mercredi 30 janvier 2008

Séminaire et cinéclub

L'idée (qui n'est pas le mienne, soit dit en passant) fait de plus en plus son chemin: mettre sur pied un Cinéclub axé spécifiquement sur les documents audio-visuels touchant le théâtre (entrevues avec les metteurs en scène, documentaires, captations vidéo de représentations, etc.) au sens large (régional, provincial, national et international).

Par ailleurs, des séminaires pourraient être organisés autour d'un article (ou d'une séries d'articles sur lemême sujet), d'une parution, d'expériences théâtrales, etc... pourraient (ou non) précéder ou suivre les visionnements

Ce projet serait fait dans le seul but de se permettre de parler de théâtre... de voir comment la théorie peut s'allier à la pratique, d'approfondir nos connaissances théâtrales.

mardi 29 janvier 2008

Heureuse Jeunesse

HEUREUSE JEUNESSE (texte de Frédéric Gagnon, mise en scène de Geneviève Mercier-Bilodeau et Maryline Tremblay) peut se présenter comme étant une charge à fond de train contre la culture de masse et/ou une démonstration des effets de l’Art sur le sujet humain. L'ironie y règne en maître et dénonce la standardisation qui nivelle l'intelligence par le bas. Bien que cette pièce soit somme toute assez conventionnelle (dans le sens de traditionnelle…), il est intéressant de noter qu'elle s'élabore à partir de deux oeuvres matricielles se confrontant: Beverly Hills 90 210 (les absurdes faux semblants aux accents «Cantatrice chauviens») mis en relief par Les Frères Karamazov de Dostoïevski (la liberté de pensée).

Le rythme de ce texte est incisif, fortement construit et repose donc sur une structure efficace… parfois déséquilibrée par les narrations (des Frères Karamazov et du Grand Inquisiteur) qui en alourdissent un peu le déroulement.

M.-Bilodeau et Tremblay s'en tirent généralement très bien et ont fait du fort bon travail.

Toutefois, la mise en scène souffre un peu, et c'est tout à fait naturel, de la «première fois». Elle est relativement fort sage... et surtout, très étendue dans l'aire de jeu. Alors que le texte propose une mécanique dramatique chaoteuse, la mise en scène disperse le regard du spectateur et atténue la tension (nécessaire) par une trop grande distance entre les personnages. L'équilibre disons... technique, est parfois un peu surprenante. Tout d'abord, les effets sonores s'espacent de plus en plus pour complètement disparaître en cours de réprésentation (si ce n'est du téléphone)... comme si on avait eu peur de trop en mettre... Quant aux effets éclairages, leurs nombres élevés posent un autre problème: dans la quantité, on perd parfois un peu la ligne directrice de ceux-ci, leur sens...

Les décors ne remplissent peut-être pas leur mission... ou leur évocation: celle de la maison de poupée... Est-ce la disposition des panneaux? La couleur des murs? L'esthétique choisie? Toujours est-il que ce Beverly Hills scénique (qu'il soit de poupée ou non) manque un peu d'unité et de force... Ces décors (combinés aux costumes) se situent dans un entre-deux (l'évocation du jouet versus l'évocation d'un véritable salon) qui, étrangement (parce que j'ai vu les filles travailler), manque un peu d'assurance, pour ne pas dire de jusqu'au-boutisme de part et d'autre.

La direction d'acteurs, elle, s'avère plutôt réussie. Les personnages sont bien esquissés, et surtout, bien soutenus par les interprètes (mention spéciale à Marie-Ève Gravel et à sa Barbara Sue parfaitement effrayante de perfection, d'une constance et d'une justesse à jeter par terre!). Marilyn Bédard, exubérante et pétillante dans la vie, surprend (positivement!) par sa sobriété... Sa partition comporte une autre difficulté énorme: par son discours, son cheminement intellectuel subit, sa Brenda n'est pas sur la même tonalité, sur le même niveau de jeu que les autres. Sur scène il y a donc la comédie... et Brenda, le pendant philosophico-littéraire. Il est sans doute fort difficile, à entendre les rires occasionnés par ses comparses, de ne pas sombrer dans le cabotinage. Messieurs Simard et Tremblay offrent également de belles performances.

HEUREUSE JEUNESSE se termine demain... et avec lui, la présentation 2008 des projets de fin de bacc. en théâtre.
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Quelques minutes avant ces représentation, Tania Ouellet présente Capture éphémère... doux leurres, dans le Studio-Théâtre. Très bon petit spectacle... qui n'a, de défaut, que sa longueur: dix minutes! On pourrait s'étendre sur le propos... mais cette étendue serait plus longue que l'objet lui-même...

