l'UQAC 2011), Silence majuscule. Où maintenant ? Quand maintenant ? Qui maintenant ? Sans me le demander. Dire je. Sans le penser. Appeler ça des questions, des hypothèses. Aller de l'avant, appeler ça aller, appeler ça de l'avant. - Samuel Beckett, L'Innommable. Si j'ai bien compris, il s'agit d'un collage à partir de textes de Beckett.

Jeudi - 24 février 2011
Centre d'estampe Sagamie (Alma), 17h

Dans le cadre de son passage au Saguenay (voir 22, 25,26,27 février 2011), la compagnie Toujours à l'Horizon présentera, en avant première, des extraits de la pièce Chantier Naval de Jean-Paul Quéinnec qui sera présentée dans les jours suivants.

Jeudi à samedi - 24 au 26 février 2011
Petit Théâtre (UQAC), 20h

Toujours dans le cadre du Festival des finissants en arts de l'UQAC 2011 (et pour clore la série de représentations en théâtre), c'est au tour de Gabrielle Noumeir-Gagnon de faire son tour de piste avec Je fais mon chemin, sa propre création théâtrale. Vous êtes-vous déjà imaginés entrer dans la tête de quelqu’un et voir sa vie à travers ses yeux? Ce spectacle vous incite à entendre et à voir le parcours cahoteux d’un personnage en quête de sa propre vie.

Jeudi au samedi - 24 au 26 février 2011
Salle Murdock (Chicoutimi), 20h
(et dimanche, 27 février 2011, 14)
PREMIÈRE SEMAINE

Vicky Côté et Patrick Simard présentent le résultat de leur recherche et de leur exploration de la manipulation de marionnettes avec Recto-Verso. Un projet qui promet! Des marionnettes, des manipulateurs... Quand l'un est l'envers de l'autre...

Vendredi et samedi - 25 et 26 février 2011
Salle du Facteur Culturel (Jonq.), 20h
(Dimanche, 27 février 2011, 14h)

Dans le cadre de sa visite au Saguenay-Lac-Saint-Jean, la compagnie française de La Rochelle, le Théâtre toujours à l'Horizon présente, en collaboration avec Les Têtes Heureuses et la Chaire de théâtre sonore de l'UQAC, Chantier naval, une pièce de Jean-Paul Quéinnec, à la salle Le facteur culturel du Mont-Jacob, les 25 et 26 février, à 20h, et le dimanche 27 février, à 14h. À La Pallice, un quartier de La Rochelle, vit une famille des chantiers navals. D’année en année, la main d’oeuvre diminue. Une nuit, François, ses deux fils Claude et André, et l’oncle Lili décident de couler le navire qu’ils viennent de construire et de disparaître avec lui. Le navire sombre sous les regards des habitants de La Pallice. Les hommes coulent. Trois femmes réveillent Jacques, le jeune frère, et partent avec lui à 6000 km, vers un pays tout blanc où ils réinventent leur vie. C’est la première fois qu’on aura l’occasion de voir au Québec une pièce du dramaturge français Jean-Paul Quéinnec, maintenant installé à Chicoutimi, professeur de théâtre à l’UQAC et titulaire d’une chaire de recherche en dramaturgie sonore. Plusieurs des textes de Jean-Paul Quéinnec ont été publiés et montés en France. Ce spectacle nous permettra d’entendre une voix absolument contemporaine, encore obsédée, dirait-on, par les vieilles chansons de marins et poussée vers nous. (réf.: communiqué des Têtes Heureuses)

Comme dirait l'autre, bonne semaine!


samedi 19 février 2011

La Visite [Carnet de mise en scène]


Je remets une photographie (de moi) de la maquette du décor de La Visite... parce qu'enfin, en cette cinquième fin de semaine de répétition, nous répéterons dans un espace fermé par ces murs percés.

Depuis le début de l'aventure, nous avons déjà le plancher incliné (assez petit, d'ailleurs... avec, à l'avant, seize pieds de large; à l'arrière, 10 pieds... et douze pieds de profondeur)... mais placé sur la scène ouverte. Je me répète mais tant pis... Le nombre d'entrées et de sorties effarantes de cette production plaçaient donc constamment des acteurs en attente tout autour. Le focus scénique devenait, du coup, plus difficile à atteindre.

Maintenant, ce sera chose du passé. Le huis-clos provoqué par l'apparition des murs, l'impression d'enfermement, d'écrasement, ne pourra qu'être bénéfique dans l'évolution de ce spectacle. Les ajustements seront beaucoup plus efficaces.

