Voici un autre extrait (après celui publié hier sur ce blogue... parce que ce fut ma lecture du weekend!) de Zeami, grand acteur et auteurs de nôs, tiré de son traité Kakyo (Le Miroir de la Fleur) écrit en l'an 31 d'eÔi (1424), sixième lune, premier jour.
Ce (magnifique) passage résonne comme un conseil aux acteurs qui veulent progresser sans perdre de vue l'essentiel: la conscience de soi dans l'humilité:
[...] Cela dit, nous avons, dans notre école une maxime d'une portée universelle: «N'oubliez pas vos débuts.» Cette maxime fait l'objet d'une tradition orale en trois points:
«Bons ou mauvais, n'oubliez pas vos débuts; n'oubliez pas vos débuts dans chaque période; n'oubliez pas vos débuts dans la vieillesse.»
«Bons ou mauvais, n'oubliez pas vos débuts»: si vous conservez en vous, sans jamais l'oublier, [le souvenir] des débuts de vos jeunes années, il en résulte, dans la vieillesse, toutes sortes d'avantages. «La connaissance des défauts de ce qui précède est la condition des qualités de ce qui suit», dit-on. Et encore: «Quand la voiture qui précède verse, c'est un avertissement pour la voiture qui suit», etc. Oublier ses débuts, n'est-ce pas ignorer, du même coup, les étapes qui suivent? «Réussir et se faire un nom» est le résultat d'une progression des facultés. Celui qui ne se rend pas compte de cette progression, ne s'aperçoit pas davantage d'un retour à ses débuts. C'est donc afin d'éviter de méconnaître son degré actuel, que l'on s'ingénie à ne point oublier ses débuts. Si l'on n'oublie pas ses débuts, les étapes qui suivent seront correctement [appréciées]. Si l'on [apprécie] correctement les étapes qui suivent, [les facultés] qui auront progressé me régresseront plus jamais.