Spectacle de danse expressive entrecoupée de poésie et d'images, Capture offre un monde... qui à peine apprivoisé s'éteint... Jérémie Desbiens évolue seul, dans une chorégraphie qui rappelle un peu les premiers pas (naïfs!) de Georges-Nicolas Tremblay, il y a dix ans...

dimanche 20 janvier 2008

Le Déluge après...

Peinture à l'huile sur toile de Francis Danby.


Après avoir assisté à l'une des représentations de la toute dernière production de la Rubrique, Le Déluge après, je dois avouer que j'abonde généralement dans le même sens que le texte paru sous la plume de Christiane Laforge, dans les pages du Quotidien du 19 janvier 2008.

Les comédiens sont bons. Le texte est bien... un peu long... avec parfois un excès de jurons... mais bien. Toutefois, à la première écoute, il est, je trouve, difficile de cerner quel est le véritable sens de cette fable (ou conte de fée?), de l'enjeu, le lien entre les personnages... et paradoxalement, l'histoire n'en demeure pas moins simple et facile à suivre.

Sans m'être ennuyé, je me suis posé tant de questions et réflexions (les premières étant reliées au comédien mystérieux!) au cours de cette heure et demie que dure ce spectacle que je n'ai pas réussi à plonger dans ce qui m'était proposé.

Peut-être est-ce dû finalement à un problème de mise en scène/direction d'acteur. Comme par exemple, charger le jeu de Monique Gauvin (par ailleurs fort intéressante... et magnifique chanteuse) d'un lourd accent anglophone finit par détourner l'écoute pour assommer l'attention du spectateur à ce qu'il est dit. Ou bien diriger le jeu de Richard Fréchette lors de sa première (et longue!) apparition à la «olivier-guimond-qui-joue-l'homme-saoûl» finit aussi par nous (me) saoûler. Les présences d'Émilie Bouchard-Jean, de Patrice Leblanc et de tous les autres, quoique parfois touchantes, ne permettent pas d'esquisser un projet d'ensemble clair, une ligne directrice à ce spectacle... et ne nous mènent guère vers cette exquise sensualité annoncée. La seule qui y parvient, en fait, est probablement Dalida-Johanne qui pleure-de-joie la présence soudaine de son Omer-Richard.

La facture esthétique de cette production peut aussi (peut-être) remettre en cause sa bonne compréhension.

Il semble manquer d'unité entre les différents espaces dramatiques (toile, route, lieux) où l'on passe de la réalité au symbolisme ou du moins, à l'évocation, dans un déambulatoire un peu forcé (et restreint!)... Il devient parfois un peu ardu de définir quel est le niveau d'énonciation. L'utilisation (et la superposition) de ces espace souffre peut-être aussi un peu de leur trop grande caractérisation: le snack-bar, la cuisine-salon de Dalida, le bar, la route, le fleuve, le camion (hors-champ). Tout est largement défini (par le mobilier) et s'ouvre, par conséquent, difficilement sur d'autres possibilités.

Quant aux costumes, quelques questions se poseraient (questions qui relèvent aussi -et surtout, à- de la mise en scène et de sa conception): quel est la véritable fonction du personnage de Dalida et pourquoi l'attriquer de la sorte? pourquoi la beauté improbable de June revêt-elle un tel style néo-friperie-haute-couture? les cheveux ayant une si grande importance (du moins ce que j'en ai compris), les perruques ne mériteraient-elles pas d'être un peu plus soignées, moins fausses?

Voilà, en gros, les réflexions qui m'ont tenu compagnie, de retour dans la froidure et la noirceur de ma voiture, après la représentation.

Le Déluge après
Théâtre la Rubrique

Jusqu'au 2 février 2008
Centre Culturel du Mont-Jacob (Jonquière)


P.S.: Les scènes de nudité (que je trouve par ailleurs un peu amoindries, tassées sur le côté de la scène alors qu'elles devraient être le coeur même de ce village paumé) font, par ailleurs, écho au dernier numéro des Cahiers théâtre JEU paru il y a quelques jours et qui traite du corps (dont un article sur la nudité au théâtre: il n' y a de véritable nudité au théâtre que celle masquée, de dire Michel Vaïs... sinon, la nudité du comédien prime sur celle du personnage... et à ce moment, c'est par exemple Émilie que je vois nue et non June... Pat Leblanc et non Denis... etc.). À lire si le sujet intéresse...

17 commentaires ont été publiés sur l'autre blogue:

bébéjajoulatoune a dit…

Étrange, aucun commentaires.
Il n'y a pas un dicton qui dit : "Qui ne dit mot, consent."???


