samedi 14 mai 2022

De la réécriture d'après Goldoni!


La production estivale 2022 du Théâtre 100 Masques est en répétition. Au départ, il était question de prendre le texte original (enfin, une traduction) de Goldoni, Un curioso accidente, et d'en faire une mise en scène inspirée de la commedia dell'arte.

Le genre - tout pétri de vivacité, de spontanéité - a, en quelque sorte, appelé un travail de réécriture pour retrouver une musicalité, du ici et maintenant, du présent en cours. Pour retrouver une oralité propre à une immédiateté, toute mise en scène soit-elle. Et cette réécriture a été plus radicale que prévue.

Rapidement, le parti pris d'un langage très québécisé - voire même exagéré - s'est imposé. Quelque chose qui casse le ton littéraire, qui s'accorde mieux au naturel du comédien en action qui échange  avec le spectateur. Parce qu'avec le genre choisi vient également ce besoin de complicité avec le public, ce lien direct avec le parterre.

Une adaptation donc. Avec bien du gommage, bien des ajouts, bien des clin-d'oeils. Avec des tournures de phrases colorées et des permissions langagières nombreuses. Avec une réappropriation du texte. À tel point que celui que nous avons en main - et retitré Bas les masques! - sera pratiquement, au final, une création!

Et pourtant...

Malgré les aisances que nous avons pris avec le matériel textuel, l'argument de Goldoni reste le même: la mariage contrarié de deux amoureux par des parents opposés. Le classique d'entre les classiques! Ce sont les couples de Molière, de Corneille, de Marivaux! Un argument - vieillot, oui... mais toujours porteur d'embûches! - qui ne sera, ici, qu'un prétexte à des jeux de scène! 

L'articulation du récit reste la même, avec la même progression, les mêmes quiproquos, le même dénouement. Et  tout ça, en respectant, en un sens, les mêmes considérations: dans la pièce originale, il y a, tout au long de l'histoire, des tiraillements entre Hollandais, Français et Italiens qui nous ouvrent grand la porte à nos de guerres de clochers et préjugés bien locaux! 

Le tout passé à la moulinette du rythme. Chaque scène a été resserrée autour de l'essentiel, du squelette de l'enjeu dramatique. Les répliques (réécrites) ont été ciselées pour accélérer les échanges, pour les rendre plus prompts... bref, pour puncher. C'est mordant. C'est grinçant. Comme ça l'était aussi dans le texte original, dans les interstices de la littérature!

Les personnages restent les mêmes avec leurs caractères. Toutefois, par le jeu de la transposition/adaptation, par le jeu du langage, ceux-ci sont grandement exacerbés. Ce sont des personnages forts qui ne font pas dans la dentelle et qui ne s'empêtrent pas dans les nuances! 

Le résultat, en salle de répétition, est jouissif. C'est drôle et énergique... et toujours extrêmement proche de l'esprit de la pièce de Goldoni! 

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