jeudi 21 août 2008

À sec...


Olivier Besson, Les Répétitions, p. 433:

Il faudra sans doute un jour parler de la fatigue des répétitions, de la fatigue des metteurs en scène, des acteurs. Elle arrive, inattendue parfois au bout d'années de spectacles, pour peu de temps ou tel un poids qui ne cesse plus de peser, comme un épuisement, non de l'envie de travailler, mais beaucoup plus intimemenet du fait de se sentir vide et à sec. Quelque chose comme une indigestion, une lassitude bien au-delà des errances idéologiques d'une génération de créateurs troublés dans leurs principes mêmes de travail.

Non seulement il faut trouver, mais savoir retrouver. refaire pour inventer, et construire l'invention. [...] Tous les acteurs connaissent les joies de la découverte, et les difficultés de la retrouver afin de pouvoir refaire. L'envie de refaire, aussitôt, et le sentiment déjà de ne reproduire qu'une forme. La reproduisant pour ne pas la perdre, on espère retrouver le chemin qui y a mené. Et plus on refait à vide, plus la voie s'assèche, plus la formee se fossilise, se vide de sa substance. Refaire et ne rien tenir. La même douleur pour le metteur en scène. Et le sentiment que parfois cela tourne à vide, la pensée, les répétitions, le système de production.

[...] Avoir la force de piétiner sans fatigue, de ruminer sans amertume et de ne jamais baisser les bras. Et de travailler ses propres faiblesses, d'aller jusqu'au bout pour construire, même sur du vide de soi-même. Mais sur un vide vivant. Il faut avoir à la fois le désir irrépressible du coureur de 100 mètres, et la ténacité du marathonien. Répéter sans rabâcher, refaire sans faire à nouveau. S'obstineer sans s'entêter, avec souplesse, jamais en force.

[...] En répétition, l'épuisement du désir, c'est la mort du théâtre...

Et vlan!