Nada sur le net! a dit…

Étant moi-même un membre de l'équipe de création de cette production, je ne crois pas en mon objectivité. Ceci étant dis je crois que toute création théâtrale est un amalgame de plusieurs éléments parfois, pour diverses raisons, réussis ou non. Je penses ici avoir satisfait les désirs du metteur en scène et mis en valeur les différents éléments visuels... Pour le reste, cela ne m'appartient pas. Ce qui me surprend ici, un peu comme bébéjajouelatoune, c'est l'absence de réaction. J'étais le premier à penser que ce billet provoquerait un débas d'idée qui, à mon avis, est une bonne chose pour notre petit milieux "co-sanguin".


marilune a dit…

Peut-être les lecteurs n'ont pas encore vu!


yoyo a dit…

lol... en effet...


Guylaine a dit…
Je viens tout juste de découvrir ton blogue et je trouve ça tout à fait judicieux, courageux et généreux de partager avec nous tes réflexions et tes questionnements sur la pratique théâtrale. Je m’intéresse à ton travail, j’ai même eu la chance de travailler avec toi et je peux dire que je fais entièrement confiance à ta sensibilité. Je connais ton intérêt pour le théâtre et je sais ton plus grand respect pour la pratique et les gens qui la font. Bien sûr que ce n’est pas toujours évident pour un créateur de se soumettre à la critique ou au questionnement des autres (du milieu en particulier), mais je dois dire qu’il est tout aussi difficile de donner une opinion personnelle, si elle ne va pas dans le sens positif. Avec le potentiel, le dynamisme, la volonté de s’inscrire comme professionnel en théâtre qui règnent ici, je crois qu’il est temps que le milieu théâtral (dont je fais partie) fasse preuve de maturité, de confiance envers leurs pairs et d’honnêteté.

J’ai lu ton commentaire sur Le déluge après…Je dois dire que je ne partage pas nécessairement les mêmes questionnements que toi. Je n’ai pas de mal à imaginer les réactions que tu as pu provoquer au sein de la production, ce qui est tout à fait normal.

J’ai vue la pièce et tout comme toi, je n’ai pu m’empêcher de me poser certaines questions. C’est une production que j’ai beaucoup appréciée. Particulièrement le jeu des comédiens qui a retenu mon attention jusqu’à la fin, malgré quelques passages du texte que j’ai trouvé un peu denses (laborieux). Mes questionnements se situent davantage sur l’espace et la facture esthétique du spectacle. Je reconnais le travail hautement professionnel de Serge Lapierre et de Hélène Soucy (deux amis que j’espère ne pas déstabiliser), mais je me suis fait certaines réflexions quant aux choix et intentions des concepteurs ; l’unité d’ensemble du spectacle. L’espace éclaté de Serge suggère une horizontalité fort intéressante (toile de fond, route, plancher), mais il me semble qu’en y implantant des lieux précis (bar, salon de coiffure, restaurant), il recrée un environnement scénique conventionnel. C’est certainement une question de choix, mais je crois qu’un espace moins chargé aurait été tout aussi évocateur. Par ailleurs, le personnage fixe (mannequin), ne me semble d’aucune utilité, je comprends l’idée, mais je ne la trouve pas efficace. Je me suis également questionnée sur les scènes de nudité qui, à mon avis, sont des moments charnières (centraux) dans le spectacle. Curieusement, on a choisi de les présenter en retrait (côté cour). Les costumes d’Hélène sont très beaux (des œuvres d’arts en soit), mais il est étrange de voir des créations de style haute couture dans un endroit aussi dépourvu que le suggère le récit.

Je termine en réaffirmant mon appréciation du spectacle, la fable, les personnages, la musique... Bref une création montée par des professionnels que j’ai regardée avec mes yeux de passionnée et que j’ai applaudi avec beaucoup de sincérité.


marilune a dit:

mmmm, quoi dire, redire ou démentir après avoir vu et relu l'article avec ses commentaires?

Je dois commencer par : En général, j'ai passé une bonne soirée, j'ai bien aimé, j'ai souris, ris et même pleuré!

Par contre, ayant déjà lu le texte il y a quelques mois, j'ai eu quelques réserves, déception ou trucs que j'ai moins aimé ...

D'abord, le personnage de Grace, mère de June ne m'a pas fai embarqué. non pas parce que la comédienne n'était pas bonne, mais par ce que le metteur en scène a fait de cette femme que je voyais dure, grugée par la vie, bref pas matante* douce et démontrant tant de fragilité. Et je partage l'avis du blogger sur son accent.