Nous profitons également de ce week end pour faire le traditionnel souper de production, événement destiné essentiellement à réunir l'équipe sous d'autres augures...

jeudi 17 février 2011

Le texte spectaculaire


Petite notion fort intéressante sur le texte théâtral (et plus encore, sur ce qui serait de mise d'appeler le texte spectaculaire) tiré d'un article écrit par Josette Féral, critique, théoricienne et professeur à l'École supérieure de théâtre de l'Université du Québec à Montréal (Le texte spectaculaire: la scène et son texte) et paru dans la revue Degrés, numéros 97, 98 et 99. Notion un peu complexe qui ouvre cependant de nombreuses pistes de réflexion.

Eugenio Barba, rappelle, pour commencer, que le mot «texte» avant de désigner le texte parlé ou écrit, imprimé ou manuscrit, signifiait «tissage». [...]

Reprenant la définition apportée par Barba, Franco Ruffini propose, pour faire avancer la question, une distinction qui paraît intéressante et qui scinde le texte en deux composantes: le «texte du texte» et la «scène du texte». [...]

Le texte du texte, dit F. Ruffini, est «l'élément rigide, orienté, programmé. C'est le conflit et la fable»; il aurait pour caractéristique l'enchaînement des événements, une certaine prévisibilité voulue par le texte d'origine donc une certaine rigidité des actions. Les rapports d'enchaînement d'une pièce seraient repérables prioritairement par le déroulement de l'intrigue. [...]

Il n'en est pas de même pour la «scène du texte» qui est représentée «par le personnage et tout ce qui le concerne (répliques, micro-situations), au-delà, en marge de la «direction» imposée par le conflit et par la fable». La scène du texte aurait pour caractéristique la simultanéité et une certaine imprévisibilité laissant libre cours au metteur en scène et à l'acteur. Ce serait «l'élément souple, non orienté, non programmable» du spectacle. [...]

Il y aurait donc dualité dans le personnage. Une partie de son fonctionnement relèverait du «texte du texte» et l'autre de la «scène du texte» (les deux composant le texte spectaculaire); une partie serait donc prévisible et une partie ne le serait pas. C'est dans cette imprévisibilité qui appartient au personnage que se glisse l'acteur. C'est cette imprévisibilité qui permet précisément «l'interprétation» que tel acteur fait de tel personnage. C'est cette même imprévisibilité qui ménage un espace entre la narration et l'action où se glisse la vision d'un metteur en scène et la créativité de l'acteur face au rôle qu'il doit incarner.


À quelques temps de commencer mes véritables recherches doctorales, cet article redonne un certain élan au fouillis théorique qui m'habite.

mercredi 16 février 2011

Regret

Alors que je suis à Québec depuis lundi, j'aurai manqué toutes les représentations du Contre Cabaret de Contrecoeur... Dommage. Vivement une reprise!!!

Du plaisir.

Vsevolod Emilievitch Meyerhold peint par Alexandre Golovin

Petit cours de mise en scène ce matin... Une autre de ces moments meyerholdiens qu'il me fait bon lire de temps en temps parce qu'il me ramène toujours vers quelque chose d'essentiel: le plaisir comme base théâtrale...

Cette fois, c'est tiré du quatrième tome de ses Écrits sur le théâtre, paru en 1992 aux Éditions de l'Âge d'Homme (Lausanne).

L'acteur ne peut improviser que quand il se sent intérieurement joyeux. En dehors d'une atmosphère de joie créatrice, de jubilation artistique, l'acteur ne se découvre jamais dans toute sa plénitude. Voilà pourquoi en répétitions, je crie souvent aux acteurs: «C'est bien!» Ce n'est pas encore bien, pas du tout bien, mais l'acteur entend votre «C'est bien!» - tu regardes, et voilà qu'il a vraiment bien joué. Il faut travailler dans la joie et la gaîté! Quand je suis en répétitions irritable et méchant (ça arrive), je m'invective cruellement, de retour chez moi, et je le regrette. L'irritabilité du metteur en scène paralyse instantanément l'acteur, elle est inadmissible, tout comme un silence dédaigneux. Si vous ne sentez pas le regard des acteurs, rempli d'attente, vous n'êtes pas un metteur en scène!

Voilà.

mardi 15 février 2011

D'horaires en horaires


À chaque année, à chaque saison, à chaque projet, quand vient le moment de faire des horaires de répétitions, l'adrénaline monte et l'exaspération aussi... aussitôt réprimé par une bonne connaissance du milieu et de son fonctionnement anémique qui force l'adoucissement... mais tout de même...

Cet exercice obligé se transforme toujours en une vaine tentative de résoudre la quadrature du cercle. Dans un milieu comme le nôtre où les comédiens ne peuvent se consacrer qu'à leur travail, il faut concilier famille, cours, rendez-vous, boulot, engagements... tout en essayant de s'en tenir à un principe parfois utopique: préserver la qualité de vie des participants, la qualité des efforts à fournir en aménageant un horaire qui permettra de respirer tout en évoluant de belle façon...

Parce que nous n'avons pas les moyens de nos ambitions...

On y arrive toujours... mais souvent, les détours auront été sinueux et les compromis nombreux...
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L'autre côté de la médaille est beaucoup plus noir et plus agressant... soit lorsque les horaires sont faits et que soudain, des demandes affluent de toutes parts (pour les imprévus) et obligent à rejouer dans ce puzzle rébarbatif... car entre le moment où les comédiens l'ont reçu et ce jour-là, chacun a comblé les trous de son horaire qui pour la famille, qui pour un cours, qui pour un rendez-vous, qui pour un boulot, qui pour un nouvel engagement...

Dien m'en garde cette année!


lundi 14 février 2011

Rentrée parlementaire... une semaine en retard!

Oups... je l'ai échappée, elle! Voici la caricature aux élans théâtraux faite par Garnotte (caricaturiste au Devoir), datée du 9 février 2011, jour de rentrée parlementaire au Québec:


Du théâtre ou du cirque? La question se pose parfois devant le cynique (et sinistre) spectacle de la période de question...

Le Mic Mac se promène...


Les nouvelles sont bonnes en provenance du Théâtre Mic Mac (voir leur site ici) qui aura la chance de remettre, dans les mois à venir, sa production de l'an dernier, La Défonce de Pascal Chevarie, sur la route...

En effet... en septembre prochain (du 8 au 14), la troupe (et le spectacle!) a été sélectionnée pour représenter le Québec lors du Festival International de Théâtre de Mont-Laurier (voir ici)... pour se mesurer à une vingtaine de troupes d'autant de pays! À moins d'avis contraire, la représentation aura lieu le 9.

Par la suite, du 6 au 13 novembre de la même année, la troupe a été invitée à faire un échange avec la troupe D'un Théâtre à l'Autre, à Orsay, en France. Cette dernière viendra d'ailleurs présenter Les Précieuses Ridicules de Molière dans le cadre de la Traversée du Lac Saint-Jean cet été (le 26 juillet pour être plus précis). Un petit voyage en sol européen... mon premier dans un cadre de travail!

Il va s'en dire qu'avant d'entreprendre ces sorties, une petite virée saguenéenne (au tout début de l'automne) s'impose afin de s'assurer de la bonne marche du spectacle en tournée... et de valider les ajustements apportés - notamment en ce qui a trait au décor qui doit se simplifier (passer de 8 à 6 panneaux) sans perdre son intérêt...

Ainsi donc, dès le début de l'été qui vient (étrange de dire cela au cœur d'une tempête!), le spectacle sera remis sur le chantier des répétitions...

Bel automne en perspective!

La Visite [Carnet de mise en scène]


Nous avons terminé la première moitié des répétitions de La Visite... soit les 8 premiers jours intensifs: le second tableau (enfin, l'acte 2, si on peut dire...) est terminé. La mise en place est établie et les personnages sont sommairement esquissés. Peu à peu, un dessein émerge... Une forme se consolide. Un plaisir point à l'horizon.

Nous nous sommes payés le luxe, hier matin, de faire un enchaînement des deux premiers tableaux (sur trois)... pour avoir une idée de ce que ça donne... pour donner une idée des difficultés - notamment, des changements de costumes continuels et rapides... et pour identifier les moments plus faibles qu'il fallait revoir.

L'exercice, bien que fastidieux, s'est avérée fort bénéfique.

À partir de ce moment, les répétitions de l'après-midi fonctionnaient un peu selon le principe du repentir en peinture: le repentir est une partie du tableau qui a été recouverte par le peintre, soit pour masquer un (des) personnage(s), des objets ou organes, soit pour modifier un aspect (position d'une main, par exemple) (Wikipédia). Deux scènes ont été complètement revues... une plus radicalement (d'où l'importance, pour les comédiens, de prendre des notes au crayon de plomb!) et l'autre, plus nuancée. Des refontes complètes. C'est peut-être la partie la plus éprouvante émotivement pour les acteurs alors qu'ils doivent reprendre à zéro, défaire les acquis, reformater leurs actions... avec, parfois, l'impression qu'ils sont pris en défaut. Et pourtant... C'est l'ensemble qui dicte ses besoins... Et modifier un geste, une entrée, une interrelation peut changer avec force la lecture du spectateur.

Un autre effet déstabilisant est le trop... trop montrer, trop faire, trop insister... aller trop loin. Une crainte qui paralyse... Dans l'esthétique privilégiée, il faut absolument passer par ce trop pour faire ressortir les effets voulus. Bien sûr, à force de répétitions et d'acquisition, le grossier prendra des allures plus subtiles.

À mesure que se construit le spectacle (alors qu'entreront en jeu, dans quelques jours, et les murs du décors et la lumière et la musique et la peinture), la recherche de précision et de compréhension des dynamiques entre les personnages deviennent nécessaires et constituent le principal enjeu de notre travail.

Pour le moment, l'ensemble du travail effectué dure environ 1h20...

Au théâtre, cette semaine! (Du 13 au 19 février 2011)


Quelques notes à l'agenda...

De dim. à merc. - du 13 au 16 février 2011
Salle Murdock (Chic.), 20h
DERNIÈRE SEMAINE

C'est maintenant au tour de Contrecoeur, l'amorphe Clown noir au patois si savoureux de présenter son solo, Le Contre Cabaret... une production du Théâtre du Faux Coffre. D'expérience, il vaut mieux réserver: 418-698-3000 poste 6561

Lun., merc. et jeu. - 14, 16 et 17 février 2011
Petit Théâtre (UQAC), 20h

Dans le cadre du Festival des finissants en arts 2011, c'est maintenant au tour de Sophie Châteauvert-Morin & Susie Lévesque de présenter leur projet: La foire aux femmes. Voici le résultat d'une fusion entre deux personnes et deux genres. La foire aux femmes, une pièce de théâtre mêlant les arts plastiques et la dénonciation du rôle de la femme dans la société. Une accusation passive à laquelle le spectateur ne peut qu'observer sans réagir, seulement subir. Que le spectacle commence!

Vendredi - 18 février 2010
La Boîte à Bleuet (Alma), 20h

C'est maintenant au tour de l'Auditorium d'Alma de recevoir le spectacle 1000 Mots d'amour (qui a été présenté le 3 février dernier par Diffusion Saguenay). Milles mots d'amour est une soirée de lecture de lettres d’amour aux profits des Impatients.

Samedi - 19 février 2010
Salle Pierrette-Gaudreault (Jonq.), 13h30
(aussi en représentation(s) scolaire(s) vendredi)

Le Théâtre La Rubrique reçoit Le Grand Voyage de Petit Rocher, une production du Théâtre de la Vieille 17 (Ontario). Un petit rocher n'arrive pas à s'identifier à ceux de son clan et supporte mal leur vie tranquille où l'on regarde la mer, malheureux comme les pierres! Surtout qu'à toute heure du jour ou de la nuit, dès qu'il ferme les yeux, il ne cesse de voir un grand rocher rouge avec un trou sur le côté. Ce roc étrange essaie de lui parler, mais Petit Rocher ne peut entendre ce qu'il dit. Un désir irrésistible s'empare alors de notre héros : il rêve de bouger, de partir, d'aller rencontrer ce fameux Rocher Troué… Mais comment partir quand on est un rocher? Qui peut l'aider dans sa quête?

Voilà... C'est à peu près tout... Je pense...

vendredi 11 février 2011

Que l'inoubliable se pende

Photographie: Andrée-Anne Giguère

Élaine Juteau est la première a avoir présenté son projet de fin de bacc., Que l'inbouliable se pende... production qui sera de nouveau présentée ce soir et demain, à 20h, au Studio-théâtre de l'UQAC (encore trop souvent nommée salle de répétition...).

Axées sur la rupture et la quête de l'oubli, ces quelques cinquante minutes entremêlent avec sensibilité, audace et, disons-le, talent et une scène de Macbeth et des petites vidéos de Bonnie and Clyde maison et des chansons et le multimédia dans un enrobage simple (avec des objets hétéroclites) et efficace qui fait la part belle à l'éclatement de l'image et du sens. Juteau se lance dans un étrange dialogue où l'interlocuteur est absent et est remplacé par les collaborateurs de la comédienne, André-Anne Giguère et son projecteur et Nicolas Longpré et ses instruments de musique. La douleur, le désemparement, le déni se croisent, s'entrecroisent, dans les différents niveaux de jeux et d'actions pour donner une trame rhapsodique* forte qui s'empare peu à peu du spectateur.

Parce que oui, le spectateur doit, en quelques sortes, s'acclimater à la production de sens... pour jouir des multiples propositions qui surprennent, touchent et font réfléchir.

Un travail de fort bon calibre... où l'on sent la nouvelle tangente technique donnée depuis quelques années au département (?) de théâtre de l'UQAC.
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* Rhapsodie: [...] Selon le sens étymologique littéral - rhaptein signifie «coudre» - « coud ou ajuste des chants». [...] Assemblant ce qu'il a préalablement déchiré et dépiéçant aussitôt ce qu'il vient de lier -, la notion de rhapsodie apparaît donc d'emblée liée au domaine épique: celui des chants et de la narration homériques, en même temps qu'à des procédés d'écriture tels que le montage, l'hybridation, le rapiéçage, la choralité. [...] Les caractéristiques de la rhapsodie sont tout à la fois kaléidoscope des modes dramatique, épique, lyrique, retournement constant du haut et du bas, du tragique et du comique, assemblage de formes théâtrales et extra-théâtrales, formant la mosaïque d'une écriture en montage dynamique, percée d'une voix narratrice et questionnante, dédoublement d'un subjectivité tour à tour dramatique et épique. Il s'agit donc avant tout d'opérer un travail sur la forme théâtrale: décomposer-recomposer - comporene, c'est à la fois assembler et confronter -, selon un processus créateur qui envisage l'écriture dramatique dans son devenir. C'est alors précisément le statut hybride, voire monstrueux du texte produit - ces recouvrements successifs de l'écriture que synthétise la métaphore du «texte-tissu»-, qui caractérise la rhapsodisation du texte, permettant l'ouverture du champ théâtral à une troisième voie, c'est-à-dire à une autre «mode poétique», qui associe et dissocie tout à la fois l'épique et le dramatique. (Poétique du drame moderne et contemporain)

Pour aller plus loin...


Pour faire suite à la petite discussion par médias interposés d'hier, je tiens à souligner qu'il y a un fort bon papier d'Alexandre Cadieux, dans la dernière parution du Cahier Théâtre Jeu numéro 137 portant sur le même sujet (ou à peu près): La critique de théâtre : quel engagement pour quel milieu ?... où prennent la parole deux des plus influents critiques du Québec, Robert Lévesque et Jean Saint-Hilaire, de même que des blogueurs, des pigistes et des artisans. Le problème critique est loin d'être exclusif à notre région...


jeudi 10 février 2011

Les gants blancs...


Dans la nouvelle parution du VOIR de cette semaine, Joël Martel y va d'une sortie en règle contre le sens critique de ceux qui devraient le manifester (comme par exemple, moi-même, dans le même journal...):

On est tenté de croire qu'il n'y a rien de plus facile que d'écrire qu'un acte théâtral se terminant par "roucoucou" est tout simplement ridicule. Mais encore, le jour où vous aurez à faire face à l'auteur de cette réplique ou à ses interprètes, il faudra vivre avec. C'est d'autant plus délicat lorsqu'on sait qu'une mauvaise critique a parfois le pouvoir de tuer littéralement le travail acharné d'artistes qui, déjà, est-il nécessaire de le mentionner, sont bien peu rémunérés.

[...]

Loin de moi l'idée de remettre en cause le travail des journalistes de la région qui s'adonnent parfois à cet exercice potentiellement périlleux qu'est la critique, mais la plupart du temps, l'empathie l'emporte sur la franchise.

On ne trouve plus un disque poche, on l'aime juste moins. On ne voit plus de mises en scène médiocres, on constate un désir de liberté. On vit dans un gala perpétuel où les gants blancs sont de mise.

(L'article complet se retrouve ici.)

Voilà. Est-ce que je me sens concerné? Évidemment (ceci étant dit sans frustration...). Depuis que j'écris sur les spectacles que je vois sur ce blogue ou dans le VOIR, je me pose, à tout coup, cette question: est-ce que ça dit vraiment ce que je veux dire. La réponse sera souvent: oui mais...

Non pas que j'écrive des faussetés ou que je ne fasse pas preuve de franchise. Je pense ce que j'écris. Mes questionnements (perpétuels...) prennent seulement une autre tournure que d'aucuns voudraient plus radicale. Mes gants ne sont pas blancs, ils sont gris... pas que je ne me sente pas capable de faire une critique (ou, enfin, une analyse...) et de l'assumer... mais plutôt parce que je ne me sens pas le détachement requis étant donné que je suis moi-même praticien, alignant les mises en scène et dirigeant l'une des huit compagnies de théâtre reconnues de la Ville... Situation étrange. Qui pose parfois un véritable problème. Ma grille d'analyse, toute objective soit-elle, passera toujours pour être colorée par ma propre vision du théâtre... Que mes billets concernent la Rubrique ou le CRI ou les Têtes Heureuses ou le Faux Coffre etc. Complexe d'Oedipe?

