jeudi 27 août 2020

De retour au Moyen Âge!

Ce matin, je reprends le chemin des vraies répétitions!

Et c'est sur un matériel dramaturgique que j'apprécie beaucoup que ce retour se fera! Pour l'occasion, pour le projet en question, je travaillerai sur La Confession Margot, un texte anonyme daté du début du XVIe siècle. Cette (relative) courte farce médiévale réunit des éléments récurrents du genre: la parodie du curé, la confession naïve, le mélange d'obscénité et de lubricité! Le sujet: la luxure péché mortel!

Le Margot du titre serait le nom du personnage... mais serait également le diminutif de Marguerite, nom donné, semble-t-il, aux personnages féminins de moeurs légères. Ca donne le ton... 

C'est cru. C'est osé. C'est drôle. 

Un travail de présence. De rythme. De respirations et de sens du punch

Il est toujours étonnant de revenir à ces pièces comiques du Moyen Âge pour mesurer, au final, le peu de décalage entre ces univers déjantés, permissifs, disgressifs... et le monde de l'humour et de la comédie d'aujourd'hui!

samedi 22 août 2020

L'espace du «Pageant Historique du Centenaire» (1938)

 Avant La Fabuleuse histoire d'un Royaume (créée en 1988 et jouée depuis presque sans interruption) il y eut le Pageant historique du Centenaire, écrit par le Père Laurent Tremblay, en 1938, pour marquer le centième anniversaire de la colonisation de la région. 

Ce grand spectacle a pris place dans un monumental amphithéâtre temporaire conçu par l'architecte Léonce Desgagné (qui laissera sa marque sur de nombreux édifices significatifs du territoire): 



Les plans et images sont tirés de Fêtes et spectacles du Québec - Région du SLSJ de Rémi Tourangeau (publié en 1993)... ouvrage qui décrit ainsi ce monumental espace:

Le lieu théâtral choisi pour le jeu du pageant de 1938 est situé à l'endroit de la première terre ensemencée au Saguenay: le déclin d'une colline face à la Baie-des-Ha Ha! Il prend l'aspect d'un immense théâtre en plein air, appelé le Théâtre du Centenaire et construit selon les plans de l'architecte Léonce Desgagné. Selon les plans, la scène mesure 36,6 mètres de longueur sur 30 mètres de profondeur et 14,5 mètres de hauteur. Pourvu d'aires de jeu multiples, cet espace comprend une scène intérieure, une avant-scène extérieure et un parquet de trois plateaux disposés en demi-cercle. Les plateaux fermés de chaque côté par des rampes latérales sont assez vastes pour contenir tout un village et permettre l'évolution de jeux de plus de 1 000 figurants. Des estrades pouvant contenir 10 000 personnes sont dressées en face de ce théâtre, mais ne suffiront pas à asseoir tous les spectateurs certains soirs de représentations.


Les photos de ce premier grand spectacle rendent bien la démesure de celui-ci. On peut en voir ici (sur un article paru en 2015), ou encore ici (sur le site de la BaNQ), ou encore sur ce petit document mis en ligne sur Youtube par la Société Historique du Saguenay en février dernier (qui nous permet de voir un peu plus la construction et son occupation par les comédiens):



vendredi 21 août 2020

Quand le Grand Guignol fait des incursions au Québec

Le Grand Guignol, ce théâtre de l'horreur et des angoisses de cette fin du XIXe siècle (période de changements sociaux et de la science), a quelque chose de fort intéressant. Comme une incursions dans la psyché du public d'alors.

Puis, bien sûr, le genre s'est un peu caricaturé lui-même pour devenir un théâtre où le sang et la folie s'entremêlent à des intrigues de séries B. 

Il n'en demeure pas moins qu'il a imposé un style et attiré de nombreux spectateurs... et que son attrait s'est manifesté jusqu'à notre côté de l'Océan. 

Voici quelques éléments tirés des archives...

... une tournée du Théâtre du Grand Guignol lui-même (comme annoncée ici dans L'Autorité du 6 décembre 1923):

... une série sur les ondes de Radio-Canada en 1942, intitulée Le Théâtre de la Peur:

Radiomonde, 6 juin 1942

Le Devoir, 22 juillet 1942

Radiomonde, 8 août 1942

L'Avenir du nord, 14 août 1942

L'Avenir du nord, 6 novembre 1942

... une émission sur les ondes de CKVL (remerciement du Radiomonde du 11 septembre 1948):

... des spectacles avec des grands artistes d'ici (comme celui-ci annoncé dans Radiomonde du 16 juin 1951:

jeudi 20 août 2020

De la douleur du metteur en scène en représentation!

Autant je n'ai pas peur du public avant et après, autant j'en ai peur pendant la représentation. Je me dis: ça y est, ils ont été gênés, ça y est, ils n'ont pas vu ceci qu'ils auraient dû voir, ça y est, ils ont vu cela qu'ils n'auraient pas dû voir, voilà ils sont distraits, voilà qu'il fait trop chaud, qu'il fait trop froid. Je redoute tout ce qui peut rompre le précieux fil tendu entre comédiens et spectateurs. Ce fil tellement fragile, tellement fin. [...] Je ne supporte pas qu'il se passe en scène quelque chose que je n'aime pas. Quand je ne suis pas dans les gradins, mais sur les côtés, je peux au moins courir derrière, faire semblant d'être utile. Depuis trente ans donc, je suis resté debout sur les côtés. Sauf lors de ces fameuses fausses premières, c'est-à-dire des premières non-payantes. Là, je reste à la table de régie au milieu de la salle, parce que je considère que ce sont des répétitions publiques. Mais dès que les gens ont payé, impossible de prétendre que c'est une répétition. Le metteur en scène doit disparaître.

Ce sont les mots d'Ariane Mnouchkine, grande metteure en scène du Théâtre du Soleil tirés des entretiens publiés sous le titre L'art du présent. J'ai beaucoup aimé cette lecture. 

Mais pour revenir à cette citation... 

Je comprends parfaitement ce qu'elle veut dire: je suis aussi incapable de regarder un de mes spectacles à travers les yeux des spectateurs. C'est trop intense. Trop heurtant. Souffrant même. 

Je suis incapable de me retrouver au milieu d'eux pendant une représentation (sauf dans les cas où, comme du temps de la SALR ou lors du Procès à l'ancienne, j'officie également comme régisseur). Une absence de recul et une incapacité d'agir. C'est comme me regarder travailler de façon interposée par les acteurs. Une incapacité de lâcher prise. Mon niveau de plaisir avoisine le zéro!

C'est d'ailleurs ce qui m'empêchera toujours de monter sur scène comme comédien! 

Mais pour revenir à Mnouchkine... 

Voici un documentaire sur elle, sur sa vision du théâtre:



mardi 18 août 2020

Toujours à la recherche de notre histoire théâtrale!

C'est avec un vif plaisir que je parcours le présent bouquin. Il faut savoir que Rémi Tourangeau, chercheur associé à l'UQTR, s'est particulièrement démarqué par son champ d'études: les grands spectacles et les pageants scéniques. Et il s'avère que notre région a particulièrement été fructueuse à ce chapitre!

Dans le dit livre, il se penche en long et en large sur deux grands spectacles marquants: Le Pageant historique du Centenaire de 1938 et La Fabuleuse Histoire du Royaume de 1988. (D'ailleurs, les textes originaux de ces deux oeuvres se retrouvent, dans leur entièreté, en annexe!)

Il y va d'une étude approfondie de la région culturelle, de ses antécédents en matière de spectacles, des legs de ces grands rassemblements, de l'évolution du théâtre... 

Et c'est là que je retire beaucoup de satisfaction alors qu'à travers cette lecture, je peux mettre à jour, peaufiner, enrichir mes connaissances (ici sur ce blogue) de l'implantation du théâtre au Saguenay-Lac-Saint-Jean! La recension se poursuit! 



lundi 17 août 2020

Théâtres de papier

Voici une petite sélection de théâtres de papier, destinés à amuser les enfants, glanés ici et là sur le web... parce que je les trouve magnifiques!












dimanche 16 août 2020

Mise au point sur la création collective

 

Le travail collectif n'est pas la censure collective. Quand on discute d'une idée, il faut éviter qu'elle soit combattue par trois ou quatre avant même d'être totalement exprimée. Cela, nous avons appris à ne pas le faire. On essaie les idées les plus folles de certains. On ne les écrase jamais dans l'oeuf.

Ensuite, il faut laisser avancer ceux qui avancent, c'est-à-dire laisser apparaître les éclaireurs, ceux que j'appelle les «locomotives». Le travail collectif est tout sauf un travail égalitariste. Il y a ceux qui mènent, qui inventent, à tous points de vue, et ceux qui sont moins expérimentés, ou moins en forme, et qui suivent, mais qui sont aussi indispensables. 

[...] Du coup, l'émulation s'accroît, et l'exigence. Il s'agit pour chacun de placer chaque jour la barre plus haut.

Chacun apporte ce qu'il est capable d'apporter. Le beaucoup de certains, et le petit peu des autres.

C'est là une mise au point essentielle, d'Ariane Mnouchkine (dans le bouquin dont je parlais hier) sur ce qu'est, un véritable fonctionnement d'une création collective. Je trouve intéressant sa distinction entre collectif et égalitariste, sa vision du collectif porté par des leaders, sans renier l'apport de chacun des participants. 

samedi 15 août 2020

Le bobo ou la peste

 

Parmi les grands metteurs en scène toujours de ce monde, il y a l'incontournable Ariane Mnouchkine et son Théâtre du Soleil qui est installé, depuis des années, à La Cartoucherie, une ancienne usine d'armement, à Paris. Une grande artiste... et pourtant, je connais assez peu sa démarche, son travail. D'où l'achat d'un bouquin, L'art du présent, publié en 2005 et réédité (et augmenté) en 2016, qui présente une série d'entretiens entre elle et Fabienne Pascaud.

Le Soleil est une troupe au sens premier du terme: une communauté de créateurs, tous égaux, qui vivent pratiquement ensemble. Et c'est ce qui rend cette aventure encore plus intéressante.

Voici ce qu'elle dit (p.14), d'ailleurs, sur cette vie de troupe:

Même quand tout va bien dans une vie de troupe, il y en a toujours un pour qui ça ne va pas. Celui-là, il faut l'écouter, et, en même temps, éviter qu'il n'impose son humeur. Quelques fois c'est juste un bobo, quelques fois c'est la peste. Il faut bien faire la différence entre bobo et peste. Quand j'étais plus jeune, je prenais l'un pour l'autre. Or, un bobo se guérit avec une parole. La peste, il faut couper! [Et quand s'aperçoit-on que c'est la peste?] Trop tard, en général. 

C'est tellement vrai. Parce que l'humain - avec ses forces et ses faiblesses - reste le matériel fondamental du théâtre. 

Le commentaire de Mnouchkine vaut (et se vérifie!) pour les troupes, oui... mais aussi pour chaque équipe, chaque distribution rassemblée pour une production. 

Nous avons tous vécu de ces expériences de tracas passagers, qui minent, à plus ou moins grande échelle, le travail: retards, tensions, problèmes monétaires, problèmes de santé, irritants conjugaux. Ça peut jeter un froid sur la répétition mais ça finit par se résorber le jour même ou la répétition suivante.

