vendredi 31 août 2012

Une lettre de Peter Brook à M. Howe* expliquant comment on devient metteur en scène...

Peter Brook dans son théâtre (enfin, si c'est encore à lui), Les Bouffes du Nord...

«Votre lettre arrive à l'improviste et me met dans une situation difficile.
«Vous me demandez comment on devient metteur en scène.
«Les metteurs en scène de théâtre se nomment eux-mêmes. Un metteur en scène au chômage est un paradoxe, de même qu'un peintre au chômage - mais pas comme un acteur au chômage, qui est victime des circonstances. On devient metteur en scène et ensuite on persuade les autres que c'est vrai. [...] Je ne connais pas d'autre moyen si ce n'est convaincre des gens de travailler avec vous et de se mettre au travail - même sans être payé - et de présenter ce travail à n'importe quel public [...]. L'énergie mise en oeuvre est plus importante que n'importe quoi d'autre.
«Que rien ne vous empêche donc de vous lancer, même dans les conditions les plus sommaires, plutôt que de perdre votre temps à chercher de meilleures conditions que vous ne trouverez peut-être jamais. Au bout du compte, le travail appelle le travail.
«Bien sincèrement.»

Voilà encore une leçon  de Peter Brook. On reconnaît là tout ce qui fait de ce praticien-théoricien un grand du théâtre contemporain: la passion et l'humilité. 
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* Publiée dans Points de suspension, éditions du Seuil, 1992.

jeudi 30 août 2012

Poids lourds

The Bedroom, Fernando Botero, 1999

Voici une anecdote rapportée* par André Pougin dans Acteurs et Actrices d'autrefois qui illustre encore une fois toute une époque théâtrale aujourd'hui révolue...

Cette actrice [Léontine], qui avait pris un embonpoint un peu excessif, fut un soir, par ce fait, l'héroïne d'une aventure assez bizarre. Dans un petit vaudeville qui commençait le spectacle, elle jouait une grisette, dont l'amant, un étudiant, était représenté par un jeune acteur qui s'appelait Morand. À un moment donné, la grisette se trouvait mal dans la chambre de son ami, et au même instant on frappait à la porte en appelant, et l'étudiant reconnaissait la voix de son oncle. Troublé et embarrassé, l'amoureux devait prendre la jeune femme dans ses bras et la porter dans un cabinet noir. Or, Morand était petit et pas très fort; en s'exerçant pourtant, il était parvenu, par un élan bien combiné, à enlever assez heureusement la volumineuse Léontine. Mais voilà qu'un soir il manque son coup, et qu'après avoir vainement essayé une première fois, il ne réussit pas mieux; il veut s'y reprendre encore, mais toujours sans succès, et alors, tandis que la salle se tord en voyant l'inutilité de ses efforts, un titi lui crie gravement du haut du poulailler:
-T'es bête, Morand, fais deux voyages!

Ce n'est pas très édifiant au point de vue intellectuel... ni au point de vue artistique. Mais tant pis.
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* L'anecdote se retrouve dans le Dictionnaire de la Langue du théâtre d'Agnes Pierron.

mercredi 29 août 2012

La Soirée des Masques 2


Ai assisté, hier soir, à l'une des plus belles soirées bénéfice tenues par un organisme de création théâtrale des dernières années. 

Le Théâtre C.R.I. a réussi fort un bon coup en proposant La Soirée des Masques... où près d'une cinquantaine de masques, réalisés par tout autant d'artistes (parmi eux, quelques grands noms du milieu théâtral québécois, quelques grands noms du théâtre saguenéen, quelques grands noms des arts visuels, quelques grands noms de la relève) ont été mis aux enchères. Des masques fabuleux que l'on peut voir ici.

Une CRIée (avec des voix qui foisonnent de partout pour faire monter les enchères) dynamique. Vive. Stressante! Menée, pendant deux heures, avec panache par un trio flamboyant: 'Ean Canteur (Patrice Leblanc), son assitante Magdala (Vicky Côté) et le Maître de cérémonie (François Tremblay). 

La participation de la soixantaine de spect-acheteurs a été sans faille et s'est maintenue tout au long de l'activité, avec des pointes à près de 350$ pour des œuvres qui en méritaient plus encore! Les quelques masques qui n'ont pas trouvé preneur (je crois que, de mémoire, il n'en reste que 3 ou 4...) pourront être achetés dans les prochains jours, prochaines semaines, lors des activités du Théâtre CRI.