Alors empathie? Pas vraiment. Doute... qui grandit avec l'expérience.

mercredi 9 février 2011

La répétition: aventure plurielle


Alors que je suis en répétition «intensive» au Théâtre Mic Mac pour La Visite de Michel-Marc Bouchard et que je me prépare à entamer (enfin, d'ici quelques semaines) les répétitions du prochain théâtre du 100 Masques, j'ai commencé à lire les numéros 52, 53 et 54 - numéros reliés - d'Alternatives Théâtrales (décembre 96 et janvier 97) consacrés aux répétitions. Un bouquin (parce que c'en est un maintenant!) essentiel qui couvre, à partir de cet aspect, un siècle de mise en scène.

Voici une intéressante réflexion de Georges Banu, monument de la pensée théâtrale française:

La répétition est un entre-deux, et lors de la traversée de ce gué qui sépare le texte et la scène, les aventures souvent abondent, les personnalités se déclarent, les communautés se constituent ou explosent, bref la création s'accompagnent d'effets de vie au cœur même du théâtre. C'est pourquoi la répétition engendre une véritable littérature orale, galerie de portraits et inventaire de gestes accomplis dans cette recherche à plusieurs qui précède l'arrivée du premier spectateur.

[...]

À travers la déclinaison linguistique du terme, l'on retrouve la dualité contradictoire qui fonde le paradoxe de la répétition: elle est d'abord une pratique de création et ensuite seulement un acte de réminiscence, une découverte et après une mémoire, un faire et un re-faire. Une double interrogation l'anime: comment trouver et comment fixer? De quoi a-t-on besoin en tant que metteur en scène et surtout comment peut-on aider l'acteur?

Les répétitions sont toujours un moment privilégié de rencontres et d'échanges, de création et d'enthousiasme, comme c'est aussi parfois des moments douloureux, difficiles... Elles prennent différentes allures:

La progression diffère selon la nature des artistes qui privilégient l'avancée rapide afin que le dessin global se précise comme une première trame, ou l'avancée lente fondée sur le corps à corps avec l'ensemble des difficultés. Ensuite le repentir intervient différemment et l'on efface ou l'on retient selon l'identité de chacun. Il y a les metteurs en scène qui explorent pas à pas, et dont les décisions s'opèrent avec une lenteur qui leur permet de s'installer au fur et à mesure, et les metteurs en scène animés par le goût de la vitesse avec tout ce qu'elle produit comme envie constante de revenir, d'oublier, bref, de retarder au maximum la fixations.

Il me faudrait parfois un miroir pour voir comme je suis...

mardi 8 février 2011

Le public d'autrefois


Il y a quinze ans que nos théâtres étaient des lieux de tumulte [...]. Les têtes les plus froides s'échauffaient en y entrant, et les hommes sensés y partageaient plus ou moins le transport des fous. On entendait, d'un côté, place aux dames; d'un autre côté, haut les bras, monsieur l'abbé; ailleurs, à bas le chapeau; de tous côtés, paix là, paix la cabale. On s'agitait, on se remuait, on se poussait; l'âme était mise hors d'elle-même. Or, je ne connais pas de disposition plus favorable au poète. La pièce commençait avec peine, était souvent interrompue; mai survenait-il un bel endroit? c'était un fracas incroyable, les bis se redemandaient sans fin, on s'enthousiasmait de l'auteur, de l'acteur et de l'actrice. L'engouement passait du parterre à l'amphithéâtre, et de l'amphithéâtre aux loges. On était arrivé avec chaleur, on s'en retournait dans l'ivresse; les uns allaient chez des filles, les autres se répandaient dans le monde; c'était comme un orage qui allait se dissiper au loin, et dont le murmure durait encore longtemps après qu'il était écarté. Voilà le plaisir. Aujourd'hui on arrive froids, on écoute froids, on sort froids, et je ne sais où l'on va.

Telle est la description du public de la première moitié du 18ième siècle écrite par Denis Diderot (cité dans un ouvrage de A. Jullien, La comédie et la galanterie au XVIIIième siècle: au théâtre, dans le monde, en prison). Parfois, il me semble qu'un public un peu plus turbulent ferait du bien dans nos salles...


lundi 7 février 2011

La Visite [Carnet de mise en scène]

Le Théâtre Mic Mac ressemble à un chantier: un décor à construire, 40 costumes à fabriquer, des comédiens, des concepteurs, des administrateurs... et des projets!!!

Le week-end aura permis de trouver de véritables pistes de travail pour différents personnages... et ça fait du bien! Trouver un filon à exploiter... L'ensemble se dessine avec vivacité. La mécanique qu'on instaure (et que subissent les comédiens en coulisses qui courent et s'activent à se métamorphoser en quelques secondes!) acquiert de plus en plus une belle force dramatique. Ça entre de partout, ça sort de partout... Au gré des rencontres, la distorsion recherchée apparaît... Maintenant faut-il que les comédiens principaux, le fameux couple qui se fait envahir, y trouvent leur compte et s'amusent, aient du plaisir avec ces multiples personnalités qui agiront, dès lors, comme des accessoires. Le défi est là.