Puis il y a de ces moments (plus rares, mais plus épuisants) qui deviennent des crises, des guerres froides, qui peuvent aller jusqu'à mettre en péril le projet en cours (et c'est pourquoi il faut agir): rancoeurs tenaces, tensions profondes, jalousies, égocentrisme, rejets radical de la proposition principale, remise en cause majeure, insouciance et indifférence... Cette dernière catégorie de problèmes est bien sûr la pire, parce qu'elle prend racine au coeur du groupe, s'étend et s'incruste, envahit l'atmosphère... et peut aboutir à une formidable explosion, un départ ou un renvoi de l'un des artistes, voire l'annulation pure et simple du spectacle. Et entretemps, que d'énergies déployées ailleurs que dans un but commun!

Et ça ramène, du coup, à deux des principales fonctions du chef de troupe ou du metteur en scène (ou du directeur artistique): faire preuve de psychologie pour préserver l'efficacité (et l'ambiance créatrice) du groupe. 

Je sens que je vais bien aimer Mnouchkine!

jeudi 13 août 2020

R.I.P. Michel Dumont

 
L'acteur Michel Dumont est décédé. 

Originaire de la région, il a fait ses débuts sur scène avec Ghislain Bouchard (une collaboration qui dura longtemps), au sein de La Marmite avec un très grand succès... comme le relate cet extrait d'un article paru le 24 mars 1966 dans La Presse:

Avant que de ne prendre le large vers la grand'ville où il fit carrière.

À la télé. Sur la scène. Partout. Avec sa prestance et sa voix grave.

Cette voix qu'il a prêté, en 1988 - et pour de nombreuses années (est-ce encore la sienne aujourd'hui?) à l'Esprit du Fjord de La Fabuleuse histoire d'un Royaume

Puis il s'est impliqué pendant des années, à titre de directeur artistique, chez Duceppe

Et il a encore joué. À la télé. Sur la scène. Partout.

C'est une grande perte pour le milieu artistique du Québec et, par conséquent, pour le nôtre.

Comme une mémoire théâtrale qui tout doucement s'efface.

mercredi 12 août 2020

Une autre semonce apostolique

Parmi les grands personnages (anti-)théâtraux de notre histoire québécoise, il y a, bien sûr, Monseigneur Paul Bruchési, le virulent archevêque de Montréal pendant une quarantaine d'années (de 1897 à 1939).

Sous la cape et la soutane se cache un adversaire acharné de la scène, des comédiens, des pièces et de l'immoralité du théâtre en général, décriée sur tous les tons. La vertu de l'époque était, semble-t-il, bien faible... Mais Bruchési veille! Au point, d'ailleurs, de devenir un incontournable sur ce blogue (le petit florilège de ses apparitions ici) comme ses distingués confrères - Mgr Bourget et Mgr Bégin - qui n'ont, d'autre part, rien à lui envier.

Voici donc que le journal La Croix, en ce 9 décembre 1905, relate un autre de ces anathèmes théâtraux dont les journaux d'alors se font souvent messagers. La même rhétorique qu'habituellement: grandiloquence, mise en garde, déception, railleries, menace, attaque, chantage, supplication... 

Cette petite histoire de l'Église contre le théâtre est fascinante parce que terriblement paradoxale.

Si l'Église se pose plus souvent qu'autrement (comme ici) en juge féroce de l'art dramatique, elle semble oublier que c'est aussi grâce à elle que cet art qu'elle voue aux gémonies a pu survivre ici ... et refuse sans doute de voir l'avenir alors que de ses rangs sortira le réformateur tant attendu: le père Émile Legault et ses Compagnons de Saint-Laurent...

mardi 11 août 2020

Contre la censure...


Le journal Les Vrais Débats (dont la devise était, par ailleurs, Ni vendu ni à vendre à aucune faction politique) y allait, en ce 14 octobre 1900, d'un rare plaidoyer (public) contre la censure théâtrale:


lundi 10 août 2020

Âme sensible ou petite nature?

Au tournant du vingtième siècle, les âmes étaient peut-être un peu plus sensibles qu'aujourd'hui... en témoigne ces deux petits entrefilets publiés dans le journal Les Débats, en ce 8 juillet 1900: 

Par café concert, il faut attendre ici cabaret... et ceux-ci pullulaient à cette époque!