mardi 6 septembre 2011

D'un autre âge!

Petit extrait trouvé par Benoît Lagrandeur (et mis sur Facebook à mon attention) sur Dailymotion (il faut donc se taper les 15 premières secondes en publicité...). S'il faut en croire l'annonce du début de l'extrait, ce Cyrano aurait été tournée en 1900 (la voix, sur cylindre de cire ayant été rajouté par la suite) , soit trois ans après sa création, et mettrait en vedette Coquelin l'Aîné (créateur de ce rôle qui a, selon le Dictionnaire encyclopédique du théâtre de Corvin, été écrit pour lui), comédien le plus puissant de l'époque.

Voici ce qu'il est écrit encore: Cherchant à impressionner le public, que le nez simplement bourbonien du vrai Cyrano n'aurait pas fait rire, il essaie jusqu'à cinquante faux nez, dits «en pied de marmite», et en choisit un réellement grotesque, repris par tous les comédiens du monde; le rôle écrasant de Cyrano, le plus long de notre théâtre, et qui comporte 1200 vers sur 2570 que contient cette pièce en cinq actes, Coquelin le tient jusqu'à sa mort 950 fois; il exigeait de lui une virtuosité extraordinaire, un visage constamment mobile, une voix claironnante et il y fit preuve d'un talent étincelant, comme, d'ailleurs, dans toutes ses créations.



Voici le même extrait tiré du texte, acte I, scène 4 (suivant de peu la fameuse «tirade du nez»)... ça peut aider à comprendre ce qui se dit:

CYRANO
Déclamant
"Ballade du duel qu’en l’hôtel bourguignon
Monsieur de Bergerac eut avec un bélître ! "

LE VICOMTE
Qu’est-ce c'est que ça, s’il vous plaît ?

CYRANO
C’est le titre.

LA SALLE
surexcitée au plus haut point

Place ! - Très amusant ! - Rangez-vous ! - Pas de bruits !

Tableau. Cercle de curieux au parterre, les marquis et les officiers mêlés aux bourgeois et aux gens du peuple ; les pages grimpés sur des épaules pour mieux voir. Toutes les femmes debout dans les loges. À droite, De Guiche et ses gentilshommes. À gauche, Le Bret, Ragueneau, Cuigy, etc.

CYRANO
fermant une seconde les yeux

Attendez ! ... je choisis mes rimes... Là, j’y suis.
Il fait ce qu’il dit, à mesure.
Je jette avec grâce mon feutre,
Je fais lentement l’abandon
Du grand manteau qui me calfeutre,
Et je tire mon espadon,
Élégant comme Céladon,
Agile comme Scaramouche,
Je vous préviens, cher Mirmydon,
Qu’à la fin de l’envoi, je touche !
Premiers engagements de fer.

Vous auriez bien dû rester neutre ;
Où vais-je vous larder, dindon ? ...
Dans le flanc, sous votre maheutre ? ...
Au cœur, sous votre bleu cordon ? ...
– Les coquilles tintent, ding-don !
Ma pointe voltige : une mouche !
Décidément... c’est au bedon,
Qu’à la fin de l’envoi, je touche.

Il me manque une rime en eutre...
Vous rompez, plus blanc qu’amidon ?
C’est pour me fournir le mot pleutre !
– Tac ! je pare la pointe dont
Vous espériez me faire don : -
J’ouvre la ligne,– je la bouche...
Tiens bien ta broche, Laridon !
À la fin de l’envoi, je touche
Il annonce solennellement
ENVOI
Prince, demande à Dieu pardon !
Je quarte du pied, j’escarmouche,
je coupe, je feinte...
Se fendant.
Hé ! là donc
Le vicomte chancelle ; Cyrano salue.
À la fin de l’envoi, je touche.

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