Une levée de fonds qui, avec un calcul rapide, a dû dépasser largement les objectifs! 



mardi 28 août 2012

La Soirée des masques

Ce soir, c'est l'activité bénéfice du Théâtre C.R.I., La Soirée des masques... un 5 à 7 où une quarantaine de masques, réalisés par tout autant d'artistes à partir d'un masque neutre, seront mis aux enchères. Un concept fort... Au point où je dois avouer que je suis terriblement jaloux de cette idée qui aurait si bien fonctionné avec le nom même de ma compagnie, le Théâtre 100 Masques!

Tant pis! À défaut de l'avoir eu en premier, j'ai cependant eu bien du plaisir à en faire un - tout comme Cindy Dumais, Andrée-Anne Giguère, Sara Moisan, Éric Chalifour, Daniel Danis, Lyne L'Italien, Serge Lapierre, Anick Martel, Émilie Gilbert-Gagnon et plusieurs autres... :


Après l'avoir titré Du vrai sens de l'expression «brûler les planches», j'en suis venu à quelque chose de beaucoup plus court, Neutralité à 450°F, directement relié à la méthode de confection.

J'ai pu voir tous les autres masques au cours d'une exposition itinérante qui s'est tenue dans les derniers jours. Il y en a de vraiment très très beaux! De véritables petites œuvres d'art. Des œuvres d'art qui, au final, donne parfois des complexes!

lundi 27 août 2012

C'est la rentrée!


Ce matin, c'est la grande rentrée pour les étudiants de l'UQAC. Alors, à tous les étudiants (mais plus particulièrement ceux du BIA en théâtre...) de même qu'à tous les professeurs, chargés de cours et techniciens qui préparent la relève, 

BONNE RENTRÉE!

vendredi 24 août 2012

Du violet comme d'une malchance...


Tiens.. Le violet serait néfaste... Une autre superstition théâtrale... un peu moins connue... même si j'en ai déjà glissé un mot quelque part, dans cette série de billets portant sur le sujet. Voici comment on aborde cet interdit dans le Dictionnaire de la langue du théâtre:

Violet: Couleur faisant l'objet d'un interdit sur la scène, en Italie. Peut-être parce qu'elle évoque le clergé et, qu'en Italie, le violet a trouvé sa place au Vatican. Le vert ne serait pas prohibé en Italie comme il l'est en France, parce que dans «vert», on entend Verdi (Giuseppe Verdi, 1813-1901), le musicien dont il est dit qu'il a réinventé le théâtre. C'est donc le violet qui est interdit au pays des lazzis, de la commedia dell'arte, parce qu'il évoque aussi la mort; le violet n'est-il pas la couleur du demi-deuil?

Le violet a eu sa place sur la scène française. C'est la couleur des sympathisants de l'Empereur; ainsi Mlle Mars (1779-1847), qui lui demeura fidèle, se para souvent de violet, n'hésitant pas à paraître sur scène avec un bouquet de violettes accroché à son corsage. Ce type de bouquet semblait même si inoffensif et si courant dans les moeurs théâtrales qu'Adrienne Lecouvreur (1692-1730), en recevant un au théâtre, n'hésita pas à le respirer, au point qu'elle en mourut: le bouquet était empoisonné.

On en apprend tous les jours...

jeudi 23 août 2012

D'un dépliant à venir...


Lors de la tenue du dernier Forum sur le théâtre au Saguenay-Lac-Saint-Jean, il a été convenu, pour augmenter la visibilité du milieu théâtral régional, de créer (du moins, pour la première année) un dépliant qui annoncerait la saison théâtrale 2012-2013. 

Dix compagnies pour autant (voire plus!) de productions! Un portrait global d'une région éloignée qui foisonne avec l'apport de nombreux artistes et artisans!

Depuis quelques semaines, le comité en charge de ce projet de concertation - parce que c'en est un! - s'active afin de lancer le produit final d'ici la mi-septembre. Déjà une maquette circule entre les compagnies en vue de validation. Elle est le fait de Christian Roberge qui signe, depuis nombre d'années, la plupart des décors et affiches du Théâtre Mic Mac, à Roberval.

Ce dépliant (qui pourra éventuellement se décliner sous différentes formes et sur différentes plate-formes) sera distribué, pour une première année, à quelques 10 000 exemplaires.

Décidément, le milieu théâtral d'ici s'unit de plus en plus... et je pense sincèrement que c'est bien.

mercredi 22 août 2012

Les claqueurs...