* je trouvais pas d'autres mots, je fais référence au caractère, au costume ...

Ensuite, je dirais que j'abonde avec les commentaires sur la présentation de l'univers partagé entre le symbolisme et le réalisme ... beaucoup a déjà été dis sur le sujet.

Mais comme j'ai certaines impressions que j'ai beaucoup de difficultés à décrire ou à expliquer, je finirai sur mes coups de coeur :

-Un Omer tellement captivant, juste et auquel je croyais tellement, j'aurais bien voulu qu'il soit mon oncle ou avec un lien de ce genre!!!

-La scène, tellement belle, captivante, touchante, un moment de théâtre qui fait du bien, la scène d'Omer et Dalida mentionnée par Yoyo lorsque Dalida pleure la présence de son homme.

-Sans vouloir choquer ... Une June posant presque nue sur une plaque tournante vraiment belle, un beauté extraordinaire! Et la fragilité de cette même June qui m'a fait pleuré à la fin ....

Voila


Serge Lapierre a dit…

Que de courage en effet! Dans ce milieu si vaste et incestueux qui est le nôtre, nous allons critiquer et remettre en question le travail de nos pairs pour imposer notre vision de ce qu'est le théâtre. Ce qui aurait dû ou devrait être fait, le comment et le pourquoi, et surtout avec qui et dans quel contexte on le fait...

Foutaise! Je vous ai vu toi et Guylaine utiliser des corps pour en faire des objets marionnettique et vous vous questionnez sur la pertinence d'un objet qu'on fait figurer comme corps! Avec cette démarche, ça ne m'étonne pas que vous voyez le striptease "marionnettique" comme élément central de la pièce. Et bien non, l'élément central de la pièce est l'histoire que Dalida nous raconte, la sienne, sa résilience liée au destin tragique de June par le fait même l'histoire de June.Il eu été simpliste et voyeur de ma part de postionner le striptease au centre de ma scénographie. Parce que voyez-vous, je travaille avec une équipe de concepteurs pour qui la priorité, lorsqu'on fait de la création, est de rendre justice au texte, nous ne sommes pas en mode relecture, restructure, ou "dénature" de l'oeuvre, juste lecture. Ça fait presque 20 ans que je fait le métier et périodiquement sort un universitaire qui a tout compris, qui est la fois comédien, auteur, metteur en scène, marionnettiste, vidéaste, scénographe, costumier et critique. C'est correct, c'est le propre de la vingtaine d'explorer son potentiel et l'université vous a formé pour ça. Mais elle ne fait pas nécessairement de vous des artistes... Le défi c'est de durer et choisir un ou deux champs d'action; Danis a choisi l'écriture, Nadeau l'éclairage, Soucy le costume, Lefrançois la marionnette et ils sont bons. Peut-être que toi finalement c'est la critique puisque la seule chose de positif dans ce spectacle semble être le lien qui t'unis à Christiane Laforge.

P.S. Tu n'es pas le seul abonné à la revue Jeu, sache que si tu veux consulter, on a les exemplaires à partir du num. 1 publié en 1976.


Lyne a dit…

Bonjour Dario!

Bonjour à ceux et celles qui se sont joints à la discussion.. :)

Je voudrais dire à Dario que je trouve son site très intéressant pour le devenir et l'acutalité de la théâtralité dans la région, lâche pas.!.

Pour ce qui est de ta vision de la pièce que tu as vue le soir où tu es venu, tu as le droit. Il est possible que tu n'étais pas disposé de soir-là, à recevoir cette histoire qui, peut-être a pu te déstabiliser de par son titre, sa publicité, sa stratégie marketing, ses critiques, etc.. En fait, on arrive souvent au théâtre avec des attentes que l'on n'arrive pas à combler. Une mise en scène, une conception de décors, de costumes, d'environnement sonore peuvent se questionner ad vitam eternam sur un travail de création. Malheureusement, il faut intégrer ce travail dans des limites de temps, de budgets, de chimie humaine, d'organisation et d'accessibilité au public. Les résultats peuvent être critiqués, commentés, expliqués.. Il n'en demeure pas moins qu'il reste un travail de création de toute une équipe et qu'il faut en regarder ses bons et ses mauvais côtés dans un contexte de recherche d'une théâtralité contemporaine qui expose ce que nos jeunes auteurs ont à dire à leur public et aussi à travers la lunette d'un metteur en scène de talent et d'une humanité remarquable, qui a su traiter dans le respect des scènes qui auraient pu être traitées de façon centrale ou vulgaire.

