On ne s'éloigne pas sans quelque risque ou sans quelque tricherie des lieux originels d'une oeuvre dramatique: le tréteau pour Shakespeare, Marlowe, Ford, etc..., le parvis pour tous nos mystères, le tréteau embourgeoisé pour bien des farces et des comédies de Molière, la scène italienne avec avant-scènes publiques pour toutes notre tragédie classique, le huis-clos pour Sartre, Becque, Anhouil, le tréteau adossé à un mur et à une sorte de passerelle-logia pour Lope de Vega, Calderon... L'amphithéâtre, l'orchestra et la skene pour le Grecs, etc... [...]. Nous devons faire tout ce qu'il est possible pour restituer aux chefs-d'oeuvre du passé une scène et un lieu à l'image de ceux où ils prirent naissance.
Jean Vilar, De la tradition théâtrale, 1955
Bien sûr, Vilar (grand metteur en scène français qui a, parmi ses grandes réalisations, la fondation du Festival d'Avignon en 1947) ne dit pas de faire de l'archéologie scénique.
Ce qui est intéressant avec cette citation, c'est le rappel que les grandes dramaturgies de l'histoire du théâtre - qu'elles viennent de l'Antiquité, du Siècle d'or espagnol, du Nô japonais, de l'époque élisabéthaine, du Moyen-Âge ou du Classicisme - sont ancrées, chacune, dans une forme scénique spécifique qui pose ses propres codes et ses conventions dans une architecture qui pose, de son côté, son propre rapport entre le public et les acteurs.
(C'est d'ailleurs l'une des grandes sources de mon intérêt pour le répertoire universel!)
On ne peut les aborder sans comprendre dans quel(s) but(s) elles ont été écrites et comment elles s'articulaient dans la représentation. La réinterprétation ne sera efficace qu'après avoir retrouvé leurs fondements.
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