Je pense que je vais tenter de redonner ses lettres de noblesse au métier de claqueur!... Un autre élément spectaculaire venu des siècles précédents... tel que présenté ici par Théophile Gauthier dans son Histoire de l'art dramatique depuis vingt-cinq ans.

Ces artistes doivent travailler quatre heures tous les matins pour arriver à une telle perfection! Parmi la section des rieurs, il y a vraiment des sujets fort distingués! Comme ils partent juste sur la réplique! Comme aux endroits indiqués, ils se tordent sur les banquettes, demandant grâce, pâmés d'aise, se tenant les côtes, trépignant, suffoqués, étranglés, aboyant un bravo convulsif! Nous avons vu là des chefs-d'oeuvre de mimique. [...] Heureux claqueurs, qui admirent tout! Comme ils sont supérieurs aux critiques, qui n'admirent rien! Ils ne se nourrissent pas serpents, ils ne s'abreuvent pas de fiel, ceux-là; ils sont rubiconds au lieu d'être verdâtres, et vivent dans d'éternels transports.

lundi 20 août 2012

C'est reparti...


Les vacances sont véritablement terminées. Il faut maintenant revenir au travail... avec un dossier de taille à terminer: l'établissement de la programmation annuelle du Théâtre 100 Masques (bon, elle est déjà prête depuis quelques semaines) et surtout, le cadre financier nécessaire à son exécution.

C'est la période des choix. Des grandes lignes. Des calculs et des casses-têtes.


dimanche 19 août 2012

Extravagance scénique

Voici une description savoureuse de costumes traditionnels pour un ballet... Celle-ci date de 1802... mais remonte plus loin dans le temps. Malheureusement, je n'ai pas pris le temps de chercher l'origine exacte. De toute façon, là n'est pas le propos... Il est plutôt dans l'imagination déployée par ces artisans pour bien faire comprendre les personnages!

samedi 18 août 2012

«Orphée aux enfers» [Carnet de mise en scène]


Nathalie Dessay et Yann Beuron, dans le Duo du concerto, Opéra de Lyon.

Il y a quelque chose de libérateur, de fondateur, quand après plusieurs lectures du livret d'Orphée aux enfers, quand après plusieurs écoutes du coffret à ma disposition (la même production que dans la vidéo ci-haut, dirigée par Mark Minkovski), quand après des rencontres avec la direction et surtout, avec mes collaborateurs se profile une ligne directrice, le grand principe scénique sur laquelle pourraient s'édifier les jeux de scène et tout l'ensemble esthétique.

Et si nous partions donc du ton général de la pièce (où l'exaspération règne chez tous les personnages) pour l'étendre, par le biais du théâtre dans le théâtre, au contexte même de son énonciation (où l'exaspération règnera tout aussi bien chez les solistes et les choristes)?

Du coup, le potentiel événementiel serait énorme. Les perspectives s'ouvriraient. L'interprétation pourrait prendre différentes couleurs et pourrait s'étendre à de multiples rapports conflictuels avec la lumière, les costumes, la scénographie. La magie théâtrale serait, en quelques sortes, abordée par son absence ou, du moins, par son sabordement...

Cette mise en scène comporterait risque, oui. L'équilibre devrait nécessairement être trouvé afin que toute la construction dramaturgique et scénique soit, d'une certaine façon, un dispositif de mise en valeur du talent des chanteurs et de la beauté de la musique... Mais je crois que le jeu en vaudrait la chandelle...

Bon. C'est bien beau d'avoir les idées... Maintenant, il faut passer des paroles (écrites!) aux actes...

vendredi 17 août 2012

Les écrits restent-ils vraiment?


Il est toujours intéressant, je trouve, de lire les grands auteurs dramatiques de l'histoire... mais plus encore que leur œuvre, ce sont souvent leurs écrits quotidiens qui donnent tout l'éclat d'une véritable passion théâtrale... Comme celle-ci, de la plume de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais, l'auteur très dix-huitième siècle du Mariage de Figaro et du Barbier de Séville , en réponse à une critique de cette dernière pièce, en 1775 (lettre qu'on peut retrouver dans son intégralité dans la préface de la pièce ou, en suivant ce lien de Google Books, en p.87):