J'ai un parti pris, évidemment. Mais aussi un recul particulier, par la position que j'occupe en tant que gestionnaire de cette compagnie. J'ai le devoir de m'assurer d'une qualité de rendu et de laisser une latitude de création optimale aux créateurs dans un contexte de restrictions budgétaires et un soucis de professionnalisme. J'aime bien ce débat. Au plaisir de lire d'autres commentaires.


madame chose a dit…
Après avoir lu le commentaire de Serge Lapierre je me dois de réagir puisque je le trouve très méprisant envers ceux qui sortent de l'Université. Étant moi-même issu du BAC INTERDISCIPLINAIRE en arts (qui nous permet d'explorer plusieurs avenues) j'aimerais lui rappeler que la plupart n'ont pas sa chance ni celle d'Alexandre Nadeau,soit celle d'avoir un bon emploi dans son domaine. La plupart travaille à contrat en plus d'occuper un emploi qui n'a souvent aucun rapport avec le champ d'étude. Mais il faut bien survive et c'est souvent le prix à payer quand on choisit de travailler dans le domaine des arts.

Moi je te félicite Dario d'avoir eu l'audace d'afficher tes couleurs. Je pense qu'ici au Saguenay on a peur de se critiquer entre nous de peur de ne plus travailler. En fait, je crois qu'il faut être capable de prendre la critique ; selon moi c'est ça qui nous fait le plus avancer en tant qu'artiste.


Yoyo a dit…

Bon, par où commencer.

Je tiens à réaffirmer que j'ai écrit ce commentaire sans arrière pensée... et surtout pas dans le but de dénigrer le travail des autres. Je sais ce que c'est que la création... Je sais, je reconnais, apprécie et salue bien bas l'effort fournie par toute l'équipe... comme toutes les équipes qui osent monter sur scène, qui se commettent dans le milieu théâtral et qui, bien que personne ne partage la même vision, permettent de partager des idées.

En aucun cas il ne s'agit de faire un procès d'intention... loin de là...

Les «pourquoi» que je pose ne sous-tendaient pas que j'aurais fait autre chose ou que je trouvais cela mal fait... Ce sont des questions disons... sémiologiques... auxquelles les différentes réponses fournies colorent la compréhension «post-représentation» et en enrichissent le sens. (D'ailleurs, comme praticien, je trouve que dans toutes les troupes de la région, nous avons rarement accès au «cheminement créatif» des concepteurs... Nous avons le produit fini. Par exemple, dans les programmes d'autres compagnies, se trouvent souvent des entrevues avec les concepteurs...)

Ma démarche artistique (si je puis m'exprimer de la sorte!) marque ma vision personnelle du théâtre, oui. Je le concède... Comment pourrait-il en être autrement? Mais elle ne me rends pas aveugle à celles des autres. Je n'ai pas la prétention de m'imaginer détenir la Vérité. Je crois profondément en la diversité.

Pour tous les spectacles que j'ai vus et dont j'ai parlé sur ce blogue (Guerre, KAPOS, Pièces Montée, L'Illiade, L'Opéra de Quat'sous et le Déluge et les autres si autres il y a), j'ai essayé de réfléchir sur ce que je comprenais, sur ce qu'y m'échappait. Jamais je n'ai fait de catégorisation BON ou MAUVAIS. Ce n'a jamais été mon but et ne le sera sans doute jamais.

Non, je n'ai rien écrit sur mes spectacles à moi (du moins pas dans le style) pour la simple et bonne raison que le recul est inexistant et que j'en suis probablement le spectateur le plus exigeant et le plus critique. J'ai tenté, avant les Fêtes, de faire de l'espace pour recevoir des commentaires à la suite de l'un d'eux (voir le 7 décembre)... mais le débat a vite virer à autre chose.

Dans tout ce qui se dit et se parle présentement, un point m'a toutefois été soumis et je le reçois bien humblement, et avec embarras... Il s'agit de mon statut dans le «paysage théâtral» saguenéen. J'ai commencé ce blogue il y a déjà quelques mois... Je l'ai fait (et je le fais encore) à titre purement personnel. Cependant, oui, je suis directeur artistique d'une compagnie, le Théâtre 100 Masques... J'ai toujours écrit sans jamais songer à ce point. Je n'ai jamais engagé la place de la compagnie dans ce qui serait convenu d'appeler «billets d'opinion»... Non seulement je ne l'ai jamais engagé, je n'y ai jamais pensé! C'était seulement moi... moi aimant le théâtre.

