Ceux qui s'écartent du théâtre et le méprisent, sous prétexte qu'il est un art conventionnel, n'y entendent absolument rien. Ils pensent à de bas artifices, à de grossiers truquages qui n'ont rien à voir avec le théâtre vivant. Ce que nous appelons convention est une haute création de l'esprit, un fruit de la culture, l'une des sources éternelles du style. C'est ce qui donne au comique de Molière sa force et son élévation, au tragique racinien sa pureté; c'est le choeur antique et la structure de Nô japonais; c'est la scène de Shakespeare délivrée de l'esclavage du temps et de l'espace sur laquelle l'intensité du drame le dispute à la grandeur de l'épopée. J'appelle convention au théâtre l'usage et la combinaison infinie de signes et de moyens matériels très limités, qui donne à l'esprit une liberté sans limites et laissent à l'imagination du poète toute sa fluidité.
Tels sont les mots inspirants de Jacques Copeau dans le premier tome de ses Registres (et cité dans le Dictionnaire de la langue du théâtre). Une ôde à l'efficacité de la scène. Une quête de la théâtralité (et non du théâtralisme) dans la simplicité. Une confiance absolue dans la forme amenée par le texte sans la surcharge de l'effet, de la vedette, de l'esthétique.