Les ouvrages de Théâtre, Monsieur, sont comme les enfants des femmes: conçus avec volupté, menés à terme avec fatigue, enfantés dans la douleur et vivant rarement assez pour payer les parents de leurs soins, ils coûtent plus de chagrins qu'ils ne donnent de plaisirs. Suivez-les dans leur carrière, à peine ils voient le jour que, sous prétexte d'enflure, on leur applique les Censeurs; plusieurs en sont restés en chartre. Au lieu de jouer doucement avec eux, le cruel Parterre les rudoie et les fait tomber. Souvent, en les berçant, le Comédien les estropie. Les perdez-vous un instant de vue, on les retrouve, hélas! traînant partout, mais dépenaillés, défigurés, rongés d'Extraits et couverts de Critiques. Échappés à tant de maux, s'ils brillent un moment, le plus grand de tous les atteint, le mortel oubli les tue; ils meurent, et, replongés au néant, les voilà perdus à jamais dans l'immensité des Livres.

Une belle description, émouvante. Qui rappelle, à quiconque s'intéresse au théâtre, qu'il y a d'innombrables textes qui dorment dans les bibliothèques, dans les cartons, les greniers de vieux bâtiments. Que nombre de pièces ne parviendront plus à revoir la lumière électrique de la scène. Que des dizaines d'auteurs dramatiques même ne sont pas parvenus à traverser l'histoire...

jeudi 16 août 2012

«Orphée aux enfers» [Carnet de mise en scène]

Demain après-midi, j'ai une première réunion de conception en vue de cette production de la Société d'Arts Lyriques du Royaume. Encore une fois, j'ai la chance de pouvoir m'entourer d'une équipe solide avec qui j'ai beaucoup de plaisir à travailler: Christian Roberge à la scénographie et Alexandre Nadeau à la lumière. Jacynthe Dallaire reprend son rôle de costumière.

Sinon, le livret est mis à jour. Quelques coupures... mais dans l'ensemble, il sera pris dans sa quasi intégralité. Sans ajout (si ce n'est de deux airs tirés de la version de 1874).

D'ici là, voici encore quelques extraits de diverses production de la même opérette:

Le premier air d'Eurydice, l'épouse volage, chanté ici par Nathalie Dessay dans la production de l'Opéra de Lyon:


Puis voici le Duo du concerto par Euridyce (Pauline Courtin) et Orphée (Julien Behr)... au Festival d'Aix en Provence, en 2009.


mercredi 15 août 2012

Pour une culture théâtrale approfondie


Le Théâtre 100 Masques proposera, à compter du 30 septembre prochain, un nouveau type d'atelier de théâtre axé d'abord sur la découverte de l'histoire théâtrale puis sur l'exploration des différentes formes dramatiques qui ont marqué les siècles... 

L’heure du théâtre ce seront dix rencontres – autour d’une tasse de thé (différent à chaque fois et en lien avec le sujet du jour…) - qui s’étaleront «de l’Antiquité à l’époque contemporaine»… chaque fois autour d’un texte et d’un auteur emblématiques. Ces rencontres seront animées par des professionnels de la scène saguenéenne.

L’heure du théâtre ce sera une première partie sous forme de conférence ou d’exposé pour bien situer l’œuvre sur la ligne du temps de même que dans la pratique universelle. Images, extraits vidéo, musique… tout pour mettre en appétit les lecteurs avides!

L’heure du théâtre ce sera ensuite une lancée, en groupe, dans la lecture à voix haute du texte choisi… une lecture abondamment commentée par l’animateur qui soulignera les passages marquants, les liens nécessaires à la compréhension, les détails stylistiques. Une expérience riche et amusante à tout coup! Faire du théâtre sans la pression de la scène!

Enfin, L’heure du théâtre ce sera un temps d’arrêt, de partage entre les participants pour discuter de leurs impressions et les aider à pousser plus loin la réflexion… telle une véritable activité de médiation culturelle (À noter qu’à chaque rencontre, une paire de billets de théâtre sera tirée.).

Un moment de culture générale dans le plaisir et la convivialité! Un projet dynamique et différent dans l’offre actuelle! 

Ce projet reçoit le soutien du Conseil des Arts de Saguenay pour les projets spéciaux.

Une reconstitution du «Ballet triadique» d'Oskar Schlemmer

Voici une reconstitution du fameux Ballet triadique d'Oskar Schlemmer (1927) réalisée dans les années 70. Une oeuvre qui me fascine depuis mes cours d'arts au BIA. Cette vidéo représente bien le théâtre tel qu'on le pratiquait au Bauhaus: 

Le Théâtre:
abstrait, formel et coloré

statique, dynamique et tectonique
mécanique, automatique et électrique
gymnastique, acrobatique et équilibriste
comique, grotesque et burlesque
sérieux, pathétique et monumental
politique, philosophique et métaphysique



J'aime bien ces explorations de l'espace, du corps, des interactions et des actions-réactions qui peuvent se développer dans un contexte donné. C'est là, à mon sens, pour un regard contemporain, tout l'intérêt de cette œuvre magistrale de Schlemmer.

mardi 14 août 2012

Une carrière glorieuse...