Peut-être suis-je décalé par rapport au milieu... Peut-être suis-je trop imprégné de mon «jumelage prolongé» avec l'UQAC... mais je crois encore que la discussion théâtrale peut (et devrait) prendre le terrain de la pratique. Pas pour détruire. Pas pour dénigrer. Pas pour se venger ou se critiquer gratuitement. Juste pour se dynamiser. Explorer... ce que d'aucun appele «évoluer».

Lyne a dit…

Tu as raison Dario, le discours autour de la création et de la conception des spectacles peut être très enrichissant. Toutefois, lors de la sortie d'une production, je pense qu'il faut un minimum de délicatesse et annoncer notre but s'il est d'ouvrir la discussion. Je pense bien naïvement qu'il faut s'aider entre nous. Ne montrer que le négatif des choses, peut influencer sur la décision d'une personne d'assister ou non à une représentation. Tu offres une fenêtre sur le théâtre et comme sûrement bien d'autres, je t'accorde une bonne crédibilité. :)


Yoyo a dit…

@ Lyne: J'en prends bonne note.


Yoyo a dit…

Voici un exemple de ce dont j'aimerais (aurais aimé!) parler... Quand Serge écrit que «l'élément central de la pièce est l'histoire que Dalida nous raconte, la sienne, sa résilience liée au destin tragique de June par le fait même l'histoire de June», il s'agit bel et bien de choix conscient de point de vue qui explique beaucoup de choses... dont la raison qui explique sa présence physique (et scénique) au centre de ce monde. Si je comprends bien, dans ce cas, June devient le prétexte?


marilune a dit…

Puisque personne semble vouloir poursuivre la discussion, j'ai bien envie de le faire!

Moi c'est comme ça que je l'avais vu.

Puisque j'avais lu le texte, peut-être que cela était plus évident à la lecture, sans vouloir dire qu'ils n'ont pas réussi sur scène parce que là aussi je l'ai vu.


L'histoire est celle de Dalida, mais aussi du village et surtout comment tout ce qui persiste là depuis 20 ans changera par la venu du personnage de Patrice (dont le nom m'échappe.

Mais June est l'élément central des maux de Dalida.


Yoyo a dit…

C'est drôle (et intéressant!)... pour moi, Dalida est en quelques sorte un «vide» dans le sens où sa personnalité (sauf la scène d'amour entre elle et son mari) s'efface pour June, pour l'histoire de June... Par son effacement, Dalida devient un dédoublement de June.
June est le centre... et le reste, l'histoire du village, de ses femmes, de Grace, de Dalida, de Denis ne sont que des ramifications... un peu à l'image d'un soleil (ou d'une étoile)... D'ailleurs, n'est-elle pas décrite comme étant l'enfant (ou l'amante) du Soleil?


Placer Dalida au centre change mon point de vue... Intéressant.


Yoyo a dit…

Ce matin paraît le Griffonier (journal de l'UQAC) dans lequel, sous la plume de Yves Whissel, se glisse un bon papier sur le spectacle (p.11).


Béru a dit…
Comment ne pas finalement réagir à tout ce qui a été dit sur Le déluge après. Après autant de commentaires il est difficile de reprocher à notre hôte sur ce blogge d'avoir provoqué cette discussion. Malheureusement il m'est impossible d'imaginer le milieu théâtrale québécois se critiquer avec autant de virulence et d'indélicatesse. D'insensibilité aussi envers les praticiens de la pièce de la part d'un autre praticien et sur la place publique...? Mon dieu, cela pourrait devenir sanglant. Chacun son métier. Il est difficile de m'imaginer critiquer le dernier spectacle que j'ai vu comme cela a été fait pour le miens. Je ne travaillerais probablement plus. Surtout si je donne mon opinion personnelle sur chaque acteur. « Peut-être est-ce dû finalement à un problème de mise en scène/direction d'acteur. Comme par exemple, charger le jeu de Monique Gauvin (par ailleurs fort intéressante... et magnifique chanteuse) d'un lourd accent anglophone finit par détourner l'écoute pour assommer l'attention du spectateur à ce qu'il est dit. Ou bien diriger le jeu de Richard Fréchette lors de sa première (et longue!) apparition à la «olivier-guimond-qui-joue-l'homme-saoûl» finit aussi par nous (me) saouler. Les présences d'Émilie Bouchard-Jean, de Patrice Leblanc et de tous les autres, quoique parfois touchantes, ne permettent pas d'esquisser un projet d'ensemble clair, une ligne directrice à ce spectacle... et ne nous mènent guère vers cette exquise sensualité annoncée. La seule qui y parvient, en fait, est probablement Dalida-Johanne qui pleure-de-joie la présence soudaine de son Omer-Richard. » Mais qu'il est drôle de penser que j'aurais comme metteur en scène imposer l'accent anglais au personnage de June! C'est dans le texte! Je sens ici que l'on cherche à tout prix à me critiquer. Pour un metteur en scène, une critique à un acteur c'est une critique pour lui. Richard Frechette a fait un travail formidable sur cette production, il a joué un Omer homme-enfant sincère et aimant et son numéro de départ... Quand on joue gars saoul raide dans un bar qui débloque parce qu'il braille devant la danseuse, on a forcement l'air d'Olivier Guimont. Et qu'est-ce qui a de mal à aimer ce genre de numéro? L'art populaire c'est la base. J'ai le sentiment que l'écoute agressive d'un praticien au théâtre nuis à sa compréhension du spectacle. Il faut un brin de sentiment et d'ouverture pour suivre la douceur de cette fragile June... Si l'on n'est pas touché par quelque chose c'est la plupart du temps parce que cela ne nous concerne pas. Ou l'on ne connait pas. L'écoute d'un spectateur normal est beaucoup plus agréable que celle d'un metteur en scène qui cherche des défauts.