Encore beaucoup de boulot reste à abattre mais tout semble bien parti! Et j'ai une belle et bonne équipe... à faire bien des envieux!

dimanche 6 février 2011

Au théâtre, cette semaine! (du 6 au 12 février 2011)


Petite semaine théâtrale au Saguenay... avec des propositions variées qui trouveront sûrement de quoi satisfaire l'amateur le plus difficile... À noter (même si ça sort du cadre strictement théâtral!) que ce sera le début du Festival des finissants en art de l'UQAC...

De dimanche à mercredi - du 6 au 9 février 2011
Salle Murdock (Chicoutimi), 20h

PREMIÈRE SEMAINE


C'est maintenant au tour de Contrecoeur, l'amorphe Clown noir au patois si savoureux de présenter son solo, Le Contre Cabaret... une production du Théâtre du Faux Coffre. D'expérience, il vaut mieux réserver: 418-698-3000 poste 6561

De mercredi à samedi - du 9 au 12 février 2011

Salle Pierrette-Gaudreault (Jonquière), 20h
DERNIÈRE SEMAINE

La Rubrique présente Les Sens... un spectacle-concept qui réunit six auteurs dits régionaux: Sylvie Bouchard, Michel-Marc Bouchard, Daniel Danis, Jean-Rock Gaudreault, Larry Tremblay et Pierre-Michel Tremblay. La mise en scène est de Benoît Lagrandeur qui joue aussi en compagnie de Émilie Gilbert-Gagnon, Patrice Leblanc, Sara Moisan, Guillaume Ouellet et Guylaine Rivard. Outils idéaux pour percevoir, pour nous situer, pour entrer en contact avec notre environnement, nos sens se seraient-ils atrophiés? Qu’en est-il de la perception de l’autre par rapport à la nôtre? Avons-nous perverti ces précieuses antennes? Peut-on toujours s’y fier ou nous jouent-ils parfois des tours? Le coût d'entrée est de 27.50$ pour les adultes et de 15$ pour les étudiants.

Jeudi - 10 février 2011
Boîte à Bleuets (Alma), 20h

L'Auditorium d'Alma reçoit, dans le cadre du Festival Des Mots Dits, Bruno Coppens... un humoriste (et comédien!) blege fort théâtral.. et son spectacle, Ma terre happy!: Cette fois (car il n'en est pas à sa première visite dans la région), le spectacle prend la forme d’une consultation alors que Coppens pose son naïf personnage dans le bureau d’un psy. Mais il n'est pas venu seul puisqu'il est accompagné de son souffleur de théâtre... Un concept qui amènera la thérapie dans une dérie de mises en situation les plus cocasses les unes que les autres. Entrée générale: 27$

Vendredi - 11 février 2011
Le Ménestrel (Chicoutimi), 20h

C'est autour de Diffusion Saguenay de recevoir l'humorise belge dont il vient d'être question... avec des coûts d'entrée légèrement différents: 38$ pour les adultes et 30$ pour les étudiants...

De jeudi à samedi - du 10 au 12 février 2011
Studio-théâtre (UQAC), 20h


C'est le début du Festival des finissants en arts 2011. Élaine Juteau est la première en théâtre à proposer son projet de fin d'études (dont on dit beaucoup de bien!), Que l'inoubliable se pende, un spectacle sur la rupture, la mémoire... Un solo en dialogue avec l'image et le son.

Si j'oublie quelque chose (parce que je ne sais pas tout...), qu'on me le fasse savoir!

samedi 5 février 2011

La Visite [Carnet de mise en scène]


Nous entreprendrons tantôt la troisième fin de semaine de répétitions de La Visite ou surtout sentez-vous pas obligés de venir, une comédie efficace qui pose de réels défis de par sa forme qui, d'une part, place au centre un couple, Monique et Roger, qui tiennent la scène du début à la fin et, d'autre part, une trentaine (je ne les ai pas comptées) d'entrées et sorties qui donnent une multitude de petites scènes, des brèves... Trouver l'équilibre dans ce tourbillon n'est pas si évident.

Pour les deux jours à venir, on fait un temps d'arrêt pour consolider des parties, revoir les mises en place, redéfinir les personnages avec plus de précisions... le tout dans une salle de répétition qui ressemble de plus en plus à une ruche! Un travail de rigueur pour les interprètes qui ont parfois jusqu'à cinq personnages différents à incarner... et chacun doit l'être dans le plaisir, et l'aisance... tout en se démarquant de tous les autres...