Je ne me suis jamais vraiment trouvé à l'aise sur une scène. En fait, j'ai même - plus souvent qu'autrement! - détesté m'y trouver. 

Je l'ai fait à l'Université en 1998 et 1999, dans le cadre du BIA (où, en plus de mes cours obligatoires je me suis aussi commis, à l'occasion, dans quelques autres productions). Je l'ai fait une fois avec le Théâtre 100 Masques, en 2002, lors du théâtre d'été Comédies et vaudevilles (où je jouais un journaliste... faute d'argent pour embaucher un autre comédien... pris dans une situation un peu délicate).



Puis je fus longtemps sans monter sur les planches... jusqu'en 2009. Avec les Têtes Heureuses. Car oui, j'ai joué avec cette compagnie. Dans La Cerisaie de Tchechkov. À la toute fin de l'acte II. Un passant... dans le passage (!) suivant:

Un passant apparaît; il porte une vieille casquette blanche et un manteau; il est un peu ivre.
Le passant.  Pardonnez le dérangement, je peux passer par ici pour aller à la gare?
Gaev. Oui, prenez ce chemin-là.
Le passant. Je vous remercie mille fois. (Il toussote.) Quel temps splendide... (Il déclame.) «Frère, ô mon frère de souffrance... descends vers la Volga, dont les gémissements...» (À Varia.) Mademoiselle, permettez à un Russe affamé de vous demander, disons, trente kopecks...
Varia, effrayée, pousse un cri.
Lopakhine (furieux). Il y a des limites à tout!
Lioubov Andréevna (saisie). Prenez... tenez... (Elle cherche dans son porte-monnaie.) Je n'ai pas de pièce d'argent... C'est égal, prenez cette pièce d'or...
Le passant. Je vous remercie mille fois! (Il sort.)

Et c'était fait.

C'est là, en résumé, toute ma carrière de comédien. Jamais de rôle assez conséquent pour que je prenne mon pied. Toujours du par défaut... mais avec, depuis le temps - sans fausse modestie - une bonne expérience du théâtre comme metteur en scène. D'ailleurs, en répétition, je joue beaucoup... et avec plaisir (plaisir qui manque à mes performances publiques).

Alors, aurai-je la piqûre, cet automne, dans ce projet où je ferai partie intégrante d'une distribution? Me découvrirai-je une vocation tardive? Les paris sont ouverts.


lundi 6 août 2012


Au moins une bonne grosse semaine... de «vraies» vacances du théâtre... quoique...

samedi 4 août 2012

Oh! Cabaret

 
J'ai revu, hier soir, l'édition 2012 du Oh! Cabaret (après avoir assisté à la première, le 11 juillet dernier) avec encore le même plaisir.

D'emblée, il faut saluer le talent comique des trois comédiennes - Vicky Côté, Maud Côté et Guylaine Rivard - qui enchaînent les numéros et les personnages avec une énergie débordante et un engagement manifeste. Soutenues par la musique et les apports sonores de Michel Otis, elles déploient sur scène un feu roulant de sketchs qui font rire et sourire.

Certains numéros ressortent évidemment du lot: comme celui - hilarant - du reportage sur un accident survenu au Pavillon du hot-dog et du vox-pop qui présente les clients de la place; comme celui de la crise d'une dame (dans un pastiche de Jean-Luc Mongrain) à propos des listes scolaires de la rentrée; comme celui des trois dames de petites vertus qui se lancent dans un conte à dormir debout. Les autres (dont les solos de chacune des actrices) atteignent aussi la cible facilement.

Les scénarios sont bien écrits... et s'ils s'étirent parfois en longueur, ils gardent tout de même l'intérêt du spectateur par la vivacité du jeu et la folie des situations. La simplicité esthétique règne et, du coup, l'ingéniosité (notamment dans les costumes!) est au rendez-vous. La formule du cabaret (prise au sens de variétés et non au sens politique) est ainsi bien servie: avec peu de moyens, elles réussissent à créer plusieurs mondes, à se renouveler, à se dépasser.