Je tends vers cette écoute, car sans elle je ne survivrais pas. Il y a toutes sortes de théâtre comme il a tant de styles de peintures, on ne peut les apprécier tous, mais on doit à tout le moins les respecter.

Les choix dans la pièce sont justifiables par moi et mes concepteurs, nous pourrions vous faire un rapport écrit avec notes explicatives si vous voulez, si vous êtes du genre à lire la note sur le petit carton à côté du tableau dans les galeries d'arts. Mais je vous encouragerais plutôt à vous en faire votre propre idée. L'exercice est meilleur pour l'esprit.


mercredi 16 janvier 2008

Petite histoire du théâtre régional

À ceux pour qui l'Histoire à du sens, à ceux pour qui l'inscription du théâtre (et du domaine culturel) dans la région à aussi du sens, je conseille fortement la lecture d'un dossier paru dans la revue ESSE entre 2001 et 2002, sous les plumes recherchées de Michel Lemelin et Christine Martel: La Culture d'un Royaume.

On y apprend, entres autres, l'importance du Théâtre Capitol, dans le centre-ville de la rue Racine (dont j'ignorais complètement l'existence) dans les années 20 jusqu'à je ne sais quelle date... Curieux, j'ai trouvé cette description sur le site de la Société historique du Saguenay.
Collection SHS, carton # 197

À partir de 1913, Chicoutimi possède son théâtre connu sous l’appellation de théâtre Populaire. Construit sur la rue Racine, il abrite un cinéma et une salle de théâtre qui peut accueillir jusqu’à 400 spectateurs. En janvier 1926, on le remplace par un nouveau théâtre beaucoup plus spacieux et luxueux.Érigé au coût de 85 000 $ par l’entrepreneur Robin de Chicoutimi, le nouveau théâtre de Chicoutimi logera jusqu’à 630 personnes. Le théâtre Capitol constitue à l’époque un vaste complexe culturel qui, en plus de présenter des concerts, du théâtre et du cinéma, loge dans des salles attenantes une salle de billards, une salle de quilles et un aréna. Richement décoré, ce théâtre fait la gloire de Chicoutimi avec des invités de marque tels que Fernandel, Tino Rossi et Charles Trenet. Ce dernier dira même en entrevue à Montréal « à Chicoutimi, j’ai trouvé bien mieux qu’ici. Vous auriez tout intérêt à voir ce théâtre ». malreusement, le Capitol sera démoli au début des années 1990.

Si j'ai bien compris, ce bâtiment à été démolli... ô surprise... le Patrimoine survit toujours aussi bien de nos jours. Mais si quelqu'un peut me dire sa location exacte, je serais fort enchanté.

Donc, dans le dossier de la revue ESSE, on suit l'évolution du théâtre au Saguenay Lac-Saint-Jean... de la période disons amateure et académique... C'est la création d'une troupe au Séminaire de Chicoutimi par l'abbé Philippe Fortin, en 1929 (troupe qui durera une trentaine d'année) et qui, dans les années 40, révélera le talent d'un certain Ghislain Bouchard. C'est la création, par ce même Monsieur Bouchard, beaucoup plus tard de La Marmitte (avec les Louise Portal, Michel Dumont, Marie Tifo, etc.) ... à la période faste des années 60 et 70 où les troupes régionales (dont la plus connue à l'époque est le Théâtre Populaire d'Alma - qui a fermé définitivement les livres en 2003 - avec Michel Côté et Marcel Gauthier) font des tournées provinciales, participent à de nombreux festivals et reçoivent de nombreux prix nationaux. En 1978, c'est l'implantation du certificat en théâtre à l'UQAC par Rodrigue Villeneuve (qui accueillera comme professeurs Marie Laberge qui écrira sa première pièce, Ils étaient venus pour pour répondre aux besoins de la première production, Gilles Maheu, Larry Tremblay) ... suivi par la professionnalisation du milieu.

Bien entendu, ce bref résumé oublie de larges pans de cette histoire passionnante...

Si je parle de cet article précisément, c'est qu'à sa lecture, on y retrouve des événements, des tentives pour réunir l'ensemble du milieu autour de projets rassembleurs pour son bon développement, chose qui manque peut-être aujourd'hui...

Que l'on songe à la foire culturelle organisée par Ghislain Bouchard dans les années 60 (la première année, 4000 spectateurs se sont déplacées... 25000 six ans plus tard!)... à sa reprise par Rodrigue Villeneuve et l'UQAC à la fin des années 70 (?)... à la fondation du Regroupement des troupes de théâtre du SLSJ en 1980 (qui ne fera pas long feu apparemment)... ou à la Maison Carrée des Têtes Heureuses qui constituaient un véritable lieu de création... à l'époque, on cherchait à unir, à s'implanter dans cette communauté... Le fait-on encore aujourd'hui?

lundi 14 janvier 2008

LE RIRE DE LA MER...journal d'une mise en scène - 1


La première fin de semaine de répétitions est passée au Mic-Mac. Il est si difficile de commencer un projet... et si grisant lorsque celui-ci est mis en marche.

Après une réunion de production soutenue et stimulante, une réunion qui a vite fait place à l'emportement et aux idées de grandeurs (de celles qui font qu'un projet garde toujours en mode «recherche»!), nous avons exploré l'idée du vide théâtral comme principe scénographique... pour finir avec une scène couverte de 450 boîtes (d'après un calcul savant)! Les incidences d'un tel revirement se sont vite manifestées l'heure suivante lorsque la mise en scène s'est esquissée: l'espace est non seulement réduit... mais il est extrêmement massif... surtout quand les treize (vive les superstitions!) comédiens entrent en scène. De cette réunion sont sorties aussi quelques images, quelques références qui serviront de cadre: le théâtre d'Épidaure, la bande dessinée, Harry Potter, les blocs d'enfants... le tout conjugué avec ce que je veux faire de ce spectacle, véritable exercice d'imagination et de conception

Bref, il a fallu apprivoiser l'idée.

Le début d'un tel chantier se voit aussi investi d'une mission fondamentale: vendre le projet aux participants, les allumer, leur donne envie de s'investir dedans. Il faut donc aplanir les rancunes et/ou les envies non-comblées, négocier les présences, expliquer les motifs de long en large, répondre aux soupirs, aux questions, ouvrir les esprits... tout en demeurant enjoués, sensés, cohérents et dynamiques. Il faut créer l'ambiance, devenir une source de plaisir (!), être à l'écoute de tout ce qui se passe dans la salle. Il faut par la suite tester les idées de départ... et réagir au besoin.

Bref, la première journée fut animée... pour se terminer malencontreusement dans le doute.

Car ce spectacle, Le rire de la mer de Pierre-Michel Tremblay, offre la possibilité (que nous avons prise!) de travailler le choeur. L'utilisation de celui-ci reste à définir... disons plutôt à peaufiner. Je veux un choeur. Je veux que celui-ci devienne aussi scénographie, interlocuteur, accessoire... Toutefois, après quelques heures de travail, de création chorégraphique, de création sculpturale comme je peux parfois le faire, il m'est apparu de façon viscérale que je faisais fausse route, que le départ se faisait sur une mauvaise base... que ce qui se créait était non seulement rigide... mais aussi déjà-vu (dans mon travail).

Une insomnie... un nouveau matin...

Dimanche, nous avons recommencé. Nous avons clarifié et testé autrement le rôle du choeur, sa façon d'être sur scène, sa personnalité. Nous avons esquissé de nouvelles mises en place scène/choeur... et surtout, nous avons beaucoup ri... Déjà, une esthétique se dessine, un ton s'impose peu à peu.

Après deux jours de répétition, sont placés le prologue ainsi que les scènes 1 à 4... Des questions sont encore en suspens: le décor (les boîtes... du moins, la forme de leur présence scénique!), la musique (j'hésite entre le Dean Martin du texte ou autre chose... ou le rien...)... Prochaines répétitions: 26-27 janvier...