jeudi 19 août 2010

Le conte bancaire de Piédestal... un solo étrange

Photographie: Paul Cimon

Avec un titre comme Le conte bancaire de Piédestal - titre déjà trouvé il y a quelques mois... soit bien avant le début de la création! -, il était bien difficile de se faire une idée du concept qui se déploierait sous les yeux des spectateurs. Par ailleurs, il faut avouer que ce personnage, souffre-douleur et petit dernier dans les augustes aventures du quinquet, est peut-être le moins connu de par son rôle naturel de faire-valoir... Et soudain...

VLAN! Un bon crochet entre les dents!

Pascal Rioux, l'alter ego de Piédestal, nous arrive avec un troisième solo des Clowns noirs plus que surprenant. Un petit morceau exquis... une comédie étrange qui trouble et dérange.

Car Le conte bancaire de Piédestal se nourrit d'un curieux moteur dramatique pour générer les rires: le malaise... le véritable malaise, celui qui rentre dedans et qui préoccupe l'esprit longtemps après la tombée du rideau... si tant est qu'il tombe...

Pendant une heure, le spectateur assiste aux diverses élucubrations de Piédestal qui, blessé de belle façon par la vie, décide de passer à l'acte et d'organiser une fête pour souligner son départ vers le grand voyage. L'humour est noir; le bouleversement fait son chemin. Le sarcasme n'est jamais loin.

Pour installer l'ambiance, faire participer les gens, il instaure de nombreuses relations avec le public... jusqu'à l'apothéose du spectacle! Une prise à partie des spectateurs terriblement efficace. Une finale comme je les aime: une finale sans appel et sans rappel, c'est le moins qu'on puisse dire! Un conte, oui. Un conte grinçant. Un conte corrosif. Un conte qui suinte le «mal-être»...

Aussi, un conte avec des thèmes récurrents (tant au personnage qu'au Théâtre du Faux Coffre): le naufrage dans la culture, la difficulté de vivre de son art, le manque d'argent... le tout, émaillé de clin d'oeil à l'actualité. Un conte avec une morale? Je crois qu'ici, tout dépend de celui qui regarde... Pour ma part, je trouve qu'il s'agit là d'une illustration habile de la futilité de l'existence où les problèmes n'en sont pas, où tout un chacun est interchangeable, où même la mort devient un jeu de convenances convenues.

Un conte aussi soutenu par la singulière présence de trois de ses accolytes - Grossomodo, Trac et Diogène- qui se parent, compte tenu du fait que Piédestal est en vedette et qu'il garde, en quelques sortes, sa fonction de souffre-douleur, d'une méchanceté visible, perdant, du coup, leur caractère bon enfant...

Avec ce spectacle, Pascal Rioux démontre un réel talent comme concepteur et auteur, tenant des discours profonds et cohérents (notamment sur l'argent), bien structurés et bien exécutés. Il prouve aussi sa grande capacité à agir sans filet, le jeu avec le public pouvant le mener loin... très loin.

Le conte bancaire de Piédestal n'a, finalement, rien à envier aux deux premiers solos présentés antérieurement!