Au fil des représentations (le plaisir de revoir deux fois un même spectacle!), cette production s'est enrichie de mille détails et a trouvé une dynamique plus équilibrée entre la première et la seconde partie pour donner, hier, un résultat solide à la hauteur de la compétence de ses artisans.

vendredi 3 août 2012

«Orphée aux enfers» [Carnet de mise en scène]


C'est là l'un des airs connus (Le galop infernal) d'Orphée aux enfers d'Offenbach... dans la version déjantée de l'Opéra de Lyon! Une version qui ôte les complexes et les présupposés. Une opérette vive, nerveuse, dynamique.

Je suis plongé dans le livret (la version courte de 1858)... et quel plaisir! 

Vers quoi irons-nous (l'équipe esthétique)? L'idée se précise... et se peaufine de plus en plus après quelques rencontres avec la direction générale et la direction artistique.

À noter aussi que cette production se tiendra dans un tout nouvel Auditorium-Dufour rénové... de quoi aura-t-il l'air? Seuls les ingénieurs le savent.

jeudi 2 août 2012

Le règne de la rature et du crayon à mine


Je suis présentement en écriture. Un long monologue manifeste qui devrait, selon toute vraisemblance, trouver son aboutissement scénique quelque part au printemps 2013... Je dis écriture, mais réécriture serait plus juste. Et plus que réécriture, travail de minutie!

Car si l'ensemble est déjà couché sur papier (sur une quarantaine de pages) depuis mars dernier (un travail entrepris en janvier 2010), j'attaque ce qui est peut-être la partie que je préfère: la révision. Pas tant pour les fautes d'orthographe (que je tente de réduire le plus possible) mais pour les ajustements syntaxiques à la recherche du rythme, les arrangements lexicaux pour la sonorité et la précision de l'idée, l'harmonisation de la langue et la fluidité du phrasé.  Rendre vivante cette parole (parce que le but ultime est d'en être une) tout en alignant chacune des ficelles du texte vers un point de fuite qui lui donnera tout son sens.

Je n'ai pas l'écriture facile... En fait, ce n'est pas vrai. Il serait plus approprié de dire que je n'ai pas l'écriture disciplinée. C'est toujours un travail qui s'étale sur une période toujours trop (pour moi) longue... mais voilà, j'entrevois maintenant une échéance...

mercredi 1 août 2012

Le grand théâtre démocratique

Les six principaux partis sur la ligne de départ

Nous y voilà. Le Québec vivra, pour le prochain mois - jusqu'au 4 septembre 2012 - au rythme d'une campagne électorale nationale (déclenchée d'ici le dîner)... sous le chaud soleil d'août.

Déjà, les partis sont campés. Les scénarios sont écrits. Les rôles sont distribués: d'un côté les vertueux et détenteurs de la vérité... de l'autre, les méchants des uns qui seront aussi les méchants des autres.  Les punchs fuseront de tout bord tout côté. Les performances (tant esthétiques qu'orales et gestuelles) seront soumises à l'appréciation des critiques, des commentateurs, des spectateurs.

Que le spectacle commence.

Dramatique. Avec des envolées catastrophistes. Des portraits sombres dressés avec verve et fougue («Texte, émotion» comme dirait l'autre...). Des discours qui feront vibrer différentes fibres selon le public cible... parce que le Québécois sera ça: une cible.

Burlesque. Avec des clowns. Avec des squelettes sortis de placards pour créer des sketchs médiatiques. Des retournements de situations. Des deus ex machina improbables. Des circonvolutions de l'esprit et de la langue pour contourner des obstacles.

Grotesque. Avec des mises en scène électoralistes... Un tel avec des aînés. Un tel avec des ouvriers d'usine. Un tel avec des enfants. Un tel avec des animaux. Un tel dans tel contexte somme toute étrange. Forcé. Surjoué.

Théâtral. Avec de grands rassemblements son et lumière. De grands événements de masse qui se voudront cathartiques.

Mais aussi et surtout, nécessaire. Parce qu'au travers ces éléments qui appartiennent plus à notre domaine qu'au leur, derrière cette façade spectaculaire, il y aura aussi (et peut-être plus cette fois-ci que les précédentes) la présentation de différentes visions de ce que nous sommes, de ce que nous pourrions être, devrions devenir. Nécessaire parce que le choix est important et met la table pour les prochaines années. Nécessaire parce que collectif.

En attendant maintenant de voir les propositions des uns et des autres en matière de culture, une chose est sûre: le 4 septembre, je vais voter.