(exposé au Salon des Artistes Français de 1912)
Renard Emile (1850-1930)
N'y a-t-il pas danger que la théâtralité spectaculaire, l'effet de mise en scène et les nouveaux médias prennent toute la place, finissent par absorber l'essence même du théâtre en le poussant inéluctablement vers le cliché («Le cliché est une tradition vidée de son sens» disait l'omniprésent Meyerhold)? En noyant le principal vecteur de cette dite théâtralité - l'acteur - dans une mécanique où il n'a plus d'emprise?
Cette question, je me la pose en repensant à mes dernières productions où ce n'est pratiquement plus la performance des comédiens qui frappent mais la mise en scène elle-même... et encore! Pas la mise en scène tant que les punchs scéniques... La scène s'autosuffit en quelques sortes...
Et si elle absorbe tout, la scène peut-elle se survivre, se résister à elle-même pour demeurer dans le mode communication? Ne s'absorbera-t-elle pas dans un néant dénué de sens? Un trou noir? Ne restera-t-il plus, à la fin de la représentation, qu'un objet inutile (le spectacle), artéfact d'un tout (le théâtre) devenu incontrôlable... tyran atrophié?
L'autonomisation... N'est-ce pas là son écueil fatal? Ce que d'aucuns nomment le théâtre postdramatique reflète-t-il une évolution naturelle ou un signe prémonitoire d'une agonie déjà consumée?