lundi 27 octobre 2008

PHÈDRE, Acte I scène 3

La Mort de Phèdre a été réalisée
par l'artiste Girodet De Roussy-Trioson Anne-Louis (1767 - 1824)

Voici, pour moi, l'un des plus beaux (et des plus tragiques) passages amoureux du répertoire classique, écrit par Jean Racine et récité par sa douloureuse Phèdre... celui où celle-ci décrit, dans toute sa fureur, tout l'amour qu'elle porte pour son beau-fils Hyppolite:

Mon mal vient de plus loin. A peine au fils d'Egée
Sous les lois de l'hymen je m'étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait s'être affermi,
Athènes me montra mon superbe ennemi.
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps et transir et brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D'un sang qu'elle poursuit tourments inévitables.
Par des voeux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple, et pris soin de l'orner ;
De victimes moi-même à toute heure entourée,
Je cherchais dans leurs flancs ma raison égarée,
D'un incurable amour remèdes impuissants !
En vain sur les autels ma main brûlait l'encens :
Quand ma bouche implorait le nom de la Déesse,
J'adorais Hippolyte ; et le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer,
J'offrais tout à ce Dieu que je n'osais nommer.
Je l'évitais partout. O comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
Contre moi-même enfin j'osai me révolter :
J'excitai mon courage à le persécuter.
Pour bannir l'ennemi dont j'étais idolâtre,
J'affectai les chagrins d'une injuste marâtre ;
Je pressai son exil, et mes cris éternels
L'arrachèrent du sein et des bras paternels.
Je respirais OEnone, et depuis son absence,
Mes jours moins agités coulaient dans l'innocence.
Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,
De son fatal hymen je cultivais les fruits.
Vaine précautions ! Cruelle destinée !
Par mon époux lui-même à Trézène amenée,
J'ai revu l'ennemi que j'avais éloigné :
Ma blessure trop vive a aussitôt saigné,
Ce n'est plus une ardeur dans mes veines cachée :
C'est Vénus tout entière à sa proie attachée.
J'ai conçu pour mon crime une juste terreur ;
J'ai pris la vie en haine, et ma flamme en horreur.
Je voulais en mourant prendre soin de ma gloire;
Et dérober au jour une flamme si noire :
Je n'ai pu soutenir tes larmes, tes combats ;
Je t'ai tout avoué ; je ne m'en repens pas,
Pourvu que de ma mort respectant les approches,
Tu ne m'affliges plus par d'injustes reproches,
Et que tes vains secours cessent de rappeler
Un reste de chaleur tout prêt à s'exhaler.

Encore...


Eh bien... c'est reparti... enfin presque!

Radio-Canada vient de confirmer (après les fuites d'hier sur LCN), selon des sources sûres, la tenue d'élections générales provinciales pour le 8 décembre.

Quelle place la culture occupera-t-elle dans celles-ci? Probablement infime, si l'on prend en compte l'imminente crise économique. Au plus, quelques lignes dans les plateformes électorales...

Le choc des générations


Courriel d'un lecteur - ma foi! - assidu que je me permets de placer ici pour l'intérêt du sujet qui me préoccupe beaucoup.

En commentaire aux dernières interventions sur ton blog concernant le colloque et la non-présence ou la quasi-absence des étudiants.

Les événements artistiques ou critiques n'existent que pour ceux que le sujet intéresse; il ne faut pas être naïf.

L'absence d'étudiants ne se justifiera jamais car cela est impossible à justifier... on ne peut forcer l'intérêt; tout au plus peut-on, dans les limites des libertés humaines "fortement conseiller" ou encore créer des événements de groupe où chacun se retrouve "mis en évidence", donc présent par obligation morale.

Deux ou trois étudiants s'intéressent à Tchekhov ?!! Bravo !! Tant mieux !!! Que certains n'aient aucun intérêt dans quoi que ce soit ? Là se trouve la véritable inquiétude, car sans une once d'intérêt on n'a pas un soupçon de culture ou de ce qu'elle représente.


Et puis la relève ? Elle est là, elle arrive, sans doute à mon goût trop polie, et calme, mais sans véritable goût semble-t-il (je peux me tromper) de vraiment foncer dans le tas. Mais il ne faut pas être aveugle, plusieurs travaillent déjà fort et prennent peu-à-peu la place qui leur revient... certaines choses de la vie demandent du temps; c'est comme ça.

Combien y avait-il de jeunes professionnels du théâtre présents vendredi ? Plusieurs parce qu'ils y jouaient un rôle, "celui d'être du colloque" ou de participer à une action artistique... on leur avait appris à comprendre et à apprécier.

Peut-être faudrait commencer à former des spectateurs plutôt que des artistes ? Un baccalauréat en voyeurisme artistique... je sais, trop ironique.

Faut que jeunesse se passe, disait-on à une autre époque pas si lointaine... mais la jeunesse passe vite, très vite, on le sait quand elle est passée et ne survivent dans ces métiers des arts et de la culture que ceux/celles qui déjà apprennent à brûler la chandelle par les deux bouts... c'est déjà bien il me semble.


Merci.

D'un côté, oui, il faut avoir confiance envers ceux qui arrivent... et pourtant, en même temps, il devient si désespérant et/ou décourageant et/ou démobilisant de tenter de les secouer...