Le Rire de la mer s'est tu hier soir. Le rideau est tombé. Les boîtes redeviennent des boîtes sans poésie.
Définitivement, l'aventure robervaloise s'est terminée dans le plaisir et l'émotivité... dans la mesure où je sais me laisser aller à ce sentiment!
La dernière représentation n'a pas la même magie que la première. Elle ne revêt plus, en coulisse, la même fébrilité. Comme si, pour la première fois, la lucidité, la sensation de prendre son personnage pour un dernier tour de piste et le plaisir de se retrouver tous ensemble jusuq'à un prochain rendez-vous encore inconnu, teintent ce spectacle d'une douceur, d'une extrême sensibilité qui se ressent même dans le public.
Et pour moi, c'est le rôle ultime du spectateur... car demain, pas de notes. Pas de retour. Pas de changements. Ce soir de dernière, pas de stress... juste un pincement au coeur qui prend de l'ampleur au même rythme que passent les tableaux pour faire place au vide et à l'absence.
Bien sûr, ce n'est pas parfait. Mais qu'importe. C'est la soirée de la reconnaissance, de la fierté, de la camaraderie exacerbée par la fatigue et le deuil de cette production.
Et maintenant que tout est fini, vient le moment du bilan... Bilan qui durera plusieurs jours, plusieurs mois, voire plusieurs années.
Oui. Je dois l'admettre. Le Rire de la mer fut une production éprouvante à différents égards (de ce fait, cette production est sans doute porteuse d'innombrables richesses à découvrir...): météo affligeante, distribution d'envergure qui augemente la discipline, tensions de toutes sortes, gestion de stress ardue (temps de répétitions, boîtes et changements de décors) et angoisse personnelle propre à la mise en scène. La machine fut parfois très lourde à porter. De tous mes projets, probablement le plus difficile que j'aie fait. Celui qui m'a le plus fait douté...
Tout au long des représentations, et ce malgré les critiques louangeuses, j'ai eu l'impression de n'avoir pas su transmettre la passion du projet à toute l'équipe. D'avoir frappé un stade que je n'ai pas su surmonter. D'avoir, en quelques sortes, perdu un temps précieux à des moments stratégiques, de n'avoir pas su aller là où on aurait dû se rendre...
Et pourtant...
Le Rire de la mer a permis, en même temps, l'éclosion de moments magiques. De véritables minutes, heures, journées de plaisir, de fous rires, de comédie pure. Des surgissements de folies incontrôlés et incontrôlables. De bonne entente et de confidences... Des liens se sont tissés (et raffermis) avec les gens du Mic-Mac. Des amitiés se sont consolidées. Et la complicité a su encore s'établir pour nourrir la construction de ce spectacle. Le travail y a été exigeant... ce qui, paradoxalement, laisse un sentiment de devoir bien accompli... de réussite...
Et pour tout cela, je remercie profondément tous mes acteurs qui m'ont suivis (plusieurs parmi eux depuis près de quatre ans), tous mes concepteurs qui se sont évertués à être imaginatifs et à répondre aux moindres de mes désirs, tous les intervenants autour de cette production pour leur confiance, leur soutien et leur dévouement. Merci à tous ces gens du Théâtre Mic Mac de m'avoir permis une nouvelle fois de m'investir dans un grand et beau projet en leur fidèle compagnie. Oui. L'instant présent appartient encore aux sourires et aux souvenirs. Et puissent-ils le demeurer encore longtemps...
Probablement des gens se demanderont pourquoi cette musique... C'était la musique finale du spectacle, l'apothéose, pendant la construction (littérale) du théâtre d'Épidaure...