Portrait de Bertolt Brecht par Bert Heller (Allemagne, 1912-1970)
Toutes mes lectures - je suis un lecteur éclectique compulsif! - convergent, on dirait, vers la question des publics de théâtre... sujets des derniers billets.
Et voilà qu'hier, alors que je suis en train de lire les Écrits sur le théâtre 1 de Bertolt Brecht (paru en français chez L'Arche en 1963) - parce qu'il est, avec Stanislavski et Artaud, l'un des grands théoriciens (et praticien) du théâtre du XXième siècle et qu'il faudra bien que je passe au travers un de ces jours! - que je tombe sur ce passage (datant de 1939):
[...]
Un monde «dynamique» comme le nôtre, où rien ne dure, fait une grande consommation d'excitants. À la sensibilité de plus en plus émoussée du public, il faut sans cesse proposer de nouveaux effets. Pour distraire son public distrait, le théâtre doit d'abord l'amener à se concentrer; pour le soumettre à son charme, il lui faut l'extraire d'un environnement bruyant. Le théâtre a affaire à un spectateur fatigué, qu'épuise son travail rationalisé et qu'énervent toutes sortes de frictions sociales. Échappé de son petit monde, c'est un fugitif qui vient s'asseoir dans nos salles. Un fugitif, mais aussi un client. Il peut chercher refuge ici ou ailleurs. La concurrence que les théâtres se livrent entre eux, celle qui oppose le théâtre au cinéma exigent aussi, sans cesse, des efforts nouveaux, des efforts pour paraître sans cesse nouveau. (p. 279-280)
Est-ce qu'en 2024 il en va tout autrement? N'a-t-on pas conscience de viser une masse de spectateurs qui est sur-sollicitée? Pour tirer son épingle du jeu, il faut proposer quelque chose d'attirant, de différent, d'événementiel...
Mais cette masse, d'événement en événement, suivra-t-elle longtemps?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Si vous avez un commentaire à faire, ça peut se passer ici: