samedi 16 juin 2012

Une histoire étymologique du théâtre


 Bien que je ne sois pas un grand fan (du moins, un grand connaisseur) de l'école de pensée théâtrale américaine, je dois reconnaître que la lecture de l'un de ses éminents avant-gardistes, Richard Schechner (et son ouvrage Performance - Expérimentation et théorie du théâtre aux USA, réussit à m'intéresser à chaque fois. (D'ailleurs, lors de l'atelier sur la recherche-création en milieu universitaire qui s'est tenu au début du mois de juin, on m'a chaudement recommandé d'approfondir cette voie américaine dans la redéfinition de la théâtralité/performativité...)

Feuilletant donc ce bouquin à la recherche d'un passage que j'avais noté dans mon carnet, je tombe sur celui-ci  en page 468 qui, en quelques lignes, donne la mission fondamentale du théâtre en passant par l'étymologie (qui aurait pu être écrit par le professeur de La leçon de Ionesco!):

Avant d'aller plus loin, revenons sur la notion occidentale de théâtre. Le terme «théâtre» s'apparente à théorème, théorie, théoricien et autres termes du genre, issus du grec theatron, de thea (une «vue») et de theastai («voir»), aussi apparenté à thauma («quelque chose qui attire le regard, une merveille») et theorein («regarder»). Theorein  est apparenté à theorema, «spectacle» et/ou «spéculation». Ces termes auraient pour racine l'indo-européen dheu ou dhau («regarder»). La racine indo-européenne de Thespis, nom du légendaire initiateur du théâtre grec, est seku, qui signifie «remarque» ou «adage», et sous-entend une vision divine. De seku viendraient les termes anglais see («voir»), sight («vue») et say («dire»). Ainsi, le théâtre grec, et tous les théâtres de type européen qui en dérivent, sont des lieux où l'on va pour voir et dire, et d'où l'on voit et dit. Ce type de théâtre, tout comme le cinéma et la télévision qui en sont des dérivés, est caractérisé par sa spécularité, ses stratégies du regard.

C'est là l'un des paradigmes essentiel du théâtre... mais, comme je l'ai déjà écrit quelque part (pour être plus précis), certains - comme Castelluci - le surpasse pour faire du théâtre contemporain non plus un lieu où l'on voit mais plutôt le lieu où l'on montre...