Un temps d'arrêt aussi parce qu'il sera question d'une réunion de production nécessaire et bénéfique pour mettre à jour les attentes et les besoins.

C'est donc une fin de semaine non pas d'avancement (bien que tout le travail participe à développer la création) mais de surplace, de retour en arrière, d'ajustements. C'est le genre de travail qui me plaît plus que tout parce qu'il permet de régler une mécanique scénique, de donner une forme de plus en plus précise, débarrassée du flou, de l'imprécision. C'est là que le travail du metteur en scène (du moins, d'un point de vue formel) se rapproche le plus de celui d'un sculpteur: dégager l'essence de son carcan superflu pour donner un corps et aux interprètes et aux scènes et à l'ensemble du spectacle.



vendredi 4 février 2011

Public ou privé?


Question existentielle... enfin structuro-économique... touchant le Théâtre 100 Masques: être ou ne pas être un théâtre subventionné?

Dans les faits, outre le soutien du Conseil des Arts de Saguenay pour son fonctionnement, la compagnie n'a produit principalement que grâce à ses revenus d'ateliers, ses revenus de guichet et ses levées de fonds (entendre par là les partenariats financiers et les commandites... la majeure partie du budget!). Pourquoi perdre des énergies à tenter de répondre aux critères des subventionneurs et à faire les demandes au CALQ et au CAC alors que jamais, en 12 ans, ils ne lui ont octroyé le moindre sou (ce qui n'a pas empêché le 100 Masques de faire ses projets...)? Pourquoi ne pas plutôt consacrer celles-ci à l'établissement de partenariats récurrents, d'une véritable structure de financement?

Bon. Maintenant, faut voir ce que ça implique... quels en seraient les avantages et quels en seraient les inconvénients... Mais je pense que la réflexion est maintenant nécessaire.



jeudi 3 février 2011

Des sens uniques (Voir, 3 février 2011)

Guillaume Ouellet et Benoît Lagrandeur
dans le tableau Touchez-moi de Jean-Rock Gaudreault.
photo: Jean Briand

Avec Les sens, le Théâtre La Rubrique joue un grand coup en ne présentant pas un mais bien six auteurs différents... comme tout autant d'écritures dramatiques distinctes.
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Ce qui frappe le plus dans Les sens, c'est cette diversité d'écritures que d'aucuns appelleraient le style. Six auteurs, six visions du monde... mais aussi, six visions du théâtre, de la façon de construire une histoire, de l'art du dialogue. On y retrouve ce qui fait la singularité de l'oeuvre de chacun: la place de la famille et le souci du détail de Michel Marc Bouchard; les accents politiques et l'humour caustique de Pierre-Michel Tremblay; le formalisme et la précision maniaque de Larry Tremblay; l'apparence de légèreté de Sylvie Bouchard; le réalisme et la profondeur existentielle de Jean-Rock Gaudreault; et, enfin, la quête quasi mystique de soi et de l'autre de Daniel Danis.

Six auteurs qui manient le verbe et qui abordent leur sens au propre comme au figuré.

L'ensemble de ces textes donne une production riche en propositions qui, toutefois, se révèle quelque peu inégale pour le spectateur avide de sensations. Certains tableaux atteignent facilement leur cible (notamment ceux sur le toucher, l'ouïe et le goût), alors que d'autres demandent plus d'attention. Mais nonobstant quelques réserves littéraires, les rires fusent... et bien que certains passages n'aient pas résisté au moralisme sociopsychologique, on sort de ce spectacle mis en scène par Benoît Lagrandeur avec le plaisir d'y avoir vu et entendu de bons artistes.

Car outre la (re)découverte de ces écritures, Les sens, de par sa forme éclatée, permet aussi et surtout de faire la rencontre d'une équipe d'interprètes solides dans des saynètes savoureuses.

Qu'ils soient aux prises avec des kiwis à goûter, dans un parc à se défier de confidences en confessions, au téléphone dans un échevelé chassé-croisé, dans une cour de chalet la tête ailleurs, dans un monologue entre l'aéroport et la famille ou au chevet d'une fille perdue dans le néant, les comédiens ont le beau jeu de créer des personnages loufoques, sensibles, caricaturaux, bêtes et, évidemment, sensuels. À ce chapitre, il faut souligner les performances notables de Lagrandeur, Guillaume Ouellet et Émilie Gilbert-Gagnon, en pleine possession de leurs moyens.

Un spectacle qui plaira assurément aux amateurs de textes québécois!

(Lien vers l'article sur le site du Voir)