lundi 24 janvier 2022

Du pouvoir dynamique de la lumière


[...] Une œuvre forte rejette d'elle-même le superflu dans le décor, une œuvre plus faible l'appelle au contraire à son aide.

[...] Du côté technique, la lumière est le seul élément dont les progrès pourraient aider le théâtre sans l'appauvrir. Il ne s'agit pas bien sûr de la science des éclairages; je laisse pour ce qu'elle vaut cette déformation de l'élément lumière quand on l'emploie pour obtenir des effets faciles: tableaux de genre, fresque «à l'américaine», clairs-obscurs où les mots ont l'air d'être prononcés par des fantômes. Cela fait partie de cette mise en scène décorative qui se rattache à la conception de la scène à l'italienne.

[...] On a perfectionné des vieux trucs, on a remplacé dans les installations le gaz par l'électricité; ce ne sont pas des inventions comme la machine à faire les nuages et quelques trucs de ce genre qui constituent un apport sérieux; le rôle de la lumière est plus subtil; c'est le seul moyen extérieur qui puisse agir sur l'imagination du spectateur sans distraire son attention; la lumière a une sorte de pouvoir semblable à celui de la musique; elle frappe d'autres sens, mais elle agit comme elle; la lumière est un élément vivant, l'un des fluides de l'imagination, le décor est une chose morte.

C'est ce qu'écrivait Charles Dullin le 10 novembre 1929 (tiré de Charles Dullin, publié dans la collection Mettre en scène, chez Actes Sud-Papiers, en 2011), dans un article qui questionnait la prédominance du décor dans le théâtre à l'italienne (il est question ici de toiles peintes et de machines théâtrales de toutes sortes pour des spectacles basés sur l'illusionnisme). 

Par ailleurs, j'aime bien cette idée d'élément vivant (ou dynamique) en opposition à l'élément mort (ou statique).

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