samedi 8 octobre 2011

«Le Bain»


Un processus de création centré sur la présence du comédien [...] en ancrant le jeu sur la structure du texte et de l'espace, en confrontant la présence et l'absence, le vide et le plein [...]. C'est la recherche (telle que définit dans le programme) à laquelle nous convie Erika Brisson dans la présentation de son projet de fin de maîtrise, Le Bain de Jean-Luc Lagarce.

L'ambition est grande, la notion de présence étant intangible et insaisissable. Pour les uns, il s'agit là d'une simple question de concentration. Pour d'autres, c'en est une d'énergie, d'intensité. Il y a aussi le fait d'être visible. Mais toujours une constante: être là.

Après une ouverture filmique où un corps nu (celui de la comédienne) se déploie dans l'eau, la représentation commence.

Un corps. Calme. Maitrisé. Et une voix. Une voix blanche comme le dirait Claude Régy.

Broyant le récit (de trois pages à l'origine... qui sera trituré, recomposé, répété) par une diction omniprésente et saccadée, elle impose un rapport matériel au texte, un rapport de physicalité. Le texte devient un espace sonore avant d'être une fiction. Une écriture au lieu d'être une parole. Une organisation rythmique.

Avec du public sur les quatre côtés de la scène, la comédienne propose un jeu proche de la neutralité. Jeu parce que somme toute état non-naturel, construit, encadré par une mise en espace. Jeu parce que choix. Le choix d'une théâtralité plus performative qu'illustrative. Une théâtralité (dans le sens définit par Patrice Pavis: faculté de changer l'échelle et de suggérer et de fabriquer le réel avec la voix) qui ne passe pas par une représentation mais par une mise en présence. Être là.

Son corps est là, oui. Mais sans impulsion. Mais dans le noir. Mais hors de l'aire de jeu . Toujours visible mais sans rien donner à voir. Ou si peu. Un corps porteur. Porteur de cette voix. Une présence sonore. La prononciation est artificielle et les mots claquent.

Parallèlement à ce travail, un autre corps s'inscrit lui aussi dans l'espace: celui d'un corps-évocateur. Le corps du danseur Jean-Philippe Sisla. Un autre type de présence. Le lien entre les deux interprètes sera très rarement physique. L'évocation de l'un se conjuguera avec l'énonciation de l'autre et vice-versa, sans pour autant qu'il y ait illustration.

Dans cette friction (ou plutôt, en regard de ce que je viens de dire, cette co-présence), ce récit d'adieu d'une femme à son amoureux se dégage d'une certaine incarnation pour laisser la place à une forme qui, ayant acquis en cours de représentation une certaine force d'impact, atteindra le spectateur.

En bout de ligne, l'expérience académique est-elle concluante?

Probablement. Le résultat est intéressant. La double performance est justifiable. Pour le reste (la réponse à la piste de recherche) il faudrait - ceci étant dit comme tout travail de maîtrise - avoir accès à l'essai qui accompagne l'œuvre pour bien saisir la quête et les différents moyens mis en place. Être plus à même d'en débattre et de juger de l'efficacité de la proposition.

Chose certaine, la réflexion s'ouvre et en ce sens, il s'agit là d'un élément essentiel à ce type de présentation.
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Il reste encore une représentation, ce soir, à 20h, au Petit-Théâtre de l'UQAC.




3 commentaires:

  1. Et le travail de mise en scène lui?

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  2. Le travail d'Élaine est bien... mais à la base, c'est le projet de la comédienne avant d'être celui de la metteure en scène. Je considère donc la production d'abord par ce qu'en dit la comédienne, sa recherche et ses visées... auxquelles, j'imagine, se pliait la mise en scène...

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  3. Qui plus est, même si ce n'est pas nommément dit, tout fait référence à la mise en scène en bout de ligne (choix, direction d'acteur, mise en place, etc.)... J'en parle donc, d'une certaine façon.

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