mardi 4 juin 2024

De la «réplique» à l'«implique»


On en a marre des répliques qui veulent tirer les vers du nez à une autre réplique au lieu de crier elles-mêmes le secret qu'elles connaissent. Il faut charger toutes les douilles vides avec de l'explosif jusqu'au bord. Il faut contraindre chaque phrase prononcée par un acteur d'être
complète, enfermée sur elle-même. [...] On remplace ici des répliques qui répliquent par des impliques qui s'impliquent en-elles-mêmes et qui ne répliquent plus à personne. [...] Je déteste le dialogue qui permet à n'importe quel crétin d'avoir son mot à dire. [...] Chaque implique se défend solitaire, car elle garde confiance dans la force de celle qui suit. Toute répartie est murée vivante dans son soliloque étroit[...] Chaque implique est le contraire d'un dialogue et non l'élément de sa composition. En additionnant des impliques on n'obtient pas des dialogues, mais des multilogues, des polylogues. 
(Isidore Isou, Oeuvres de spectacles, Gallimard, 1964)

C'est là, je trouve, un concept bien intéressant que celui de l'implique. Particulièrement pour le théâtre dit contemporain. Ça modifie le rapport au texte en ce sens où la parole ne fait plus avancer une action mais est action en soi

(Pour savoir qui est Isidore Isou, dramaturge et poète, c'est ici.)